La Poste, qui injectait une moyenne de 120 milliards de dinars entre salaires et pensions, a été appelée à doubler la solde pour atteindre 217 milliards de dinars en mars dernier. De prime abord, la Banque d'Algérie apparaît en toile de fond de la crise de liquidités dans laquelle se débat Algérie Poste depuis août 2010. Ce n'est guère une charge à l'encontre de la première instance monétaire du pays, mais simplement l'aboutissement d'une arithmétique consacrée à l'étude des approvisionnements de la Banque d'Algérie en tant qu'institution émettrice en réponse à une commande faite par Algérie Poste. Les quelques éléments d'une enquête menée auprès des institutions concernées par la problématique font ressortir un écart de taille entre le volume des commandes faites par Algérie Poste et les fonds mis à la disposition de cette institution par la Banque d'Algérie. Durant l'année 2010, les décaissements ont totalisé environ 2110 milliards de dinars au niveau de la poste, alors que les capitaux alloués par l'institution de Mohamed Laksaci n'ont pas dépassé 1410 milliards de dinars durant la même année. L'écart est de 700 milliards de dinars. Ces chiffres, obtenus grâce à une source proche de la première institution monétaire, accréditent les thèses selon lesquelles l'institution émettrice ne satisfait que «faiblement» les commandes d'Algérie Poste. Selon les mêmes sources, peu avant le surgissement de la crise de liquidités, soit jusqu'à juillet 2010, le taux de satisfaction des commandes de la poste par la Banque d'Algérie se situait à 90%. Depuis le mois d'août 2010, le taux de satisfaction a sensiblement chuté pour atteindre quelquefois 50% seulement, alors que les volumes de décaissement poursuivaient une progression notable. Depuis le début de l'année en cours, d'autres chiffres obtenus auprès de la même source expliquent les réactions négatives des bureaux de poste. Les volumes de décaissement recensés durant le premier trimestre de l'année 2011 (550 milliards de dinars) sont nettement supérieurs aux approvisionnements en capitaux de la Banque d'Algérie, lesquels se chiffrent à 417 milliards de dinars. La situation de l'épargne reste également fragile au niveau d'Algérie Poste. Les retraits et les virements, eux, n'ont cessé d'évoluer de manière sensible depuis la rentrée sociale de 2010. Une carte de paiement avant juin Une autre source crédible du ministère de la Poste et des Technologies de la communication et de l'information évalue les commandes d'Algérie Poste, durant le mois de janvier dernier, à 175 milliards de dinars, tandis que les fonds mis à contribution par la Banque d'Algérie n'ont totalisé que 139 milliards de dinars durant le même mois. En février dernier, l'écart entre les volumes de décaissement (165 milliards de dinars) et les approvisionnements de la Banque d'Algérie (111 milliards) était d'environ 54 milliards de dinars. En mars, le concours financier de l'institution de Mohamed Laksaci était de 167 milliards de dinars, alors que les décaissements d'Algérie Poste étaient estimés à 210 milliards de dinars, soit une différence de 43 milliards. La trésorerie d'Algérie Poste a été fragilisée davantage par la hausse des virements, notamment depuis l'entrée en vigueur de certaines augmentations salariales. La poste, qui injectait une moyenne de 120 milliards de dinars en termes de salaires et pensions, était appelée à doubler la solde pour atteindre un volume 217 milliards de dinars en mars dernier, nous confie notre source du ministère de la tutelle. C'est dire que la situation est sur le fil du rasoir. Autre phénomène aggravant : 70% des retraits de ces derniers mois tournent autour de 50 000 DA. La restitution des stocks se fragilise et l'informel accapare une bonne partie de la monnaie fiduciaire. Un groupe de travail, regroupant le ministère des Finances, la Banque d'Algérie et le ministère de la Poste et des TIC, a été installé pour rechercher une cure appropriée à ces difficultés. Ses rapports sont adressés mensuellement aux services du Premier ministre. D'après notre source du ministère de Moussa Benhamadi, Algérie Poste entend se donner les moyens afin de mieux gérer son cash. Au terme de plusieurs mois d'études et d'expérimentations, Algérie Poste devrait mettre en service sa carte de paiement privatif d'ici juin prochain. La poste envisage, en premier lieu, de mettre à la disposition des grands facturiers des DPE. La finalité étant de réduire de 30 à 40% le paiement par cash. La seconde étape consiste à généraliser l'usage de la carte de paiement aux commerces. Ajourné durant plusieurs mois, le projet de paiement par carte est enfin ficelé et les premiers tests devraient être effectués la semaine prochaine, d'après des informations collectées auprès des responsables du département de Moussa Benhamadi. Ce système de paiement par carte magnétique est venu compléter celui du paiement par le moyen de la téléphonie cellulaire qui interviendrait sous peu, d'après les mêmes sources. En attendant la renaissance de la fameuse entreprise de Banque Postale – victime d'une multitude de résistances – la poste semble décidée à se donner les moyens pour une meilleure gestion de son cash.