La Rassemblement national démocratique (RND), par la voix de son porte-parole, a ajouté une couche au doute ambiant quant à l'hésitation des pouvoirs publics à hâter la promulgation des textes d'application de la charte pour la paix et la réconciliation nationale. Invité jeudi au forum politique hebdomadaire de la radio Chaîne II, Miloud Chorfi a estimé que cette mesure est loin d'être une sinécure. « La promulgation de ces lois n'est pas une mince affaire et demande du temps », a-t-il en effet reconnu, avant de souligner que ces textes, devant traduire juridiquement la quintessence de la charte adoptée le 29 septembre dernier par voie référendaire, « comportent des axes importants qui intéressent l'ensemble des catégories affectées par la tragédie nationale ». Ce n'est donc visiblement pas demain la veille que le gouvernement, à travers le ministère de la Justice, va lever le voile sur ces lois censées clarifier et donner corps à une charte qui pèche par des généralités, des équivoques, voire des contradictions. Bien que le lieutenant d'Ahmed Ouyahia au RND s'attende à « tout un arsenal de lois (...) qui concerne les victimes du terrorisme, les disparus, les familles des terroristes et celles des repentis » pour accompagner la charte pour la paix et la réconciliation nationale, il ne s'est tout de même pas hasardé à fixer ou, à tout le moins, suggérer un timing pour cela. Il rejoint ainsi tous les autres officiels qui ont rivalisé, via leurs différentes déclarations, dans les tergiversations, les approximations et imprécisions. A commencer par le président de la République lui-même qui a soigneusement évité de « s'appesantir » sur le sujet lors de la meilleure occasion que lui offrait la tribune de la Cour suprême, à l'ouverture de l'année judiciaire. Un seul indice : c'est au ministère de la Justice qu'incombe la mission d'élaborer ces fameux textes d'application. D'aucuns y avaient décelé ce jour-là le dilemme cornélien d'un président qui ne sait pas trop quoi faire avec une charte qui ne serait pas aussi consensuelle qu'on le pensait même avec taux de 97,36% de oui. Son ministre de la Justice renforce davantage le doute en invitant les journalistes à « donner le temps au temps ». Néanmoins, en politique, le temps est tellement précieux qu'il peut se retourner contre celui qui en abuse. En l'occurrence, les spéculations pleuvent sur la capacité, voire la volonté des autorités de concrétiser les dispositions contenues dans la charte. Abdellah Djaballah du MRN a évoqué récemment l'existence de « freins » à l'élan présidentiel de traduire juridiquement sa charte. Louiza Hanoune n'en pense pas moins en déclarant son incompréhension de cette lenteur. Le constat est en effet saisissant : alors qu'on disait les textes prêts et qu'ils devaient même être rendus publics le soir du 29 septembre, plus de deux mois plus tard l'opinion ne voit rien venir. Bien que Miloud Chorfi précise qu'« un travail est en train de se faire » et que « c'est le gouvernement qui est habilité à préparer ces lois », le doute est plus que jamais de mise. Et avec la maladie du Président, il est loisible de conclure que ce dossier est sans doute momentanément mis sous le coude, quand on sait que Bouteflika est véritablement le centre du pouvoir et de décision.