Paris. De notre correspondant Après la laïcité, l'immigration. Le projet de réduire l'immigration de travail et familiale, avancé par le ministre de l'Intérieur, Claude Guéant, a été remis en cause par la ministre de l'Economie, Christine Lagarde, et le secrétaire général du parti présidentiel, Jean-François Copé. Rompant avec les politiques précédentes de droite comme de gauche, Claude Guéant veut s'attaquer, désormais, à l'immigration légale. Ses sorties calculées, qui ne peuvent en aucun cas être qualifiées de dérapages, sont calibrées au millimètre. L'objectif du ministre de l'Intérieur surprend jusqu'à son propre camp. La ministre de l'Economie, Christine Lagarde, a réagi très vite en demandant de sécuriser l'immigration légale : «dans le long terme, on aura besoin de main-d'œuvre, on aura besoin d'effectifs salariés formés. En ce qui concerne l'immigration qui est légale, évidemment, il faut qu'elle soit protégée et sécurisée». Même le très droitier secrétaire général de l'UMP, Jean-François Copé, apporte un bémol. Il a rappelé la doctrine qui était officiellement jusqu'ici celle de Nicolas Sarkozy, le souhait d'une «immigration choisie». « Je suis favorable à l'immigration choisie, c'est-à-dire celle qui correspond à des critères économiques, et en aucun cas à l'immigration illégale. Quand il y a des métiers, des secteurs dans lesquels nous n'avons pas été suffisamment capables de pourvoir aux offres d'emplois, dans ce cas, il est assez logique d'accueillir des immigrés», observe le patron de l'UMP. Dérapage contrôlé Le patronat ne dit pas autre chose et met en garde contre l'enfermement. La présidente du Medef, Laurence Parisot, plaide pour une immigration «raisonnable». «C'est très dangereux, un pays qui se ferme. Il faut savoir sur ce sujet trouver le bon équilibre entre la nécessité de rester un pays ouvert, et, en même temps, il faut avoir un rythme suffisamment raisonnable pour pouvoir correctement, décemment, intelligemment, intégrer tout le monde. On avait adopté, ces dernières années, une politique raisonnable en matière d'immigration liée au travail, qui consistait à dire qu'il fallait faire des choix selon les besoins, selon certains critères», a déclaré Mme Parisot, lors d'une conférence de presse, au terme d'une réunion des organisations patronales des pays du G8, à Paris. Selon elle, 20 000 personnes en moyenne seraient concernées annuellement par l'immigration liée au travail. L'immigration de travail est en hausse depuis cinq ans, mais reste minoritaire, même si l'immigration familiale et l'asile politique sont en baisse, selon les chiffres officiels de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'immigration de travail, c'est-à-dire surtout la régularisation de clandestins ayant un emploi déclaré en France, répond souvent aux demandes des employeurs dans des métiers non qualifiés ou très qualifiés, comme les informaticiens.Pour l'opposition, il s'agit d'une stratégie politique visant à séduire l'électorat de l'extrême droite, au moment où le Front national effectue une percée dans les sondages, confirmée par un bon score aux cantonales. Dans un communiqué, la présidente du FN, Marine Le Pen, fait la même analyse. «Chaque jour, Claude Guéant apparaît pour nous offrir un petit ‘'dérapage'' contrôlé ou nous annoncer que, cette fois, il va essayer de se mettre au travail. Il y a quelque chose de pitoyable dans cette course électoraliste sans fin.» Claude Guéant fixera la semaine prochaine ses objectifs de baisse du volume de l'immigration légale.