Un virage à 180° par rapport à la politique de l'immigration de Sarkozy ? Pas du tout. Si Guéant, le ministre français de l'Intérieur, paraît obsédé par l'immigration du sud de la Méditerranée, c'est tout simplement parce qu'il répond au souhait du président français. L'ex-préfet de police aura été sorti de l'ombre élyséenne pour justement faire plaisir à la frange la plus à droite de l'électorat français. Cependant, ce glissement n'a pas l'air d'inquiéter les lepénistes. Du tout. Marine, la fille et successeur de Le Pen, tient bon dans les sondages. Sous toutes les coutures, Sarkozy vient après elle ! Les Français préférant l'originale à la copie droitière sarkozyste. Et pourtant, le président français n'en est pas à sa première sortie en matière d'anti-immigration. Il aura tout essayé avec un très proche à lui, Hortefeux, qu'il avait installé à la place Beauvau avant de s'en séparer, aujourd'hui, on le sait, pour inefficacité en matière de lutte contre l'immigration d'origine arabe et africaine. Et voilà qu'il récidive avec Guéant qui a inauguré son ministère avec des sorties encore plus polémiques sur l'islam. Guéant affirmait à Nantes qu'avec l'accroissement du nombre des fidèles de l'islam, un certain nombre de comportements posent problème ! Le 17 mars, il déclarait que les Français à force d'immigration incontrôlée ont parfois le sentiment de ne plus être chez eux ! Ce n'est pas du délire, c'est tout simplement de la xénophobe, du racisme crasse. Son prédécesseur Hortefeux a été condamné par la justice pour moins que ça. Symboliquement certes, mais l'ex-ministre de la police et du culte aura été remis à sa place par la France des droits de l'homme. Qu'à cela ne tienne, le soldat Guéant poursuit sa croisade avec le nouveau projet de réduire l'immigration légale. Le ministre de l'Intérieur s'affiche même comme le plus islamophobe du gouvernement Sarkozy. Parlant de l'intervention militaire de la France en Libye, il n'a pas hésité à la qualifier de croisade. Ce n'est pas un lapsus puisqu'il l'a entièrement assumé. Ses salves s'étaient accélérées au fur et à mesure que Paris se rapprochait du débat controversé de Sarkozy sur la laïcité. Ce fut un flop, mais son ministre continue de labourer invariablement le même terrain. Au point qu'il est à se demander si ce harcèlement anti-immigré et antimusulman va au-delà de préoccupations électorales ? C'est sûrement une posture puisqu'il a été prouvé que les efforts de Sarkozy n'ont pas arrêté la montée en puissance du Front national qui recueille une année avant la présidentielle, 20% des intentions de vote. Quant à la campagne anti-immigrée et antimusulmane de Sarkozy, les Français ont fini par montrer que ce n'était pas leur tasse de lait et qu'ils attendent toujours Sarkozy sur les sujets socioéconomiques : le pouvoir d'achat, la préservation des services publics, la relance économique... Reste que Sarkozy veut réduire l'immigration légale. L'immigration légale a augmenté de 10% en 2010, pour atteindre 190 000 personnes, Guéant veut réduire son flux, notamment les autorisations de travail. Alors que cette immigration choisie était un cheval de bataille de Sarkozy pendant sa campagne de 2007. Pour attirer des travailleurs étrangers dans des secteurs en pénurie de main-d'œuvre, le futur chef de l'Etat voulait favoriser l'immigration professionnelle. Du coup, la France va rendre impossible l'immigration familiale qui représentait, en 2010, 14 500 personnes. Pour réduire l'immigration professionnelle, le ministère de l'Intérieur va revoir à la baisse la liste des 150 métiers qui ouvrent droit à un titre de séjour pour les étrangers non communautaires disposant des compétences requises et renégocier à la baisse les accords de gestion concertée des flux migratoires avec les pays sources d'immigration, qui prévoient notamment des quotas de travailleurs immigrés accueillis en France en échange de réadmission dans leur pays d'étrangers sans papiers. Du côté du patronat, il n'est pas sûr que la mesure soit accueillie avec enthousiasme. Les 20 000 admissions au séjour à titre professionnel sont déjà insuffisantes pour pallier les pénuries de main-d'œuvre qui sévissent dans plusieurs métiers, notamment les aides à domicile, les cuisiniers, les puéricultrices ou encore les informaticiens, sans parler du secteur du bâtiment. Selon une récente étude, les entreprises jugent qu'elles auront du mal à pourvoir dans les prochains mois 37,6% de leurs offres d'emploi. Reste que Marine Le Pen savoure. D. Bouatta