Les accords de Schengen sont-ils caducs aujourd'hui ? En tout cas le président Sarkozy voudrait en revoir certaines clauses, grignotant sur la liberté de circulation dans les pays de l'Union européenne. France. De notre correspondant Cet acquis des accords de juin 1985 sera-t-il suspendu ou modifié, comme le souhaite le président français ? Déjà, il y a quelques jours, suite à la délivrance de titres de séjour temporaires à des exilés tunisiens par l'Italie, la France a établi des contrôles à sa frontière avec ce pays, avec un déploiement massif de forces de l'ordre, pour inspecter les trains en provenance d'Italie, à la recherche des Nord-Africains particulièrement. «Inspection au faciès», ont réagi les défenseurs des droits de l'homme. Ce contrôle a déclenché une querelle entre l'Italie, heureuse de «l'expatriation» de ces Tunisiens encombrants, et la France, qui n'en voulait pas. Une circulaire ministérielle française a, d'ailleurs, fixé les nouvelles règles contraignantes pour les policiers dans la vérification des migrants «Schengen» : séjour en bonne et due forme, adresse, somme d'argent suffisante… L'Europe a jugé que ce contrôle excessif n'était pas contraire à la réglementation édictées en la matière. Depuis samedi, la question a pris une nouvelle tournure avec les contacts en cours entre le président Sarkozy et le président du conseil italien, Sylvio Berlusconi, pour soumettre une proposition aux membres de l'Union européenne de révision des accords de Schengen, autour du thème récurrent aujourd'hui en Europe, celui de l'entrée et du mouvement des migrants d'un pays à l'autre, cheval de bataille de tous les populismes, de la France à la Finlande, où l'extrême droite a beaucoup progressé aux dernières élections. L'idée qui se dégage du forcing de Sarkozy en direction de Berlusconi serait de définir un cadre à la fois plus contraignant pour la circulation libre des immigrés sur le territoire de l'Europe. Un texte commun les deux chefs d'Etat sera soumis à la Commission européenne. Ce texte serait relatif à la question des «clauses de sauvegarde» qui seraient susceptibles de connaître certains aménagements, lorsque des pays ne peuvent pas contrôler leurs frontières extérieures. Un sommet franco-italien, qui aura lieu mardi, devrait tracer les contours de cette nouvelle offensive contre des droits qui fondent l'Europe. On ignore encore ce qu'il adviendra des visas «Schengen» que les consulats européens accorderont. Peut-être faudrait-il d'ailleurs prendre la question à l'envers, en posant, comme le fait le Gisti, (Groupe juridique spécialisé dans les soutiens aux immigrés) : «Quelle liberté de circulation ?». Ce sera d'ailleurs le thème, mardi, d'une table ronde : «L'actualité méditerranéenne met en évidence l'inadaptation de l'approche, par les pays européens, de la question des migrations. Et l'urgence de sortir des schémas dans lesquels la classe politique, mais aussi un bon nombre d'entre nous, sommes enfermés : le contrôle des déplacements des personnes par la fermeture des frontières à l'immigration serait le seul mode d'organisation possible. Pourtant, dans un contexte économique fondé sur la mondialisation des échanges, tout montre que la position qui vise à assigner à résidence les êtres humains n'est pas viable. Elle ne pourra survivre ni aux coups de boutoir de celles et ceux qui la combattent au risque de leur vie (les milliers de morts de la «guerre aux migrants» qui dure depuis deux décennies) ni à la prise de conscience que l'«emmurement» du monde est une fuite en avant».