La commémoration des manifestations du 11 Décembre aurait pu constituer pour les autorités algériennes une nouvelle opportunité pour réagir à l'amendement de l'article 4 de la loi du 23 février louant les bienfaits de la colonisation française en Afrique du Nord. Alors que le coup de force de l'UMP qui a rejeté, dans le fond et dans la forme, la proposition d'amendement des socialistes a soulevé une vive polémique dans la classe politique française y compris dans les rangs de la droite, en Algérie, l'événement n'a suscité dans les milieux officiels qu'une réaction timide. Il n'y a pas eu de riposte à la mesure de la forfaiture dont se sont rendus coupables les députés de l'UMP et visant à réécrire l'histoire à travers le prisme déformant de la politique coloniale remise au goût du jour par cette loi scélérate. Le même scénario se répète curieusement avec ce deuxième acte de la loi du 23 février. Lorsque la première mouture de la loi avait été adoptée par l'Assemblée nationale française, il y eut dans les milieux autorisés en Algérie une longue période de flottement et d'hésitation pour se positionner par rapport au contenu de ce texte de loi. Le silence embarrassé avait duré près de trois longs mois avant que le président Bouteflika ne montât au créneau pour rappeler le véritable visage de la présence française en Algérie n'hésitant pas à comparer ce qui s'est passé à Guelma, Kherrata et Sétif avec les chambres à gaz nazies provoquant un véritable tsunami dans certains milieux politiques français. Il avait suffi que Bouteflika descendît dans l'arène pour que se libérât la parole en Algérie donnant lieu à des réactions en chaîne émanant de divers horizons pour fustiger cette loi. Des associations, des partis politiques, le Parlement dans ses deux Chambres sont brusquement sortis de leur mutisme pour relayer le cri de révolte de Bouteflika. Une réaction intervenue sur le tard certes mais elle n'aura pas moins produit malgré tout son effet quand on voit comment a évolué ce dossier que l'on pensait faire passer sans coup férir. Cette fois-ci également alors que la polémique enfle dans l'Hexagone après la récidive du Parlement français concernant la loi du 23 février, chez nous on suit et on subit le débat sans broncher. Les institutions du pays, le gouvernement, le Parlement, la classe politique, le mouvement associatif avec à sa tête les organisations dites de la famille révolutionnaire - ONM, organisations des chouhada - attendent un signal pour réagir. La maladie du Président, qui l'a physiquement éloigné des affaires du pays, a créé dans le pays un immense orphelinat qui fait que personne n'ose faire le moindre commentaire sur cette loi tant que Bouteflika n'aura pas donné le tempo. Tout le monde est suspendu à une réaction de Bouteflika qui tarde à venir et qui pourrait, selon toute logique, ne pas intervenir tant que le président de la République est l'hôte de la France où il se trouve pour des soins depuis plus de quinze jours. On imagine la position délicate qui est celle de Bouteflika que l'on trouverait du côté français mal inspiré de recevoir de sa part une leçon d'histoire sur le passé colonial de la France alors qu'il est leur « invité ». Deux députés de l'UMP, non sans un certain cynisme de mauvais aloi, ne se sont d'ailleurs pas privés de le lui rappeler publiquement. C'est donc selon toute apparence pour des raisons protocolaires et de convenances diplomatiques que Bouteflika n'a pas jugé opportun de s'exprimer sur le dernier vote de la loi du 23 février par l'Assemblée française. Il aurait pu si telle était sa volonté rendre public un communiqué ou faire une déclaration comme il le fait depuis son admission à l'hôpital parisien où il marque sa présence même là où l'actualité du jour ne l'exige pas forcément.