Ce constat à la limite de l'ubuesque surgit au grand jour et s'affranchit du tabou comme a dû le remarquer le wali de Constantine lors de la visite d'inspection effectuée mercredi dans les établissements du secteur. « Que des problèmes », a déclaré le professeur Barkat en accueillant la délégation au sein du service de gynéco-obstétrique au cœur du CHU Benbadis. Et l'on est tenté de croire que le tableau est noir partout dans cet hôpital, à la taille d'une ville, devenu un véritable mouroir où l'on ne va que par défaut. Parler du CHU de Constantine nécessite des pages entières s'il s'agit de faire un diagnostic. Que dire d'une maternité qui accueille 2,4 femmes par lit et effectuent 14 000 accouchements par an. Que dire de l'exiguïté des locaux du centre de prélèvement sanguin ou encore le manque d'équipement qui paralyse l'ensemble des services, surtout celui des anti-cancéreux qui reçoit, à l'image de tout l'hôpital, des malades de toutes les wilayas de l'Est. Le CHU Benbadis a perdu sa vocation universitaire et sombre dans les abîmes de l'insalubrité. Mais la visite de M. Boudiaf avait pour objectif d'apporter des solutions concrètes à des problèmes concrets. Pour ce faire, il a noté les besoins en matière d'équipement de radiologie, notamment pour l'acquisition d'un appareil IRM et un autre scanner pour remplacer les épaves qui occupent vainement l'espace sachant que certains appareils sont réformés depuis 15 ans. Est-il concevable qu'un CHU ne soit pas équipé d'un appareil IRM, même si ce dernier vaut 200 millions de dinars, et priver le simple citoyen incapable de se payer ce service qui coûte 13 000 DA dans les cliniques privées ? L'hôte du CHU a déclaré à l'occasion, « je souhaite équiper tous les services d'appareils sophistiqués mais je voudrais aussi que les professeurs soient à la hauteur ». Allusion qui reviendra à plusieurs reprises durant la visite dans les bouches de plusieurs responsables dévoilant les conflits d'intérêts et le malaise qui traverse le corps des médecins à Constantine. D'aucuns savent, en effet, l'existence de clans au sein de la corporation et les tiraillements qui s'enchevêtrent souvent avec les appartenances politiques et le pouvoir qu'elles procurent. La naissance des cliniques privées a ajouté à la complexité du problème par la faute des abus qui se généralisent au détriment de la notion même du service public. Le docteur Zermane, directeur général du CHU, a posé le problème de communication et de concertation entre les médecins responsables, le professeur Barkat a parlé des assistants qui n'assistent pas et le professeur Hassani a, quant à lui, dénoncé les médecins qui font des heures complémentaires un trafic et trichent sur le dos du CHU et de ses malades. Ce type de problèmes relève de l'organisation interne et aussi et surtout de déontologie médicale. En ce qui concerne l'Etat, l'avenir semble apporter une bouffée d'oxygène si la promesse du wali pour la transformation de l'hôpital militaire de Didouche Mourad en hôpital civil se réalise. Le directeur de la santé a annoncé pour sa part qu'une enveloppe de 600 millions de dinars vient d'être octroyée pour la construction d'un complexe mère-enfant qui pourrait être érigé à Sidi Mabrouk. En gros, toutes les doléances présentées par les responsables rencontrés sur son parcours ont été accueillies positivement par le wali qui a inspiré l'idée de formuler concrètement les besoins qui seront présentés au ministre de la Santé attendu la semaine prochaine à Constantine. La délégation a visité par la suite les établissements spécialisés de Djebel El Ouahch, Sidi Mabrouk, Daksi et El Bir et relevé à chaque point les carences et les doléances du personnel qui, selon les promesses de M. Boudiaf, seront pris en charge pour permettre l'amélioration du rendement du secteur et de ses structures dans un délai de 6 mois.