Les événements s'accélèrent militairement et diplomatiquement concernant le dossier libyen. Le compte à rebours a commencé pour El Gueddafi. Cette semaine pourrait être cruciale pour le régime chancelant du colonel El Gueddafi qui risque de perdre son plus grand soutien : la Russie. En effet, après avoir longtemps tourné le dos aux rebelles du CNT et joué à fond la carte du sauvetage du soldat El Gueddafi, les Russes semblent de moins en moins sûrs que leur poulain puisse sauver sa tête. Signe de ce revirement spectaculaire, Moscou a demandé clairement mardi aux émissaires du régime de Mouammar El Gueddafi qu'elle a reçus «d'appliquer» la résolution du Conseil de sécurité de l'ONU, qui prévoit notamment de cesser tout recours à la force contre des civils. En creux, le duo Poutine-Medvedev ne veut plus cautionner le massacre des civils commis par les troupes d'El Gueddafi. C'est un virage diplomatique à 180 degrés que vient de négocier Moscou. Et comme pour enfoncer un peu plus le régime finissant de tripoli, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, rencontrera, demain à Moscou, un représentant de la rébellion libyenne. C'est ce qu'a annoncé hier une source ministérielle russe. «La rencontre entre Sergueï Lavrov et un représentant de Benghazi aura lieu demain à Moscou», a précisé cette source citée par les agences russes, sans autre précision. Plus tôt dans la semaine, M. Lavrov s'était déclaré prêt à rencontrer les représentants des rebelles libyens qui multiplient leurs visites à l'étranger pour asseoir leur légitimité internationale. «J'espère qu'ils pourront venir nous rencontrer dans un avenir proche.» Lavrov veut être rassuré «Nous sommes prêts», avait déclaré lundi M. Lavrov. Cette rencontre, prévue initialement mercredi, n'a pas eu lieu. «Malheureusement nous avons appris que les représentants des rebelles à Benghazi qui nous avaient contactés pour venir à Moscou avaient dû ajourner leur visite pour des raisons techniques», avait ajouté M. Lavrov. Or, des «raisons techniques», il n'y en a point eu puisque le porte-parole du Conseil national de transition (CNT), l'instance dirigeante de la rébellion libyenne, Jalal Al Gallal, avait précisé qu'il était «hors de question que des représentants de la rébellion se trouvent à Moscou en même temps que des émissaires d'El Gueddafi». Mahmoud Jibril, numéro deux de la rébellion libyenne à court d'armes et d'argent pour continuer sa lutte contre le colonel El Gueddafi, a été reçu la semaine dernière à Washington et à Paris. Le fait que le CNT, jadis ignoré, soit reçu à Moscou, est une preuve que le processus de lâchage d'El Gueddafi est déjà enclenché. La Russie veut simplement qu'elle soit rassurée sur ses intérêts immenses en Libye, dont elle est le principal fournisseur d'armes. Il va de soi que si le CNT arrive à convaincre Moscou, ses «marchés» en Libye seront bien gardés, «l'ours blanc» n'hésitera pas à foncer sur la forteresse lézardée de son ancien «ami» El Gueddafi. Le ralliement de la Russie au camp des Occidentaux précipitera sans doute la chute du colonel. Ceci d'autant plus que, de l'autre côté de l'Atlantique, les Etats-Unis veulent avoir la tête d'El Gueddafi même s'ils tardent un peu à reconnaître le CNT pour des raison tactiques. Obama réclame le feu vert au Sénat La preuve ? Le président américain Barack Obama a demandé aux élus du Congrès «leur soutien pour la poursuite des opérations militaires en Libye», alors que le délai légal de 60 jours sans autorisation parlementaire a été atteint vendredi. Dans une lettre adressée hier aux leaders du Congrès, le président a estimé qu'il serait judicieux de la part des élus de se prononcer sur une résolution soutenant une action qu'il qualifie d'«illimitée» de la part des Etats-Unis dans l'intervention militaire. «Même si nous ne sommes plus à la tête (de l'opération), le soutien américain à la coalition dirigée par l'OTAN reste crucial pour assurer le succès des efforts internationaux pour protéger les civils du régime d'El Gueddafi», a écrit M. Obama. Mais la Maison-Blanche précise que le rôle de soutien des forces américaines à l'intervention de l'OTAN ne nécessite pas une déclaration de guerre formelle de la part du Congrès, comme le réclame la Constitution. Elle ajoute que la nature de l'implication américaine dans le conflit contre les forces du colonel Mouammar El Gueddafi ne correspond pas au type d'intervention décrit dans la loi de 1973 intitulée la «loi sur les pouvoirs de guerre» («War Power Act»). Ce texte, adopté après l'implication américaine au Vietnam, tendait à limiter les pouvoirs de guerre du président et à renforcer le rôle du Congrès.