«80% de l'eau se perd à travers les rues qui se transforment en véritables oueds et le reste rejoint les talwegs qui sillonnent Bouarfa, alors que les habitants n'en recueillent que les 20%. Plus d'une vingtaine de points d'éclatement recensés sur le réseau d'AEP ponctuent les quelques 800 mètres qui longent, sur un terrain très pentu et fortement dégradé, la rue Ben Madala (hauteurs de Bouarfa). Une virée avec un hydraulicien de la région et néanmoins ancien maire de Bouarfa nous a permis de constater un réseau d'AEP posé dans divers endroits au ras du sol. «Ils n'ont pas respecté la profondeur de pose qui devrait avoisiner les 60 cm. Allez voir le registre des interventions de l'ADE, unité de Bouarfa, et vous serez sidéré par le nombre astronomique d'opérations de replâtrage», débite notre compagnon. Bifurquant sur la rue dite Haï El Kallitous (Cité des eucalyptus) et allant jusqu'à la jonction El Kalaa Fars Arrous, le même constat se dégage : partout des points d'éclatement, alors que la conduite principale, soi-disant en PEHD (matériau supportant de très grandes pressions) serpente tantôt au-dessous du sol tantôt au-dessus. Au niveau des Braghtha, il existe une vanne mal entretenue se trouvant juste à côté d'un lieu où l'on pratique l'élevage bovin, ce qui menace de contaminer les eaux potables puisque les eaux de l'écurie fusent jusqu'à la vanne et la submergent par moments. Les habitants des deux quartiers qui comptabilisent quelque 5000 habitants assurent que «80% de l'eau se perd à travers les rues qui se transforment en de véritables oueds et le reste rejoint les talwegs qui sillonnent Bouarfa alors que les habitants n'en recueillent que les 20%. Et dire que le projet a été réceptionné il y a seulement moins de trois ans. Si l'on devait estimer la quantité d'eau perdue, nous pouvons facilement dire qu'il y a de quoi remplir le barrage de Keddara», ironise l'un d'entre-deux. L'autre point noir du réseau d'AEP de ces quartiers à dénivellation est la forte pression dans les conduites. La cote à laquelle a été placé le réservoir de desserte n'est pas étudiée, affirme l'hydraulicien qui propose de réaliser un nouveau réservoir tampon ou régulateur pour amortir la pression et les problèmes des «coups de bélier». Cela a causé de grands dommages au niveau de la l'appareillage hydraulique des ménages (éclatement des compteurs, mauvais fonctionnement des chauffe-eau, détérioration de la robinetterie…). Les habitants de Bouarfa réclament une commission d'enquête sur ce qu'ils qualifient de projet bâclé et de non-respect du cahier des charges, s'il en existe un ! Ils s'interrogent aussi sur le fait qu'il y a eu recours au forage de la nappe de la Mitidja et au refoulement de ses eaux, alors cela pouvait être évité grâce à l'abondance des eaux à Bouarfa. «Cela suppose une grande consommation d'énergie électrique lors du refoulement de la tuyauterie et des travaux de génie civil, du gaspillage pour rien», regrettent les mêmes habitants. «Les eaux d'excellente qualité et très abondantes des oueds Asselgou, Sidi El Fodil et des autres sources jaillissantes et à haut débit, se perdent dans la nature sans que l'on puisse profiter de ces potentialités qui se trouvent à un jet de pierre de notre quartier», conclut de sa part l'hydraulicien.