Walid Laggoune, professeur de droit et consultant, a soutenu l'idée, pour sa part, que la révision de la Constitution, telle que proposée par les autorités, ne saurait constituer une solution aux problèmes du pays. Si les tenants du système actuel, dont la majorité est le produit de la guerre de Libération nationale et se trouve aux affaires depuis près d'un demi-siècle, ne transmettent pas le pouvoir à la génération post-indépendance ou se refusent à laisser la relève générationnelle s'opérer, le changement auquel aspire la société pourrait se produire dans la violence et la confrontation. C'est là, le point de vue défendu, hier, par le sociologue Nacer Djabi, lors d'une conférence-débat consacrée à l'ingénierie des réformes politiques en Algérie, organisée par le Centre de recherche stratégique et sécuritaire (CRSS). Estimant que les «conditions objectives» pour un changement pacifique sont réunies, le conférencier a soutenu, en outre, que les Algériens se sont considérablement assagis en ce sens qu'ils sont beaucoup plus disposés à dialoguer qu'ils ne l'étaient il y a une vingtaine d'années. Nacer Djabi qui a dû, parfois, procéder à des comparatifs avec les «révolutions» arabes pour expliquer les spécificités du «terrain» algérien a douté toutefois de la capacité des élites, des partis politiques et des syndicats à jouer un rôle moteur dans une dynamique de changement en raison notamment de leur faiblesse, de leur atomisation et de leur incapacité à mener des actions communes. Ce n'est pas tout. Pour lui, le pouvoir ne semble pas également avoir compris l'urgence qu'il y avait à procéder à un changement. L'automne prochain sera déterminant Evoquant justement les promesses de réformes faites par les autorités, Nacer Djabi a affirmé que celles-ci ne sont pas sincères. Aussi, s'est-il montré persuadé que le pouvoir n'aurait pas levé le petit doigt s'il n'y avait pas eu de pressions internationales. A ce propos, le sociologue a indiqué que l'automne prochain pourrait être déterminant dans la mesure où c'est à ce moment là que le pouvoir devra faire connaître sa feuille de route. Deuxième intervenant à prendre la parole, Walid Laggoune, professeur en droit et consultant, a soutenu l'idée, pour sa part, que la révision de la Constitution, telle que proposée par les autorités, ne saurait constituer une solution aux problèmes du pays. Cela, surtout si l'on ne procède pas à un renforcement de la justice constitutionnelle. Pour lui, il est nécessaire de trouver le moyen de faire en sorte à ce que la Constitution soit respectée et devienne véritablement un texte de référence. C'est la seule manière qu'il y a, a plaidé M. Laggoune, de barrer la route à ceux qui ont l'habitude de passer des «arrangements politiciens» sur le dos de la loi fondamentale. En ce sens, il fera remarquer que le problème en Algérie ne provient pas tant des lois mais de leur respect. Concernant particulièrement le processus de réformes engagé par le chef de l'Etat, Walid Laggoune a qualifié d'anormal que l'on parle de révision de la Constitution et que l'on ne détermine pas l'objet de cette révision. Sur un autre plan, il est apparu contre l'idée d'une Constituante dans la mesure où, a-t-il dit, des notions telles que la République, l'Etat de droit, le pluralisme politique et la séparation des pouvoirs sont consacrées depuis longtemps dans les textes. Certaines d'entre elles, a poursuivi M. Laggoune, ont même fait l'objet d'un consensus durant la Révolution. De son côté, Mohamed Lagab, enseignant à l'université d'Alger, a averti, lors de son intervention consacrée à la condition des journalistes en Algérie, que le changement doit s'accompagner par la mise en place de conditions devant favoriser l'émergence d'une presse libre et professionnelle, un élément essentiel dans la construction d'un Etat de droit. A ce sujet, il a fustigé longuement les pouvoirs publics qui s'entêtent encore à verrouiller le champ de l'audiovisuel et baîllonner les journalistes.