Le secteur de la santé se trouve depuis des décennies dans un état de déliquescence très avancé, et ce, au grand dam de la population et des professionnels de la santé. Les syndicats du secteur, qui ont tenté de tirer la sonnette d'alarme, payent aujourd'hui le prix fort. C'est du moins ce qu'a révélé hier, lors d'une conférence de presse, tenue au lendemain de sa rencontre avec Bensalah, Dr Mohamed Yousfi, porte-parole du Syndicat national des praticiens spécialistes de la santé publique (SNPSSP). Mohamed Yousfi est revenu sur le statut particulier des spécialistes qui traîne toujours, le régime indemnitaire imposé par le pouvoir et qui ne répond nullement aux aspirations de la corporation et enfin la problématique du service civil. Le conférencier s'est interrogé sur les raisons d'une situation aussi chaotique et se demande s'il ne s'agit pas là d'un règlement de compte : «Est-ce que le pouvoir essaye de nous sanctionner en raison de nos positions critiques à son égard et aussi pour notre engagement pour la défense des libertés fondamentales et le droit syndical. Nul ne peut contester que les syndicats autonomes sont omniprésents sur le terrain ces dernières années», note le docteur Yousfi qui pense que le pouvoir veut punir les spécialistes en décrétant des décisions diamétralement opposées avec leurs revendications toutes légitimes. Le porte-parole des spécialistes est persuadé que le gouvernement, à sa tête Ahmed Ouyahia, sait que si l'on venait à abroger le service civil, en maintenant toutefois le statut des spécialistes tel qu'il est actuellement, aucune personne ne restera dans la santé publique. «Nous avons demandé l'abrogation du service civil et nous avons des solutions pour le règlement de ce problème mais le pouvoir refuse de nous écouter. Nous avons demandé l'amendement de notre statut, le pouvoir a refusé. On nous a parlé d'une augmentation de salaire de 100%, on nous a donné 50%. Ceci est un leurre», déplore le porte-parole du SNPSSP. Par ailleurs, le syndicat des spécialistes a pris part aux assises de la société civile et a été également reçu par le président de la commission de consultation sur les réformes politiques. Un constat alarmant a été dressé à cet effet, quant à la situation qui prévaut dans le secteur de la santé. Le docteur Yousfi a évoqué l'absence d'une politique réelle de santé et regrette que celle prônée actuellement par le pouvoir se résume à gérer les crises dans l'urgence. Malgré les moyens colossaux investis, le système de santé publique est sur la voie de la déstructuration, livré à toutes les dérives, alors que la révision de la loi sanitaire est sans cesse reportée. Notons que face à Bensalah, le syndicat a proposé la mise en place d'un gouvernement d'union nationale, après concertation avec l'ensemble des partis politiques représentatifs, dirigé par une personnalité indépendante faisant consensus et non candidate à aucune élection. A la question de savoir s'il est des prérogatives d'un syndicat de faire de telles suggestions, le porte-parole du syndicat répond : «Les syndicats autonomes se sont retrouvés seuls sur la scène politique et nationale à plaider le droit du citoyen algérien d'être bien soigné et mieux éduqué. Aucun parti politique ni député ne nous a prêté main-forte. Lorsqu'on voit ce vide, il est alors de notre devoir et droit d'être les porte-parole du citoyen devant les autorités du pays.» Pour ce praticien spécialiste, l'élite politique est effacée, elle a failli à ses responsabilités. «Nous ne nous sommes pas gênés de dire que ce n'est ni l'Alliance présidentielle ni certains partis pro-pouvoir n'ont secoué le cocotier dans ce pays mais c'est bel et bien les syndicats autonomes et nous ne nous gênerons pas de dire cela haut et fort», a conclu Dr Yousfi. Le SNPSSP tiendra à la fin du mois en cours une réunion de son conseil national pour décider de la démarche à suivre et des actions à entreprendre face à la fuite en avant du gouvernement et à la politique de replâtrage menée par les dirigeants à l'égard du secteur de la santé.