Les hautes autorités du pays se sont, enfin, rendu compte des limites du mensonge et des méfaits de la rumeur. De par le passé, il faut le relever, les dirigeants algériens ont toujours menti aux Algériens sur leur état de santé. Depuis Boumediène, mensonges, mises en scène et black-out ont entouré les « maladies présidentielles ». Entre octobre et novembre 1978, on s'en souvient, Boumediène avait séjourné six semaines dans un hôpital à Moscou sous prétexte d'un « voyage de travail et d'amitié ». Evoquer leur santé reviendrait à douter de leur capacité à gouverner. En effet, le 26 novembre dernier, la Présidence de la République a rendu public un communiqué annonçant l'hospitalisation de Bouteflika à l'hôpital militaire de Val-de-Grâce à Paris, pour subir « un bilan médical approfondi ». Les rédacteurs du communiqué officiel se sont contentés d'évoquer des « troubles au niveau de l'appareil digestif ». Au départ, il est vrai, les autorités ont soigneusement évité de livrer l'information au règne de la rumeur. Cependant, le silence qui a suivi cette première information a dérouté l'opinion publique et mis à nu un système de communication complètement obsolète. Cela va de soi que la santé du plus haut dirigeant du pays ne regarde pas uniquement lui-même et sa famille. Sa maladie peut avoir des conséquences gravissimes sur la gestion des affaires de l'Etat. Au moment même où l'on spéculait sur le sort de Bouteflika, le ministère de l'Intérieur a évoqué, après plusieurs jours de retard, un grave problème de santé de Noureddine Yazid Zerhouni. L'homme de confiance du Président a, en effet, subi « une lourde opération rénale ». De nombreux journalistes savaient quelque chose sur son hospitalisation, mais ils n'avaient aucune preuve pour en informer l'opinion publique. Il est évident que la rumeur avait contraint le gouvernement à réagir. Après trois semaines au Val-de-Grâce, Bouteflika quitte l'hôpital, le 17 décembre, pour poursuivre sa convalescence dans une résidence parisienne. La télévision nationale a montré Bouteflika en compagnie du professeur Messaoud Zitouni. Tandis que le retour du Président est prévu pour samedi prochain, aucune date n'a été annoncée quant à la rentrée de Zerhouni.