Le livre du regrétté Lakhdar Bentobal, tant attendu, sera publié dans quelques mois. C'est du moins ce qu'a annoncé l'un des deux fils du défunt lors d'une cérémonie de recueillement, qui a eu lieu hier au cimetière d'El Alia, pour marquer le premier anniversaire de son décès. L'absence des autorités officielles devient une coutume lorsqu'il s'agit de commémorer la mort d'anciennes personnalités ayant marqué l'histoire de la nation. Seuls, la famille et les amis de Lakhdar Bentobal ont assisté à la cérémonie de recueillement. Etaient présents parmi la quarantaine de citoyens, Ali Haroun et Belaïd Abdeslam, respectivement anciens membres du Haut Comité d'Etat en 1992 et chef de gouvernement de juillet 1992 à août 1993. Après lecture de la Fatiha du Saint Coran, le fils de Lakhdar Bentobal, Khaled, nous a accordé un bref entretien. Il faut dire que même les journalistes ont brillé par leur absence. On pouvait constater la présence de trois organes de presse seulement. La déception se lisait sur les visages des membres de la famille Bentobal. «Quelle honte pour l'Algérie. On ne daigne même pas assister à la commémoration d'un homme qui a laissé son empreinte dans l'histoire du pays», affirme avec rage Khaled Bentobal. Le fils du défunt pense que «les moudjahidine authentiques sont marginalisés par les pouvoirs publics. Personne n'en parle. Ni la télé, ni la radio, hormis quelques journaux». Il estime que «les grands hommes qui sont morts avant 1962, on s'en rappelle. Heureusement d'ailleurs. Ce que je veux dire, c'est que ceux qui ont vécu après l'indépendance étaient une gêne pour le pouvoir. Alors, on les a condamnés au silence». A ce propos, la publication des mémoires de Lakhdar Bentobal, sujet à controverse, est annoncée pour les prochains mois. «Le livre de mon père n'a jamais fait l'objet d'interdiction. Le problème, c'est que la rédaction des mémoires n'a pas été achevée à temps», a expliqué le fils du défunt. La date de sortie n'a pas été fixée. «Dans quelques mois, le manuscrit sera publié. Le projet est en cours et reste d'actualité», a indiqué Khaled. Si l'histoire de l'Algérie en général, et celle de la Révolution en particulier sont victimes d'une vision rétrograde du système, qui empêche toute initiative pouvant apporter des éléments nouveaux, le livre de Bentobal pourrait apporter son lot d'éclaircissements sur l'assassinat de Abane Ramdane. «Je ne peux pas en dire plus. Ce qui est certain, c'est que le sujet de Abane a été abordé par mon père dans son livre», indique Khaled. Le livre de Bentobal est une autobiographie. L'auteur commence son récit à partir de son enfance et s'arrête à la période d'après-juillet 1962. Selon Khaled, «feu Bentobal a focalisé sur l'histoire de la Révolution. Il a également donné des analyses politiques sur cette période». Connu pour son franc-parler, Bentobal faisait partie du noyau dur des leaders de la Révolution. Il était membre de la délégation algérienne aux Accords d'Evian en mars 1962. Il a préféré s'écarter de la vie politique après l'indépendance. Il était par conséquent intouchable, car ne représentant aucune menace pour les dirigeants de l'époque, issus en majorité de l'armée des frontières. Aït Ahmed emprisonné, Boudiaf forcé à l'exil et plus tard Chaâbani exécuté, le défunt Bentobal n'a pas parlé mais a emporté avec lui tant de secrets. Son fils nous confie : «Pour mon père, l'essentiel c'était d'arracher l'indépendance. C'est pour cela qu'après 1962, il s'est retiré de la vie politique, car jugeant avoir accompli sa mission.» Lakhdar Bentobal est né à Mila en 1923 et mort à Alger le 21 août 2010. Il avait 87 ans.