Constantine semble vouloir faire table rase sur son passé qui, pourtant, compte parmi les plus prestigieux de l'humanité. Berbères, Phéniciens, Romains, Numides, Vandales, Byzantins, Arabes, Juifs, Turcs et Français ont laissé leur empreinte sur le Vieux Rocher. Il n'y a pas si longtemps, des démolisseurs s'acharnaient sur de véritables joyaux architecturaux pour les besoins d'un programme immobilier. Alors que la blessure de Souika est encore béante, un autre pan de l'histoire du nationalisme algérien, la prison du Coudiat, se trouve aujourd'hui menacé de destruction à son tour, malgré son classement comme patrimoine culturel national. Cette prison doit laisser place à un projet de tramway destiné à désengorger le centre-ville. Au lieu de libérer le centre historique de toute surcharge d'activités économiques et administratives, on le soumet à davantage de pressions. La réponse à ce dilemme est donnée par les 80% des Constantinois qui habitent les cités-dortoirs, en se précipitant, dès le lever du jour, vers ce vieux bâti. Là où l'architecture de différentes civilisations s'enchevêtre et cohabite dans l'harmonie et la beauté, sur l'un des sites naturels des plus beaux au monde. C'est cette originalité qui a poussé les Nations unies à choisir Constantine comme cinquième ville au monde à être protégée. Cette situation a poussé l'Association de défense du Vieux Rocher de Constantine (ADDVRC), présidée par Ahmed Benyahia, à renouveler son appel « solennel » au chef du gouvernement, aux ministres de la Justice, de l'Intérieur, de la Culture, des Moudjahidine et des Transports, aux autorités locales de Constantine et aux citoyens « pour qu'ils protègent cette mémoire vivante de la résistance et de l'héroïsme ». Il est du devoir de tous et de toutes, souligne cette association, de préserver aux générations à venir cet édifice qui est un musée vivant, un livre ouvert sur lequel sont écrites les plus douloureuses pages de héros connus et inconnus de notre pays. Pour cette association, « la prison du Coudiat doit rester un symbole et un lieu où nos enfants apprendront à ne pas oublier un autre crime contre l'humanité : le colonialisme ». L'ADDVRC attend également des architectes spécialistes en aménagement, des hommes de culture, des sponsors publics et privés et de tous ceux qui ont des idées innovatrices de faire de ce lieu un espace de recueillement, d'archives, d'expositions, de conférences et de recherches. A signaler que de nombreux enseignants et chercheurs universitaires, à l'instar de Cherifa Hadji, Abdelkrim Badjadja, Daho Djerbal, Zoubir Arous, Amine Khaled, Amine Khène et Nacéra Benseddik se sont solidarisés avec « l'appel » de l'Association de défense du Vieux Rocher de Constantine.