Le mode de suicide le plus fréquent est généralement la pendaison. L'âge des sujets qui mettent fin à leur vie varie entre 11 et 70 ans. Selon des chiffres recueillis auprès de la direction régionale de la protection civile, 346 personnes ont mis fin à leurs jours entre 2005 et 2011 dans la wilaya de Tizi Ouzou.Le mode de suicide le plus fréquent est généralement la pendaison. L'on dénombre également des cas de personnes qui se donnent la mort à l'aide d'arme à feu ou en se jetant d'une hauteur. C'est le cas, à titre indicatif, de l'homme, d'une trentaine d'années, qui s'est jeté dernièrement du haut d'un pont sur l'autoroute traversant Bouhinoun, dans le sud du chef-lieu de wilaya. Selon les statistiques fournies par M. Ghezali, le chargé de l'information à la direction locale de la Protection civile, il s'agit de la quarantième personne qui s'est suicidée au cours des neuf derniers mois à Tizi Ouzou. Le suicide n'est pas un acte fortuit. Ceux qui mettent fin à leurs jours, ce sont souvent des sujets adultes qui ont un niveau socioéconomique plus au moins bas. Il a été dénombré également des cas d'universitaires. Il y a quelques semaines, une étudiante au département de français de l'université Mouloud Mammeri, originaire de la commune d'Iflissen, s'est donné la mort par pendaison. Elle ne souffrait pourtant d'aucun problème de santé. Selon nos informations, elle s'apprêtait même à partir au Canada. L'année précédente, c'est un jeune garçon de 12 ans, originaire de Timizart (Ouaguenoun), qui avait mis fin à sa vie de la même manière. Il ne souffrait lui aussi d'aucune maladie ni d'antécédent psychologique. Il a eu une scolarité normale. Le plus souvent, les personnes qui se suicident ont un niveau du primaire, des célibataires surtout. Il est beaucoup plus fréquent chez les hommes que chez les femmes.Sur les 346 cas enregistrés depuis 2005 à ce jour à Tizi Ouzou, 287 sont de sexe masculin. «Ce sont les hommes qui se suicident le plus. Les femmes, au contraire, font beaucoup plus des tentatives de suicide», a précisé le Professeur Ziri. L'âge des sujets qui mettent fin à leur vie varie entre 11 et 70 ans. L'on enregistre de temps à autre des cas de personnes qui recourent au suicide et dont l'âge dépasse les 80 ans. C'est le cas par exemple de cet homme de 91 ans, originaire d'Ait Khellili, découvert il y a quelques semaines pendu à l'intérieur d'une habitation tout près de sa demeure. Un fléau national Ce fléau social n'est bien entendu pas un problème propre à la région. Il concerne, en revanche, l'ensemble du territoire national. De l'avis des spécialistes, il n'y a pas d'études bien précises et plus au moins exhaustives sur lesquelles l'on peut s'appuyer pour dire que telle région du pays est supérieure à telle autre en termes de suicides. L'on signale des cas de personnes qui se suicident aussi en zones rurales, dans des milieux défavorisés ou dans des périmètres urbains. Et si l'on en parle autant à Tizi Ouzou, a indiqué le Professeur Ziri, c'est parce qu'on s'est intéressé à ce genre de problèmes. Le phénomène est bien plus médiatisé au niveau de cette wilaya. Le directeur du CHU ajoute : «Il faudrait préciser d'emblée que le phénomène des suicides est un problème qui existe dans le monde entier depuis l'antiquité. Il est faux de croire qu'il y a beaucoup plus de suicides à Tizi Ouzou qu'ailleurs en Algérie. On en parle beaucoup dans cette wilaya parce que c'est une région qui est médiatisée». Et puis, ajoute-t-il, «depuis l'an 2000, on a commencé à travailler sur ce sujet. Je fais partie de la première commission de lutte contre les fléaux sociaux au niveau de la wilaya. J'étais président de cette commission. On avait travaillé justement sur le suicide. En 2000, nous en avons fait une étude rétrospective, et à cette époque déjà, nous avons dénombré 93 cas de suicides. L'année d'après, 2001, l'on a enregistré 73 cas. Puis en 2002, il y en avait moins : une cinquantaine.» L'étude du phénomène en question a été reprise en 2007, année durant laquelle 4 cas de suicide ont été enregistrés pour 100 000 habitants. En 2008, il a été dénombré 6 cas pour 100 000 habitants, alors que pendant les années 2009 et 2010, des chiffres avoisinant les 6 cas pour 100 000 habitants ont été également enregistrés, selon les statistiques de ce psychiatre. Il ajoute que «seules les enquêtes épidémiologiques, qui font la part des choses, peuvent dire que telle région enregistre beaucoup plus de suicides que telle autre». Le suicide est un phénomène de société dont la prise en charge implique tous les citoyens ; les soignants, les pouvoirs publics et la famille plus particulièrement. «Le rôle de la famille est très important. Les personnes qui présentent des troubles doivent être aidées à s'en sortir. Les parents ou autres membres d'une famille qui souffrent d'une maladie quelconque doivent être ramenés chez le médecin généraliste ou chez le spécialiste de la santé pour une prise en charge adéquate. Il faut dire aussi qu'il ne faut absolument pas cacher sa maladie. Ce n'est pas une honte de tomber malade. Celui qui a un patient à la maison, il faut qu'il le ramène chez le soignant. S'agissant de la société, c'est la prise en charge des problèmes dans lesquels évolue le citoyen. Les différents problèmes sociaux doivent être traités cas par cas. Puis il y a des choses qu'on doit traiter individuellement», a indiqué le professeur Ziri, expliquant que les pays qui ont enregistré le nombre le plus élevé de suicides sont généralement situés dans l'Europe du Nord. Ils tiennent des chiffres qui avoisinent les 30 cas de suicide pour 100 000 habitants. «En France, ces chiffres avoisinent les 15 cas pour 100 000 habitants. Le sud de l'Europe, à l'image de la Grèce, de l'Italie, enregistre le taux de suicide le plus bas. Celui-ci se situe entre 3,5 et 4 cas pour 100 000 habitants. A Tizi Ouzou, on se place autour des chiffres de ces pays européens qui ont un taux de suicide bas. On tourne aux environs de 4 à 6 cas pour 100 000 habitants. On fait donc partie des régions ayant un taux de suicide bas. Mais on doit travailler davantage pour connaître le phénomène, et pour connaître aussi les étiologies pour qu'on puisse endiguer, d'abord, toutes les causes à l'origine du suicide, puis ramener évidemment les chiffres de suicide à la baisse», a signalé en conclusion le professeur Ziri.