«Projets de textes de loi, un pas vers les réformes ou une consécration du statu quo ?» Tel est le thème d'une conférence-débat organisée, jeudi dernier à Alger, par la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'homme (Laddh). La réponse à cette interrogation est donnée, à l'issue de la rencontre, suite à une analyse, par les conférenciers des principaux projets de textes élaborés dans le cadre des «réformes politiques» promises par le président Bouteflika. Les avis des participants à cette rencontre convergent tous vers une seule conclusion : «Le régime veut consacrer le statu quo.» Le président de la Laddh, Mostefa Bouchachi, en est même convaincu : «Il n'y a pas de volonté de changement chez le régime algérien», déclare-t-il. Me Bouchachi affirme qu'il n'y a aucune illusion à se faire. «Les nouveaux projets de loi présentés comme étant des textes de réformes politiques consacrent, en réalité, un recul dangereux par rapport aux acquis des Algériens», tranche-t-il. En se référant aux analyses faites par les conférenciers Amar Belhimeur (journaliste et enseignant à l'université d'Alger), Mohamed Iouanoughen (rédacteur en chef du quotidien Wakt El Djazaïr) et Ali Brahimi (député) sur les différents projets actuellement en débat à l'APN, le président de la Laddh se dit «affligé» : «Le nouveau projet de loi sur l'information ne présente aucune avancée. Même chose pour les projets de loi sur les associations et celui sur les partis politiques. Pour la création d'un journal, d'une association ou d'un parti politique, le dernier mot revient toujours à l'administration. Ce sont des textes qui ne répondent à aucune des attentes de la société algérienne. Même les propositions du CNES sur le mouvement associatif n'ont pas été prises en compte, alors que cet organisme est proche du pouvoir.» Et d'interroger : «Pourquoi les tenants du pouvoir s'entêtent-ils à maintenir le statu quo, même s'ils savent que leur entêtement mettra en danger l'Algérie ?» «La lutte pacifique doit se poursuivre» Ce constat renforce la conviction du président de la Laddh quant à la nécessité de la mobilisation et de la poursuite de la lutte pacifique pour la réalisation du changement. «Pourquoi le régime totalitaire algérien accepte-t-il, de son propre gré, de nous donner la démocratie ? Il ne le fera pas sans une mobilisation permanente de la société civile. La dictature est comme un cancer, si on ne le traite pas, il prolifère», lance-t-il. L'examen des projets de loi qui sont actuellement sur le bureau de l'APN renforce le constat fait par Me Bouchachi. Les projets de textes sur les associations et sur les partis politiques consacrent, selon les conférenciers, les pouvoirs de l'administration. Ayant déjà réalisé une étude sur le mouvement associatif en Algérie, Amar Belhimeur soutient que le nouveau projet de loi sur les associations ne répond pas aux attentes de la société civile : «Lors des assises de la société civile organisées par le CNES, cinq aspirations ont été notées. Parmi elles, il y avait l'élimination de l'agrément et le retour au régime déclaratif pour la création des associations. Il n'en fut rien. Le projet présenté par le ministère de l'Intérieur impose à nouveau l'agrément pour les associations.» Selon lui, le foisonnement d'associations (plus de 80 000) répond à un enjeu qui vise «la théâtralisation de la vie politique». Le projet de loi sur l'information, explique pour sa part Mohamed Iouanoughen, «n'a apporté aucune nouveauté». «Tous les ministres de la Communication que nous avons connus, ne gèrent pas réellement ce secteur. Ils n'ont aucune responsabilité sur les imprimeries publiques, sur la publicité et sur les journaux. Les décisions viennent toujours d'ailleurs», note-t-il. La création d'une autorité de régulation pour la presse n'a, dit-il, aucun sens : «N'aura un sens que si elle a été créée pour gérer uniquement la publicité», conclut-il.