Le Conseil de la nation n'a pas soumis hier, comme prévu, la nouvelle loi de la prévention et de la lutte contre la corruption au vote des sénateurs. La séance, qui devait être consacrée à l'adoption également de deux nouvelles lois sur la profession du notaire et celle de l'huissier de justice, a été reportée au 22 janvier. Le bureau du Conseil n'a donné aucune explication quant à ce report. La commission juridique se donne le temps pour préparer un ensemble de propositions afin qu'il y ait une seconde lecture de la loi. L'idée a bien germé dès l'arrivée de ce texte de loi sur le bureau du conseil. La nouvelle loi telle qu'adoptée par la Chambre basse du Parlement, à savoir « expurgée » de son article 7, a été débattue au sein du conseil, dimanche 15 janvier. Le tiers présidentiel ainsi que le groupe du RND ont soutenu l'idée d'une seconde lecture de la loi afin de trouver une autre formule permettant de remédier à la suppression de l'article 7 qui, pour rappel, stipule : « Sans préjudice des peines prévues par la présente loi, l'absence de déclaration de patrimoine dans les délais prescrits entraîne la révocation des fonctions ou la déchéance de mandat électoral. » Le rejet de cet article par la majorité FLN a suscité un tollé général. Ce parti qui, par le biais de son secrétaire général, Abdelaziz Belkhadem, avait qualifié l'article 7 d'une « ingérence de l'Exécutif dans le pouvoir législatif », a revu, mardi 17, sa position en n'affichant aucune objection quant à une seconde relecture de cet article. Ainsi, après la révision du FLN de sa position, la détermination du RND à faire tout pour « récupérer » l'article 7 de la corbeille de l'APN, s'ajoutant à la volonté affichée par le tiers présidentiel d'aller vers une seconde relecture, laisse à dire que le texte de loi va être adopté par le Conseil avec un « rajout ». Ce qui se passe rarement au sein de la Chambre haute du Parlement, qui ne peut qu'adopter ou rejeter en bloc les lois qui atterrissent sur son bureau. Mais au-delà de la mobilisation des sénateurs afin de « corriger » leurs voisins députés, les avis restent partagés sur l'« utilité » de l'article 7. Beaucoup d'encre a coulé sur cela. Et le sujet fait toujours l'actualité. Le sénateur du tiers présidentiel, Rédha Boudiaf, intervenant hier sur les ondes de la Chaîne III de la Radio algérienne, a donné quelque part raison aux députés ayant rejeté cet article. « Je crois que ce qui a poussé les députés à rejeter cet article, c'est le fait que la sanction vient de l'Administration, donc du pouvoir exécutif », a-t-il supposé. Il a précisé que les membres de l'APN ne veulent pas que « l'Administration soit une épée de Damoclès sur la tête des parlementaires ». M. Boudiaf, également juriste, estime que « le texte fondamental, qui est l'article 37 qui pose les incriminations pénales, et l'article 38 qui renverse la charge de la preuve n'ont pas été touchés ». Il conclut par dire que l'article 7 ne pose pas des sanctions pénales au sens propre du terme, mais plutôt des sanctions administratives. Pour lui, laisser aussi l'article 7 « ne dérange pas ». Car, l'essentiel en fin de compte, c'est l'application des différentes dispositions de cette loi. Et pour enrayer le phénomène de la corruption, il faudra qu'il y ait aussi une « volonté politique ». « Il y a des fortunes colossales qui sont affichées de manière ostentatoire par des gens qui ne peuvent plus visiblement justifier cette fortune. Posons à ces gens la question prévue dans l'article 38, à savoir d'où as-tu obtenu tout ça », a-t-il souligné. Pour lui, la lutte contre la corruption est une affaire avant tout de culture, de valeurs, de savoir et de probité.