La chorégraphe et professeur de danse, Fatm Zohra Namous, dirige l'école de danse Arabesque à Ouled Fayet, dans la banlieue d'Alger. Présidente d'honneur du 3e Festival international de danse contemporaine d'Alger, du 21 au 26 novembre, elle a travaillé pendant longtemps au Ballet national. - Comment évolue la danse contemporaine en Algérie ces derniers temps ? Nous avons connu plusieurs expériences de danse contemporaine. Actuellement, le problème se pose pour toutes les formes de danse, pas uniquement pour la contemporaine. On manque de communication, on ne sait pas ce que les uns et les autres font. Il existe de petits groupes qui font de belles choses, mais les occasions de voir le fruit de leur travail n'existent pas. A travers le pays, des initiatives sont prises. Il est vrai que ce n'est pas encore d'une classe internationale, mais le niveau est bon. Sonia Amélio, danseuse mexicaine (lors de l'ouverture du troisième Festival international de danse contemporaine d'Alger, ndlr), a rappelé que la base de l'expression contemporaine est la danse classique. - Beaucoup de jeunes arrivent à la danse par la rue, le hip-hop, l'urban dance, le break, etc. Ils n'ont pas de base classique… Je gère une école de danse depuis des années. Je travaille avec des enfants de 5 ans et des jeunes filles de 25 ans. Je leur assure une formation de danse classique. Je les initie aussi à la danse contemporaine. Je reçois des parents, des grands-parents, bref, tout le monde participe. Il y a un amour de la danse. Il faut savoir transmettre le message et interpréter sainement et proprement la danse. Cela dit, nos écoles sont toujours dans le domaine amateur, pas professionnel, parce que le travail se fait en parallèle. - Justement, comment professionnaliser tout ce potentiel juvénile qui n'est pas pris en charge, marginalisé parfois ? On essaie, à travers ce festival, d'amener des groupes algériens. Des groupes qu'on découvrira au fur et à mesure. Notre but est de les sceller les uns aux autres pour en faire des compagnies professionnelles. Tout est possible. - La société ne considère-t-elle pas la danse comme un art mineur ? Au contraire. La société apprécie la danse et aime l'expression corporelle. L'Algérien adore danser. Il faut peut-être apprendre à bien danser. Il est vrai qu'il ne faut pas montrer une expression vulgaire, mais une expression saine. C'est à travers l'interprète qu'on juge la danse. Si je danse d'une façon vulgaire, on pense que la danse l'est tout aussi. Il appartient aux interprètes de donner la belle image pour qu'on puisse respecter cette expression corporelle. - Et comment améliorer la formation dans ce domaine ? A mon avis, comme il existe des instituts de théâtre et de musique, il est important de créer une académie professionnelle de danse. Danse au pluriel : classique, néoclassique, contemporaine, folklorique, etc. Tous les genres de danse doivent être représentés. Il est vrai que les gens ne savent pas différencier tous les genres. Aussi faut-il renforcer la formation et l'éducation artistique. Cela aidera à mieux comprendre la différence qui existe, par exemple, entre le contemporain et le moderne. - Sofiane Boulegraâ a recruté des danseurs pour sa chorégraphie Nya, dans la rue, sur le tas. Il les a formés pour monter un spectacle en septembre 2010… Il a pris un risque. Je le félicite. Il a réussi à récupérer des jeunes qui aimaient déjà la danse. Il n'a donc pas pris des gens au hasard. Dans son groupe, il y a des jeunes qui ont fait l'école de Bordj El Kiffan. Certains danseurs n'ont pas terminé leur formation. Mais tous ont une base en danse. Il ne s'agit pas donc de jeunes pris dans la rue. - Sera-t-il possible aux jeunes compagnies de danse de vivre de leurs spectacles dans le futur ? Tout à fait. La demande existe. Et les portes sont ouvertes. L'art n'a pas de frontières. Donc, je suis très optimiste.