D'abord, un préambule anecdotique : Sétif, à l'époque de la déferlante des Souk El Fellah, la ville des Hauts-Plateaux s'apprêtait alors à inaugurer son grand espace flambant neuf. Tout était fin prêt et ce n'est que le jour J qu'on s'est aperçu qu'on avait oublié un engin de construction dans la nouvelle bâtisse. Une rétrochargeuse en l'occurrence et il a fallut détruire tout un mur pour parvenir à dégager le mastodonte. Anecdote pour anecdote, le même scénario s'est produit à Azzaba dans la wilaya de Skikda à quelques détails près ; le cas de Skikda prête beaucoup plus à la méditation qu'à l'ironie. Car comme l'a soufflé le chef de la daïra de Azzaba au wali de Skikda, « on a vraiment évité le pire ». Et si à Sétif on a oublié une rétrochargeuse, à Skikda on a laissé toute une grue traîner des années durant dans une cité peuplée. Cette « blague » a été mise à nue et en public lors d'une visite de travail effectué par le wali de Skikda à Azzaba. Ainsi, on a appris que l'entreprise qui était en charge de construire quelques blocs d'une nouvelle cité à Azzaba n'a pas jugé utile de « rapatrier » sa grue et l'a laissée au milieu de la nouvelle cité faire la joie des enfants en manque de distraction et constituer un danger permanent pour les habitants. En cherchant à justifier la présence de l'engin, un directeur de l'exécutif, apparemment gêné par les remontrances du wali, a tenté de minimiser la portée de ce petit scandale en affirmant : « Cette grue est là depuis moins d'une année seulement », semblant avoir oublié qu'il avait lui-même répondu aux questions relatives à cette grue, posées par les élus de l'APW dans leur session du 15 avril 2003 ! Le wali, qui n'en revenait pas, ne se gênera pas de sermonner le responsable de l'entreprise de construction : « Ce sont ces agissements qui mènent les entreprises à la faillite. Vous aurez sur votre conscience le chômage de vos employés ». Et de se demander par la suite ce que faisaient les élus locaux durant tout ce temps, alors qu'ils avaient le devoir de veiller sur la sécurité des citoyens. Cette grue aurait failli tomber, à en croire un habitant de la cité qui ajoute : « On n'a pas cessé d'alerter les responsables du danger que nous encourons, mais personne ne s'en est inquiété. Regardez, ce n'est qu'aujourd'hui qu'ils viennent la démonter et c'est uniquement parce que le wali est venu dans notre cité. » Cette situation aussi dramatique que comique a par ailleurs suscité plusieurs autres questions. Qui aurait été responsable si cet engin avait causé des dégâts : l'entreprise, l'APC ou tous à la fois ? Comment se fait-il qu'au moment où on s'égosille à répéter que les entreprises manquent de moyens, on s'offre le luxe d'abandonner un moyen de travail à la corrosion ? Comment accepte-t-on de réceptionner toute une cité avec une grue au milieu ? L'entreprise concernée a-t-elle été payée, car il faudrait penser à lui réserver un « acompte » pour avoir pensé aux enfants en leur offrant gracieusement une grue à la place d'un toboggan. Aujourd'hui, l'engin a enfin été démonté. Il aura juste fallu que le wali se déplace. C'est vraiment navrant de constater encore que des responsables (élus et administration) n'agissent que lorsqu'un haut responsable pointe. Un état de fait qui mène à conclure qu'il faudrait un wali pour chaque daïra, chaque commune, chaque patelin, chaque quartier ...