Les victoires d'Ennahda en Tunisie et du Parti pour la justice et le développement (PJD) au Maroc donnent des ailes à la mouvance islamiste en Algérie. En dansant sur le succès de leurs frères nord-africains, malgré les divisions et les divergences politiques, Soltani et Djaballah ne désespèrent pas d'enregistrer de bons scores aux législatives de 2012. Désormais, que ce soit chez le Mouvement de la société pour la paix (MSP), Ennahda de Fateh Rebaï ou El Islah de Akouchi, sans oublier le nouveau Front pour la justice et le développement de Abdellah Djaballah, tous les calculs sont permis, y compris les coups. La montée en puissance et le succès des islamistes dans les pays d'Afrique du Nord (Maroc, Tunisie, Libye, Egypte), ne se sont pas réalisés du jour au lendemain. Des observateurs disent que l'expérience algérienne a beaucoup servi. Benkirane et Ghannouchi ont été plus politiciens que prédicateurs pour arracher une victoire dans la transparence. D'autres politologues pensent que c'est le discours religieux des islamistes qui est à l'origine de leur victoire. Chose vraie et vérifiable, puisque les deux dernières générations des sociétés «arabo-musulmanes» ont, depuis l'indépendance, reçu un enseignement plus islamique comparativement à leurs aînés. Pour Yasser Zaatra Amine, islamologue, «une partie importante de ces peuples s'identifie dans ce discours car ils représentent la religion» au détriment de programmes économiques et sociaux réalistes. D'un autre côté, le pessimisme plane. Certains voient d'un mauvais œil une victoire si facile des islamistes ; d'autres pensent également que l'internationale des Frères musulmans a pactisé avec les Etats-Unis. Une chose est sûre : la participation des «ikhwane» aux gouvernements pousserait Israël à se dire menacé et ouvrirait donc la brèche à de nouvelles exactions encore plus criminelles de son armée contre le peuple palestinien. En Algérie, exception islamiste ou islamistes d'exception ? Les rumeurs les plus folles indiquent que Soltani pourrait se voir propulsé au Premier ministère. Mais le MSP et les islamistes des autres partis ont beaucoup perdu de leur poids dans la société algérienne. Des affaires de corruption ou de mauvaise gestion pèsent sur les épaules de leurs cadres dirigeants. Le MSP de feu Mahfoud Nahnah a participé, depuis le début des années 1990, aux gouvernements de Zeroual et de Bouteflika. Sa présence dans l'Alliance présidentielle lui a beaucoup coûté en matière de crédibilité. Abdelmadjid Menasra n'a-t-il pas quitté le MSP avec pour argument la protection de la pensée nahnahiste ? Le président du MSP, Bouguerra Soltani, déclarait récemment sur Al Jazeera vouloir quitter l'Alliance présidentielle. Coup médiatique ou promesse réelle ? Comment l'Algérien voit-il ce positionnement ? Trop tard, dit-il, car le MSP, en intégrant l'Alliance, a participé d'une manière directe ou indirecte aux différents échecs des programmes ministériels. Le secteur de la pêche en dit long. L'un des partenaires du MSP voit cette sortie comme une annonce électorale. «Rester ou pas au sein de l'Alliance est une décision souveraine émanant d'un parti», explique Kassa Aïssi, porte-parole du FLN. Il précise que «l'Alliance présidentielle n'est pas une formation politique mais un espace ou trois partis partagent des points communs, entre autres le programme du président de la République». Quant à Mohamed Djemaâ, chargé de communication de l'ex-Hamas, «le Majliss Echoura reporte la décision du retrait ou pas de l'Alliance et ce, après aboutissement de réformes». Sur ce point, les projets de loi proposés à l'APN ne font pas l'unanimité, même s'ils résultent de la volonté du chef de l'Etat. Le FLN, le RND et le MSP ont démontré leurs divergences sur plusieurs aspects. La fin de l'alliance a donc sonné et la bataille électorale aussi.