Tout a bougé pour que rien ne change. La nouvelle année s'annonce sous les mêmes auspices de verrouillage tous azimuts, de marasme économique, d'un système politique décidé à se régénérer contre vents et marées. Le pouvoir a encore une fois réussi à maintenir ses bases intactes, se jouant des soubresauts internes et des révoltes aux frontières. L'année qui arrive sera celle des élections, mais difficile de parier qu'elle sera celle de l'alternance. L'Algérie va célébrer le cinquantenaire de son indépendance sans qu'elle n'ait pu renouveler le personnel politique tenant les rênes du pouvoir. Les plus hautes autorités présidant actuellement aux affaires du pays représentaient déjà l'Algérie aux premières années de l'indépendance. Tout en prétendant durant des années, sinon des décennies, œuvrer pour asseoir la démocratie, les gouvernants n'ont fait qu'enraciner un système gérontocratique, tournant le dos à une population jeune, avide de prendre ses destinées en main. L'allocution présidentielle, lors des assises du CNES jeudi dernier à Alger, a comporté naturellement un message en direction de la jeunesse, une déclaration qui en dit long sur la volonté du pouvoir en place à «passer la main». Le président de la République a indiqué que l'Etat va «redonner aux jeunes la place qui leur revient de droit dans la société», en créant «des facteurs d'intégration dans les domaines qui ont leur prédilection, tels que le sport, la création culturelle ou l'innovation technoscientifique». Le pouvoir, sans même prendre des précautions langagières, renvoie la jeunesse à ses occupations sportives et culturelles, en suggérant que l'exercice politique concerne un personnel déjà en poste depuis fort longtemps. Tous les instruments juridiques et politiques sont mis en place pour permettre aux gouvernants de passer une nouvelle année sans surprise, sans réelle menace sur les bases de l'un des derniers pouvoirs autocratiques de la région. Les journalistes sous la chape d'une loi liberticide, les confinant à l'autocensure, les associations interdites de rassemblement, la carte politique soumise à un savant dosage, où même l'opposition la plus bruyante sort tout simplement du giron gouvernemental. Le discours du 15 avril annonçant un train de réformes pour renforcer la démocratie se révèle à la fin de cette année comme une énième manœuvre d'un système hanté par sa seule survie. Des déclarations d'intention qui ne convainquent personne, à commencer par les observateurs étrangers qui viennent de nous accabler de la 130e place dans le classement mondial en matière de démocratie. 50 années après l'indépendance, la démocratie dans le pays reste en projet.