Grande mosquée de Paris : la tolérance en islam et le soutien au peuple palestinien au cœur du prêche du vendredi    Blida: MM. Hidaoui et Ouadah coprésident une cérémonie de distinction des lauréates du concours "Femmes entrepreneures à succès"    Un syndicaliste espagnol avertit contre les atteintes aux droits humains au Sahara occidental    Athlétisme / Mondiaux 2025 en salle : Chenitef, seul représentant algérien à Nanjing    Le rôle de l'Algérie dans la promotion de la paix et de la sécurité salué par une responsable parlementaire mexicaine    Constantine: "Enafka", une tradition ancestrale consacrant l'esprit de solidarité à la mi-Ramadhan    La Radio Algérie internationale célèbre la Journée nationale de la culture palestinienne    Saisie de 1.7 million de comprimés psychotropes à In Amenas    L'occupant sioniste multiplie ses agressions contre les mosquées en Cisjordanie pendant le mois sacré    ACNOA: ouverture des travaux de la 22e assemblée générale de l'instance africaine à Alger    Le président de la CAF félicite M. Sadi pour son élection au Comité exécutif de l'instance africaine    Hidaoui souligne l'importance de moderniser les établissements de jeunes pour davantage d'attractivité    Impératif d'accélérer les procédures nécessaires à la création d'une société spécialisée dans le transport aérien domestique    17ème colloque des Dourouss Mohammadia à Oran: Le soufisme en Algérie a eu un grand impact dans l'immunisation de la société    Les responsables de la "Chemiserie Djen-Djen" appelés à proposer un modèle standardisé de tabliers d'écoliers    Le président de la République félicite le président de la Commission de l'UA à l'occasion de sa prise de fonctions    Renouvellement par moitié des membres du Conseil de la nation: la Cour constitutionnelle annonce les résultats définitifs ce jeudi    Le 6e Festival de la chanson andalouse de jeunesse s'ouvre à Alger    Vingt-cinq joueurs pour affronter l'Ouganda et l'Algérie    Une 20e journée bien chaude...    Mondial 2026 : l'arbitre algérien Gamouh dirigera Burundi-Seychelles    Suspension de l'aide militaire pour l'Ukraine    Une union syndicale française appelle à un rassemblement contre la circulaire Retailleau    Les colons profanent la Mosquée Al-Aqsa    Renforcement des effectifs de police après la rupture du jeûne    Promotion de l'artisanat traditionnel et des métiers    Les vieux marchés, lieux de prédilection des ''nostalgiques'' pendant le Ramadhan    Lancement des stylos à insuline produits localement avant la fin du Ramadhan    Réunion des agriculteurs à Relizane Sensibiliser et informer sur la régularisation des terres agricoles    Encadrement des étudiants porteurs de projets d'entrepreunariat    Des artisans tunisiens font perdurer la tradition    La cheffe d'orchestre Zahia Ziouani anime une rencontre à Sarcelles    Palais de la Culture Moufdi-Zakaria Présentation à Alger de la pièce de théâtre «Le Fil rouge»    La Défense nationale plébiscite l'Algérie au rang des nations victorieuses    Kessar Abdelkader du parti RND, élu sénateur    Le scrutin se déroule dans de bonnes conditions dans les wilayas du Centre        L'Algérie happée par le maelström malien    Un jour ou l'autre.    En Algérie, la Cour constitutionnelle double, sans convaincre, le nombre de votants à la présidentielle    Algérie : l'inquiétant fossé entre le régime et la population    Tunisie. Une élection sans opposition pour Kaïs Saïed    BOUSBAA بوصبع : VICTIME OU COUPABLE ?    Des casernes au parlement : Naviguer les difficiles chemins de la gouvernance civile en Algérie    Les larmes de Imane    Algérie assoiffée : Une nation riche en pétrole, perdue dans le désert de ses priorités    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Duncan Phillips, mécène et ami des arts
Un Américain à Paris
Publié dans El Watan le 02 - 02 - 2006

Héritier d'une famille richissime, Duncan Phillips faisait partie de cette génération d'Américains déterminés à sortir leur pays de son sommeil culturel.
Le musée du Luxembourg qui est géré par le Sénat français propose actuellement aux visiteurs venus du monde entier une exceptionnelle exposition basée sur la collection privée de l'Américain Duncan Phillips. Pour comprendre l'engouement pour l'Art des grands capitaines de l'industrie aux Etats-Unis, il faut remonter à la deuxième moitié du XIXe siècle. La guerre de sécession s'achève en avril 1865 avec la capitulation du général Lee. Le Nord industriel et républicain triomphe. L'affranchissement des esclaves du Sud permet aux villes du Nord de bénéficier d'une main-d'œuvre à bon marché, en attendant la grosse vague d'immigration italienne et irlandaise. Dans la foulée, la décennie qui va suivre connaîtra un boom économique sans précédent qui entraînera une explosion culturelle tout à fait nouvelle. Avant cette époque, l'Amérique s'était contentée d'être « la fille aînée de l'Angleterre » et sa culture balbutiante ne parvenait pas à se dégager de la nursery européenne. Pittsburgh a été sans doute la ville nord-américaine qui a le plus incarné cette mutation industrielle et culturelle. La famille Phillips a fait, au cours de cette période qui a suivi la guerre civile, fortune dans l'acier et la banque. Né en 1886, Duncan Phillips fera des études à l'université de Yale avant de devenir l'héritier de cette riche famille. Le jeune Duncan fait partie d'une génération de fils de riches ayant reçu une éducation de haut niveau et décidés à sortir l'Amérique de son isolement culturel. Ils sont les emblèmes d'une jeune puissance qui désire associer sa prospérité aux grandes idées du rêve américain et de « l'enlightment (les lumières) ». Les grandes fortunes se sont ainsi appliquées à créer des musées, des collections privées et des fondations culturelles pour « éclairer leurs concitoyens par les joies de l'esprit », selon le mot d'un des grands magnats de l'époque, Andrew Carnegie. Ils s'appliquent à ramener d'Europe tout ce qui pourrait plus tard servir à faire émerger une école intellectuelle moderne purement américaine. Dans une Amérique où l'impôt sur le revenu n'existait pas encore, ces milliardaires achètent en Europe occidentale des centaines de toiles de la Renaissance, mais aussi des œuvres de peintres plus récents, comme Rembrandt ou Rubens. Duncan Phillips est l'un de ces « tycoons ». Il s'intéresse particulièrement à l'art pictural et publie son premier article avant d'effectuer en 1911, avec sa famille, un voyage initiatique en Europe. Il fera à cette occasion la connaissance du grand marchand d'Art Paul Durand-Ruel. Comprenant que les USA étaient en train de devenir l'eldorado du marché de l'Art, ce dernier avait dès 1900 installé une succursale à New York. Duncan Phillips lui achètera quelques tableaux, dont l'un des grands chefs-d'œuvre de August Renoir, le fameux Déjeuner des canotiers. Dans un livre écrit en 1982 par la veuve du collectionneur, celle-ci révèle que la toile avait été acquise pour la somme fabuleuse (pour l'époque) de 125 000 dollars. Elle ajoute qu'il était probable que le père du marchand « avait payé Renoir 2000 dollars environ ». Le tableau est revenu à Paris pour être le diamant de cette exposition du musée du Luxembourg. Plus tard, le directeur de la National Gallery de Londres offrit pour acquérir le tableau un chèque en blanc à Duncan, qui refusa bien sûr l'offre. Dans son ouvrage Renoir, mon père, le cinéaste Jean Renoir écrit : « Le Grand déjeuner des canotiers, qui est actuellement à Washington, couronne une longue série de tableaux et d'études, de dessins exécutés à la Grenouillère. » Le milliardaire retenait pour sa part que « l'art de Renoir est du peuple et pour le peuple. Comme le Titien et Rubens, il utilise les formes pour exprimer la joie à travers un débordement de vie et de lumière, plutôt que pour analyser ou dramatiser ».
Mille trois cents toiles
Dix ans plus tôt, l'achat de la toile, Duncan Phillips avait écrit un article incendiaire contre la gigantesque exposition organisée à New York sous le nom de « Armory Show ». Mille trois cents toiles de toutes tendances confondues y avaient été exposées. Le collectionneur, qui était encore sous l'influence de l'impressionnisme et de la Renaissance, s'était insurgé contre l'Art nouveau. Ce qui explique que jusqu'à la fin des années 1930, il a privilégié les œuvres de Monet comme le flamboyant La route de Vétheuil, de Manet, Ballet espagnol, Corot, Genzano, Manet, Femmes se peignant ou encore Delacroix, Chevaux sortant de la mer. Toutes ces toiles figurent dans l'exposition du Luxembourg à côté du sublime La petite baigneuse d'Ingres. Il faut voir de près ce chef-d'œuvre pour mesurer ce que la couleur chair veut dire, loin du virtuel et des reproductions. Mais Phillips est davantage fasciné par Bonnard dont il acquiert plusieurs toiles, par le dessinateur et peintre Honoré Daumier ou par Puvis de Chavannes. En dehors d'une œuvre de Picasso qui appartient à la période bleue de l'artiste, il ne s'intéressera à l'Art moderne qu'à partir du début des années 1930. Il commence par s'approprier des toiles de Matisse et de VanGogh, puis même de Braque, dont il avait pourtant dénoncé la « vulgarité » lors de l'Armory show. L'homme, en esthète éclairé, sait se remettre en question. Il achète treize toiles de Paul Klee, (dont La Cathédrale, qui rappelle à bien des égards les motifs des Houachems en Algérie) et certaines de Kandinsky. Cette magnifique exposition explique sans doute comment l'Amérique, grâce à des collectionneurs comme Duncan Phillips, est passée d'un âge rustre vers les sommets de la modernité artistique. La prospérité aura servi à transférer le goût de génération en génération, le pédantisme cédant peu à peu le pas à la créativité la plus audacieuse. Collectionneur passionné, Duncan Phillips est resté cet esthète modeste qui affirme en conclusion d'une vie consacrée à la contemplation : « Quiconque peut apprécier la beauté sans vouloir se l'accaparer, est plus riche de plusieurs milliers de moments de bonheur que le collectionneur avisé. » L'Amérique a mis sa richesse nouvelle au service de l'Art et l'Art a su lors de grandes crises le lui rendre. Puisse cette sagesse aider nos contemporains à mieux utiliser les périodes de prospérité pour léguer une culture féconde pour les générations futures.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.