On croyait tout connaître de ce régime incarné par Bouteflika quand il s'agit de réprimer certains titres de la presse libre. Fermeture du journal à sept reprises, emprisonnement de journalistes, harcèlement judiciaire, blocage des sources d'information, rétention de la publicité du secteur public, surveillance fiscale permanente constituent l'arsenal classique utilisé contre la presse indépendante. Une autre arme, inventée de toutes pièces par Tayeb Louh, vient de renforcer cet arsenal. Il s'agit de la CNAS. Elle vient d'être testée sur El Watan. Autant vous dire qu'elle nous a fait «exploser» de… rire. Surtout le montant qui nous est réclamé : 22 milliards de centimes ! Comme le ridicule ne tue pas, on a rigolé un bon moment, sachant pertinemment que ceux qui sont derrière cette initiative ne rigolent pas et cherchent vraiment à nous faire mal, quitte à utiliser les artifices les plus fallacieux. On aurait affiché un profil bas si la CNAS nous avait épinglés sur la couverture sociale des travailleurs d'El Watan. Nous serions les «négriers» de la presse, des exploiteurs sans foi ni loi des journalistes ? Ce serait une insulte pour les fondateurs de ce grand quotidien qui, durant les vingt années de son existence, ont donné les lettres de noblesse au journalisme algérien. Ainsi, selon la CNAS, El Watan n'a pas assuré la couverture sociale de ses collaborateurs extérieurs et de ses pigistes depuis 2005. D'après donc ce respectable organisme public, il fallait les déclarer à la CNAS même s'ils exercent par ailleurs un autre métier dans un autre établissement ou une autre société. Une sorte de double imposition, forcément contraire à la loi. La rétribution des collaborateurs et autres pigistes de la presse existe depuis l'indépendance sous la forme d'un régime spécial qui ne correspond pas au schéma classique, comme l'entrevoient Tayeb Louh et ses collaborateurs. A vrai dire, Tayeb Louh pense avoir trouvé le moyen idéal pour affaiblir financièrement le quotidien El Watan. Un objectif auquel il aspire depuis longtemps. Le contexte politique actuel est sans doute propice. Sauf que l'artifice utilisé ne tient pas la route. Il ne sert en fait qu'à dévoiler le véritable visage du pouvoir en place, qui voue une haine tenace à la presse libre, notamment à El Watan. Bien sûr, nous allons nous battre contre cette énième bêtise humaine. Nous y sommes depuis longtemps habitués.