Accusé d'être derrière l'assassinat, le 25 juin 1998, du chantre kabyle, Matoub Lounès, Malik Medjnoune, 31 ans, n'a pas encore été jugé. Il est, depuis six ans, en détention provisoire dans une prison à Tizi Ouzou. Arrêté le 28 septembre 1999 à une centaine de mètres de chez lui, comme en témoigne sa famille, il a été porté disparu pendant sept mois. Soit jusqu'au mois de mai 2000. Ensuite, son affaire a été instruite. Selon ses avocats, le juge d'instruction a prononcé un non-lieu pour faute de preuves. Mais le parquet a fait appel devant la chambre d'accusation, laquelle a annulé l'ordonnance du juge d'instruction. Suite à l'arrêt de la chambre d'accusation, tombé le 10 décembre 2000, l'affaire a été déférée devant le tribunal criminel. Depuis, le dossier de Malik Medjnoune est resté « figé ». Deux chefs d'inculpation ont été retenus contre lui : appartenance à un groupe armé et complicité de meurtre avec préméditation. Accusations, bien entendu, qu'il a réfutées, réclamant son « innocence ». Son frère, Kamel, parle de l'existence de témoins en sa faveur qui n'attendent que la programmation du procès. « Il est complètement abattu et démoralisé. Il ne demande qu'à être jugé. Au plus vite. Car il a peur qu'il soit amnistié pour un crime qu'il n'a pas commis. Les preuves de son innocence sont là », indique son frère, contacté, hier, au téléphone. « Six ans sans qu'il soit jugé, c'est trop », ajoute-t-il. Le collectif des avocats de la défense et la famille du détenu interpellent, en effet, les autorités judiciaires sur cette détention devenue « plus qu'abusive ». « Qu'on le juge ou au moins on le libère », fulmine l'un de ses avocats. Se référant au code de procédure pénal, notamment l'article 125 portant sur la détention provisoire en matière d'affaire de terrorisme, le collectif précise qu'elle ne devra nullement dépasser 24 mois. Mais on en est à 6 ans. « C'est inacceptable », juge le collectif. Préoccupés par l'état psychologique et moral de leur mandant, les avocats de la défense ont fait, en août 2005, une demande pour sa mise en liberté conditionnelle. Mais cette dernière a été rejetée. Sans motif. Une autre demande devait être déposée, hier, par le collectif de défense, qui espère qu'elle aboutisse cette fois. « Avec cette affaire, l'Etat algérien a failli à ses engagements internationaux en la matière, sachant qu'il a signé le pacte international des droits civils et politiques, qui stipule que toute personne a le droit d'être jugée sans retard excessif », estime le collectif de la défense. La famille de l'accusé exige « toute la vérité » sur sa détention. Pour rappel, Malika Matoub, sœur du défunt Lounès et également présidente de la fondation qui porte son nom, avait demandé, dans l'une de ses nombreuses sorties médiatiques, à ce qu'on le libère et qu'on fasse toute la lumière sur cette affaire. Elle a même interpellé le président Bouteflika pour qu'on fasse une véritable reconstitution des faits. Car, pour elle, la première et seule enquête « a été bâclée ». En septembre 2005, le Collectif des familles de disparu(e)s en Algérie (CFDA) a exigé la libération du détenu, considérant qu'il est innocent, preuves à l'appui. Le CFDA, toujours non agréé, trouve que le retard dans le jugement de l'affaire de Medjnoune est dû à des raisons strictement politiques.