Le bureau du RND pour la wilaya de Tamanrasset a été assiégé durant toute la journée d'hier par les militants de ce parti pour exprimer leur colère contre la «confection» de la liste des candidats à la députation établie par le coordinateur de la wilaya, porté disparu depuis deux jours, signalent ses collaborateurs. «Alors que nous étions en pleine campagne de sensibilisation et de préparation des listes pour une bonne représentation parlementaire qui tienne compte de la crédibilité et de la compétence, le coordinateur avait déjà sa propre liste, comportant des noms non reconnus par la base.» Acommencer par les jeunes, qui contestent totalement la candidature de celui qui a été choisi pour les représenter», explique notre source. Abondant dans le même sens, d'autres sources contestent la légitimé des commissions de candidature installées par leur responsable, arguant du fait que «leur création a été faite sans le consentement des membres du bureau de wilaya». Nos interlocuteurs vont plus loin. Ils accusent leur coordinateur d'avoir privilégié «les gros bonnets de l'argent au détriment de la compétence et de la crédibilité». C'est ce qui ressort d'ailleurs de la lettre adressée récemment au secrétaire général du RND, Ahmed Ouyahia, pour l'alerter, affirment nos sources, sur la politique de la «chkara» (les sacs d'argent). «Cette lettre de trois pages a fait part au premier responsable du RND des graves dérives du coordinateur, qui ont été à l'origine de la contestation dans les rangs du Rassemblement à Tamanrasset. Il a été clairement écrit dans cette lettre que le coordinateur est devenu un instrument au service de la mafia, alors que les instances du parti sont prises en otage par ceux qui papillonnent d'un parti à un autre et marchandent l'honneur des gens. En fait, Ahmed Ouyahia était informé de cette journée de protestation. Les auteurs de la lettre – les notables de l'Ahaggar et les jeunes militants du RND – ont annoncé la date du 28 février comme journée de colère. Ils ont exigé l'envoi d'une délégation de haut rang pour mettre un terme à cette situation qui fait de nous, militants, des étrangers au sein de notre propre parti», déclare un cadre du RND à Tamanrasset. Jusqu'en fin de journée, le siège du RND était toujours occupé par les protestataires, créant ainsi un climat de tension dans cette ville très particulière qu'est la capitale de l'Ahaggar. Cette situation aurait pu être considérée comme une affaire de lutte interne à un parti, à la veille des élections. Mais ce n'est pas le cas. Tamanrasset est une ville frontalière avec le Niger et le Mali, des régions où l'argent sale des trafics de drogue, d'armes, de contrebande et de terrorisme ne manque pas. Si avant, bien des députés arrachaient leurs sièges par la force de la fraude, aujourd'hui, beaucoup pourraient acheter leur place au Parlement. La vraie menace qui guette les prochaines législatives n'est pas l'arrivée des islamistes, discrédités d'ailleurs à travers les évènements vécus depuis les années 1990, mais plutôt cette manne d'argent qui circule dans le marché informel, détenue par les fraudeurs en barbe ou col blanc. Dans toutes les villes du pays, la course aux candidatures est ouverte. La rumeur publique a déjà arrêté les montants pour chaque place sur la liste de candidature. C'est ce qui se passe actuellement à Tamanrasset. Le conflit qui secoue les rangs du RND dans cette ville a déjà éclaboussé d'autres formations politiques dans plusieurs autres régions du pays. Cependant, vu la proximité de Tamanrasset des évènements au nord du Mali et en Libye, il n'est pas exclu que des personnes aux richesses mal acquises se retrouvent sur une liste de députation. La virulente réaction des notables de la région et des militants du RND n'est pas fortuite. Ils connaissent assez bien la région pour savoir qu'un tel scénario risque d'embraser leur ville. Le danger est perceptible vu la vulnérabilité de cette région, qui subit de plein fouet les dommages collatéraux des crises humanitaires qui secouent son flanc sud. Le secrétaire général du RND et en même temps Premier ministre, Ahmed Ouyahia, est devant une grave situation qui appelle à une réaction rapide, à la hauteur de la menace. Si hier, les ennemis de l'Algérie étaient ceux qui avaient déclaré la guerre à son peuple, aujourd'hui, le danger qui menace sa stabilité et sa pérennité vient de ceux qui ont pillé ses richesses pour ériger des empires financiers.