L'expérience du professionnalisme en Algérie sera prochainement en débat au niveau des sphères du football. Les responsables de la Fédération algérienne de football (FAF) vont, très bientôt, s'exprimer sur cette expérience qui, dans trois mois, bouclera sa seconde année d'existence. Certes, c'est peu pour faire, déjà, un bilan mais il semble nécessaire de tirer les premiers enseignements de cette nouvelle aventure pour le football algérien «afin d'asseoir ce choix stratégique», indique une source fédérale. Il faut dire que l'engagement dans cette voie, le professionnalisme, était souhaité par la majorité des clubs de l'élite. La preuve, pratiquement tous les pensionnaires des ex-nationales une et deux, se sont engagés dans le projet avec beaucoup d'espoir. Il faut juste rappeler que le passage au professionnalisme était proposé, d'abord, par la FIFA, encouragée ensuite par la Confédération africaine de football (CAF) qui voulaient, à travers, cette option tracer une ligne de démarcation définitive entre le football professionnel et le football amateur. L'Etat algérien, à travers ses institutions, gouvernement, ministère de la Jeunesse et des Sports, collectivités locales, a donné sa caution pour ce grand saut dans ce nouveau monde du ballon rond. S'engager dans cette voie et voir venir après semble avoir été la devise de nombreux acteurs attirés et intéressés par ce projet ambitieux. Dans l'euphorie ambiante de l'époque, l'été 2010, peu de voix, pour ne pas dire aucune, ne se sont élevées pour objecter ou avancer des arguments pour tempérer les ardeurs des dirigeants de club obnubilés par les promesses d'aides, financières et matérielles, des pouvoirs publics. Une fois l'aventure entamée, les acteurs du football ont commencé à mesurer l'ampleur du chantier qui les attendait. Créées par la volonté des membres des assemblées générales des clubs sportifs amateurs (CSA), les Sociétés sportives par actions (SSPA) ont vu le jour très facilement. Un rapide passage chez un notaire et la société est constituée. Cette naissance «précipitée» aurait pu être pire, si les initiateurs du projet, les responsables de la Fédération, n'avaient pas formulé le souhait que la nouvelle entité soit une société par actions afin d'éviter que ne devienne une propriété personnelle, sous une autre forme dans le cas où un individu viendrait «investir» seul dans le capital de la nouvelle société. Des SSPA au bord de la faillite C'est pour cela que les CSA ont été intégrés dans le processus de création de la SSPA. Malheureusement, la réalité du terrain a faussé les calculs dans la mesure où dans de nombreuses SSPA, les CSA (l'âme, la mémoire, l'histoire et la fibre du club) se sont retrouvés au rang de très petits porteurs de parts. Pour nombre de clubs, les conséquences sont dramatiques. Au terme d'un an et demi d'existence, des SSPA sont au bord de la faillite avec des comptes sociaux catastrophiques et qui mettent directement en danger la survie de leur société. Les promoteurs du professionnalisme pensaient avoir réglé ce problème en identifiant les responsabilités de tout un chacun dans la gestion courante de la SSPA. Ils découvrent que les mauvaises habitudes et les mauvais réflexes ont la peau dure. Des «clubs professionnels» qui restent suspendus aux aides et subventions des pouvoirs publics et locaux pour faire tourner la machine, c'est tout sauf du professionnalisme. Nourris des mamelles des caisses de l'Etat, incorrigibles rejetons de l'assistanat, des clubs et leurs premiers responsables ont dévoilé l'esprit de cette initiative. A l'évidence, le professionnalisme en Algérie ne peut exister, se développer dans sa forme actuelle. Beaucoup de choses exogènes au football empêchent l'ancrage de cet ambitieux projet. Il serait judicieux de revoir la copie et de l'adapter aux réalités de notre contexte. Autant de clubs pompeusement affabulés du titre de «professionnels», et qui en réalité ne le sont pas, et qui ne remplissent qu'un seul des nombreux critères (6) imposés par la réglementation en la matière, à savoir la possession d'un registre du commerce, doit, normalement, déboucher sur une nouvelle réflexion pour sauver le nouveau-né. Licence Pro CAF en 2013 A l'heure où ces lignes sont écrites, aucun club algérien ne dispose de la licence Pro qui lui permet de participer aux compétitions organisées sous l'égide de la CAF et la FIFA. La Confédération africaine de football (CAF) a décidé, en février dernier à Libreville, de proroger le délai de délivrance du sésame jusqu'en 2013. A cette date, aucune équipe africaine non munie de ce document ne prendra part à un match de Coupe d'Afrique. C'était l'un des enjeux et objectifs qui ont présidé à l'instauration du professionnalisme en Algérie. Le football algérien ne dispose que de quelques mois pour «régulariser» deux, voire trois situations de clubs de Ligue 1 pour qu'ils puissent défendre les couleurs de l'Algérie lors des futures compétitions interclubs africaines. Le reste du peloton, Ligues 1 et 2, devra se résoudre à revoir ses ambitions à la baisse et enfiler, pourquoi pas, la tunique d'un club semi-professionnel avec, à la clé, de menus avantages par rapport aux lourdes contraintes qui les plombent présentement. La SSPA, la société sportive, ne sera pas obligée, par exemple, de compter dans son chapitre «salariés» des dizaines d'employés dont la seule ressources provient justement de l'activité liée à cette entité. Une révision à la baisse, des prétentions des uns et des autres, qui affectera automatiquement de la boulimie des abonnés aux mangeoires, ne fera que du bien au football. Celui-ci ne peut vivre éternellement au-dessus de ses modestes moyens et qui en plus ne génère aucune source de revenus qui puisse lui garantir son autonomie. La survie du professionnalisme est à ce prix seulement.