La Fédération internationale des journalistes a dénoncé aujourd'hui la mise sous mandat de dépôt du directeur des publications Errisala (La Lettre) et Essafir (l'Ambassadeur), Berkane Bouderbala, suite à la reproduction dans ces deux médias des caricatures publiées par le journal danois Jyllands-Postens. Les deux hebdomadaires ont été suspendus. Par ailleurs, le directeur de l'hebdomadaire Iqra (Lire) a été également mis sous mandat de dépôt mercredi dernier et son journal suspendu pour les mêmes motifs. Pour les mêmes raisons, deux directeurs des chaînes A3 et Canal Algérie affiliées à la télévision d'Etat (ENTV) ont été traduits devant un conseil de discipline puis dégradés de leur poste de responsabilité. « C'est le résultat de l'onde de choc provoquée par la vague d'indignation dans le monde musulman et nous sommes les parfaits boucs émissaires », s'est indigné Mohamed Fardjallah, rédacteur en chef de l'hebdomadaire Essafir. Ce dernier affirme que le journal Errisala, auteur de la reproduction des dessins du Prophète (QSSSL), « n'a fait que son travail de journalisme en ramenant la preuve de l'existence des éléments qui ont outragé le monde musulman ». La Fédération internationale des journalistes a appelé, par le biais de son centre régional d'Alger, « à plus de retenue et de sagesse dans un contexte aussi tendu ».« Le débat doit être conduit par les professionnels des médias, pas par les gouvernements », a déclaré Nadir Benseba, coordinateur du centre de la FIJ. « Les pressions et les poursuites judiciaires risquent, à l'allure des sanctions qui tombent, de prendre des formes d'une nouvelle vague de répression contre les voix indépendantes », a-t-il ajouté. La FIJ rappelle que Bachir Larabi, correspondant du quotidien arabophone El Khabar, condamné le 21 janvier dernier, est toujours en prison. De même, Mohamed Benchicou, directeur du journal Le Matin, croupit en prison depuis le 14 juin 2004. « Les autorités ne doivent pas instrumentaliser le nécessaire débat public », a déclaré Bertrand Ginet, responsable de programmes à la FIJ. « De telles interventions politiques sapent le débat en portant directement atteinte au principe fondamental de la liberté d'expression ; en tant que telles, elles sont inacceptables ».La FIJ a appelé à un « débat robuste » entre les professionnels des médias, qui devrait s'amorcer dans les prochains jours à Bruxelles. Elle demande aux autorités algériennes de libérer les directeurs de journaux emprisonnés et de contribuer à l'apaisement des esprits.