Vainqueur des élections législatives palestiniennes du 25 janvier dernier, mais frappé d'ostracisme par les puissances occidentales et soumis à d'intolérables pressions qu'il assimile à du chantage, le Hamas occupe paradoxalement le terrain, refusant donc tout repli. Bien qu'il se heurte à un mur, il continue tant bien que mal à montrer des signes évidents d'ouverture. Sa dernière sortie s'adresse à Israël, mais aussi à tous ceux qui exigent son désarmement sans la moindre contrepartie. C'est ainsi qu'il a fait savoir qu'il mettra un terme à sa lutte armée contre Israël, si celui-ci se retire de tous les territoires palestiniens occupés. L'engagement est du chef du bureau politique du mouvement, Khaled Mechaâl, dans une interview à un journal russe publiée hier. C'est la fameuse théorie de la paix contre les territoires développée dès 1988 par l'OLP (Organisation de libération de la Palestine) après sa reconnaissance de la résolution 242 du Conseil de sécurité. Ce qui constituait alors une reconnaissance de fait d'Israël. C'est d'ailleurs cette résolution ainsi que la 338 qui ont été retenues comme base de règlement de tout le conflit du Proche-Orient, esquissé lors de la conférence de Madrid de 1991. C'est aussi cela qui a permis la conclusion des accords de principe palestino-israéliens de 1993. Mais c'est Israël qui remettra en cause ce qu'on appelle aussi l'accord d'Oslo, jusqu'à son démantèlement total par les travaillistes d'abord qui refusaient d'honorer leurs propres engagements, et le Likoud ensuite, ce dernier ayant le mérite de la clarté. C'est Benjamin Netanyahu, élu premier ministre en 1996, qui a fait emprunter au processus de paix, le chemin inverse, à travers sa théorie annexionniste de « la paix contre la paix ». Autrement dit, il menaçait les Palestiniens de guerre totale s'ils maintenaient leurs revendications. « Si Israël reconnaît nos droits et s'engage à se retirer de tous les territoires occupés, le Hamas, et avec lui l'ensemble du peuple palestinien, décidera de mettre un terme à la résistance armée », a déclaré Khaled Mechaâl. Bien que dans des déclarations précédentes le responsable palestinien ait déjà indiqué qu'il était d'accord pour une « trêve de longue durée » avec Israël si l'Etat hébreu acceptait de revenir aux frontières de 1967 et reconnaissait les droits palestiniens à l'autodétermination, il n'avait pas parlé, comme dans l'interview de lundi, d'un éventuel arrêt de la lutte armée. Il avait notamment déclaré à la BBC depuis son exil à Damas : « Nous disons maintenant que si Israël se retirait derrière les frontières de 1967 (date de la guerre des Six Jours, ndlr), il pourrait y avoir la paix et la sécurité dans la région et des accords entre les parties jusqu'à ce que la communauté internationale trouve un moyen de résoudre les problèmes de tous. » Khaled Mechaâl s'est toutefois déclaré ne pas être lié par la « feuille de route » puisqu'à son avis « personne ne la respecte ». Puisque personne, a-t-il dit au journal russe, ne respecte les dispositions de la Feuille de route, « les Palestiniens pensent également qu'il n'est pas opportun d'y adhérer » . La Feuille de route, un plan de règlement international du conflit israélo-palestinien adopté en juin 2003 par le Quartette (Etats-Unis, Russie, Union européenne, Onu) et qui prévoyait notamment la création par étapes d'un Etat palestinien en 2005 aux côtés d'Israël, n'a toujours pas été appliquée. La semaine dernière, le président russe Vladimir Poutine avait invité le mouvement palestinien à Moscou pour rechercher une issue au conflit israélo-palestinien. Cette invitation avait été acceptée avec enthousiasme par le Hamas, et à travers les propos de ses dirigeants, il entend préparer cette visite à sa manière. Il a appélé Israël et ses alliés de régler un problème en allant à la racine, c'est-à-dire l'occupation israélienne. Sera t-il entendu ?