« Que l'on soit pour ou contre les élections, que pouvons-nous faire à Ghaza ? Ici, c'est le mouvement Hamas qui décide et je pense qu'il ne veut pas d'élections, car il ne veut pas partager le pouvoir qu'il a pris par la force des armes. » Ghaza : De notre correspondant D'abord réticent, comme beaucoup de citoyens ghazaouis lorsqu'il s'agit de donner leurs avis sur des questions en relation avec le mouvement Hamas, Omar, taxieur, analyse : « Ils ne craignent pas seulement de perdre les élections, ils ont peur de l'inconnu. Que se passerait-il si les services sécuritaires de l'Autorité palestinienne reprenaient leurs activités ? Beaucoup de ceux qui ont été impliqués dans des actions violentes contre les militants du Fatah et les membres des services sécuritaires ont peur qu'ils se vengent. Actuellement, ils contrôlent absolument tout et les risques sont minimes… » Dans ses récentes déclarations, Mahmoud Abbas, le président de l'Autorité palestinienne, a appellé le mouvement Hamas à aller vers des élections législatives et présidentielles immédiates, comme solution à l'état de division qui déchire les Palestiniens. Lundi dernier, un jour après le report par l'Egypte, parrain du dialogue de réconciliation, du prochain round au 25 août prochain, à Beït Sahour, près de Beït Lehem, en Cisjordanie occupée, le président palestinien a dit aux journalistes : « La tenue des élections est la solution du différend après les échecs des rounds de dialogue du Caire. Pour la solution du problème de la division interne, nous avons proposé la tenue d'élections présidentielles et législatives immédiates », indiquant que le vainqueur « gouvernera le pays », tout en se disant prêt à accepter toute solution qui mettra fin à la division dans la bande de Ghaza et la Cisjordanie. Depuis la domination par la force de la bande de Ghaza par le mouvement islamiste Hamas, le président Mahmoud Abbas, chef aussi du mouvement nationaliste Fatah, n'a plus aucune autorité sur l'enclave palestinienne souffrant du blocus israélien qui l'a transformée en grande prison. La situation dramatique que vivent les citoyens de la bande de Ghaza, suite aux mesures israéliennes draconiennes aggravées par la dernière guerre particulièrement sanglante et destructrice, et certains actes des hommes du Hamas à la détente facile ont grandement contribué à la baisse de popularité du mouvement islamiste qui, lors des élections législatives de 2006, a surpris tout le monde en obtenant une large majorité. Dans un récent sondage réalisé par l'université El Najah, située près de la ville de Naplouse, effectué entre le 16 et le 18 juillet, financé par l'université elle-même, en cas d'élections immédiates, le mouvement Hamas obtiendra 15,8% des intentions de vote, alors que le Fatah de Mahmoud Abbas en obtiendra 36,7%. D'après ce sondage adressé à un échantillon composé de 1360 personnes, âgées de 18 ans et plus, dont 860 résidents en Cisjordanie et 500 dans la bande de Ghaza, 79% participeraient aux prochaines élections, parmi eux 67,5% auraient l'intention d'élire Mahmoud Abbas et 21,4% donneraient leur voix à Ismaïl Haniyeh, chef du gouvernement du Hamas établi dans la bande de Ghaza. Faouzi Barhoum, porte-parole du Hamas, a nié que son mouvement craignait les élections après la parution de rapports tel le sondage de l'université El Najah, faisant état du recul de sa popularité suite aux pratiques imposées sur le terrain dans la bande de Ghaza. Bien qu'ils se déclarent prêts, les responsables du mouvement islamiste sont unanimes sur la nécessité de l'ajournement des élections prévues le 25 janvier 2010. Mahmoud Ezzahar, membre du bureau politique du Hamas, a demandé le report des élections législatives et présidentielles à 2012. Des députés du mouvement islamiste de Cisjordanie ont demandé, quant à eux, au chef du Hamas, vivant en exil à Damas Khaled Mechaâl, de tout faire pour ajourner les élections car, selon eux, le Hamas, dans les conditions actuelles, n'est pas prêt à les mener. C'est ce qu'a confirmé Faouzi Barhoum tout de suite après l'appel de Mahmoud Abbas, lorsqu'il a déclaré que les élections se tiendront après accord sur l'ensemble des dossiers dont celui des élections, indiquant que le président doit préparer l'atmosphère pour la tenue des élections et la réussite du dialogue. Lorsqu'on sait que pas moins de six rounds de dialogue, malgré le poids de l'Egypte, ont échoué à rapprocher les deux protagonistes, tellement leurs positions vis-a-vis de tous les dossiers sont divergentes, il est improbable que les Palestiniens puissent organiser des élections immédiates ni même comme le souhaite Abbas à la date prévue du 25 janvier 2010. Abou Chaher, général à la retraite, ne faisant partie ni du Fatah ni du Hamas commente : « Le mouvement Hamas va tenter de repousser les élections au maximum, non seulement parce qu'il a peur de les perdre, mais aussi parce qu'après le 25 janvier 2010, se posera un problème de légitimité pour le poste de la présidence. Le Conseil législatif dont ils détiennent la majorité restera légitime puisque dans la loi palestinienne, le conseil n'est dissous que suite à l'élection de nouveaux membres et comme les élections risquent de ne pas avoir lieu, ils se présenteront à la communauté internationale comme la seule partie légitime dans les territoires palestiniens. Mais le président Abbas n'est pas idiot. S'il convoque des élections générales de façon officielle, le Hamas, en cas de refus, endossera la responsabilité. »