Alors que le plan Annan prévoit le retrait des troupes des villes dès demain matin, le régime s'entête à réclamer des garanties écrites de l'opposition. Le massacre, lui, continue… Le régime du président syrien, Bachar Al Assad, a annoncé hier qu'il ne retirerait pas ses troupes des villes à moins de «garanties écrites» de l'opposition, à deux jours de la date limite fixée par l'ONU. Kofi Annan, émissaire spécial de l'ONU et de la Ligue arabe sur la Syrie, a réagi en se disant «choqué par la montée de la violence et des atrocités dans plusieurs villes et villages de Syrie» et en rappelant dans un communiqué le gouvernement syrien à ses engagements. Selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), les violences ont en effet connu une recrudescence ces derniers jours à travers le pays et le régime syrien a d'ores et déjà prévenu qu'il n'avait pas l'intention de retirer ses forces des villes rebelles sans avoir obtenu plusieurs engagements écrits. Au moins une quarantaine de personnes ont trouvé la mort hier, dont 12 civils, au lendemain d'une journée particulièrement meurtrière avec au moins 128 morts, dont 86 civils. «Dire que la Syrie va retirer ses forces des villes à la date du 10 avril est inexact, Kofi Annan n'ayant pas encore présenté de garanties écrites sur l'acceptation par les groupes terroristes armés de l'arrêt de toute forme de violence et sur leur volonté de livrer leurs armes», a affirmé le ministère syrien des Affaires étrangères dans un communiqué. «M. Annan n'a pas non plus présenté d'engagement écrit des gouvernements du Qatar, de l'Arabie Saoudite et de la Turquie sur l'arrêt de leur financement des groupes terroristes», ajoute le ministère, tout en se disant prêt à poursuivre sa coopération avec l'émissaire international. Ces trois pays ont fortement appuyé l'opposition syrienne ces derniers mois, l'Arabie Saoudite et le Qatar se déclarant même favorables à l'envoi d'armes aux rebelles. Kofi Annan choqué par les tueries Le plan de sortie de crise présenté par M. Annan, que Damas avait accepté le 2 avril et l'ONU entériné jeudi, prévoit que l'armée se retire des villes demain matin afin de permettre un arrêt total des violences, 48 heures plus tard. «La Syrie ne va pas répéter ce qui s'était passé lors de la présence des observateurs arabes, quand les forces armées étaient sorties des villes, ce qui avait permis aux groupes terroristes armés de se réorganiser et de se réarmer pour contrôler des quartiers entiers», insiste le texte. La Ligue arabe avait déployé, fin décembre, des observateurs censés superviser l'application d'un autre plan de sortie de crise, mais ils n'avaient pu que constater une recrudescence des violences. L'opposition, considérée par le régime comme des «groupes terroristes armés», s'était d'ailleurs montrée sceptique sur les intentions du pouvoir. Le CNS craint une catastrophe humanitaire Le Conseil national syrien (CNS), principale coalition de l'opposition, a appelé hier le Conseil de sécurité de l'ONU à «intervenir de toute urgence pour arrêter la catastrophe humanitaire engendrée par le régime (...) en adoptant une résolution (contraignante) sous l'article 7 pour assurer la défense des civils», dans un communiqué. «Croire aux promesses de ce régime barbare (...), c'est lui permettre d'avancer dans son plan criminel pour déchirer la Syrie et baigner ce pays dans le sang», ajoute le CNS. Face à l'afflux massif de Syriens fuyant les violences, la Turquie, qui héberge déjà plus de 24 500 réfugiés, a menacé de prendre des «mesures», si Damas ne cessait pas les violences à la date butoir de mardi. Selon la presse turque, plusieurs scénarios ont été envisagés, en particulier la création d'une zone tampon le long de la frontière. Mais cette option, qui implique l'engagement de troupes turques ou d'autres pays en territoire syrien, signifierait une internationalisation du conflit dans une région déjà sous haute tension. Les violences ont fait hier au moins une quarantaine de morts, dont 12 civils, dans des opérations militaires menées par les forces armées contre les bastions rebelles, notamment dans la province d'Idleb (nord-ouest), et dans des combats. Dans un communiqué, l'ONG a une nouvelle fois accusé le régime de détruire délibérément des habitations : « Lorsque l'armée syrienne sait qu'une personne recherchée se trouve dans une maison, elle ne l'arrête pas mais elle bombarde la maison et ceux qui s'y trouvent.»