« Il y a des forces archaïques dans notre pays qui ne veulent pas de l'installation de la démocratie. Le refus de M. Benbouzid de s'asseoir autour d'une table de négociation avec des Algériens mandatés par 400 000 travailleurs, cela s'appelle de l'irresponsabilité ou de l'apartheid syndical », ont indiqué hier les représentants de la Coordination intersyndicale des travailleurs de l'éducation lors d'une conférence de presse animée au siège du syndicat national autonome du personnel de l'administration publique. Les responsables des cinq syndicats de la CITE (CLA, CNAPEST, UNPEF, SATEF, SETE UGTA de Béjaïa) ont pris part à cette conférence portant essentiellement sur l'évaluation de la grève et les nouvelles perspectives. L'intersyndicale a qualifié de grande réussite le mouvement de débrayage dont le taux de suivi pour les trois paliers a dépassé les 80%. « Le chiffre avancé par le département de M. Benbouzid, à savoir 24%, est complètement erroné et nous le rejetons de prime abord, mais l'objectif du ministre est de minimiser l'ampleur de la mobilisation enregistrée à travers tout le territoire national et au niveau des établissements des trois paliers », dira M. Bekhouche, responsable du SETE qui a expliqué que les syndicats ne veulent pas de confrontation avec le ministre de l'Education nationale et que celui-ci doit comprendre que le chiffre avancé par son département est considéré comme étant une autre agression contre les travailleurs de l'éducation nationale d'une manière générale. « Si la grève n'était pas suivie, le ministre de tutelle devrait être normalement à l'aise. Pourquoi alors utilise-t-il les médias lourds pour appeler les enseignants à faire preuve de sagesse ? Pourquoi il nous poursuit en justice ? A travers le comportement du ministre, nous comprenons qu'il veut arrêter l'élan de notre action, mais il se trompe », dira M. Lemdani, responsable du CNAPEST qui estime que les syndicats ont toujours respecté les lois de la République et que c'est le ministre qui n'a pas respecté les textes de loi et a violé les mécanismes réglementaires régissant le monde du travail, notamment la négociation, l'arbitrage et la médiation. De son côté, M. Osmane, responsable du CLA, refuse que les enseignants soient enterrés dans la précarité. « Cela fait des années que Benbouzid nous demande de patienter. Mais jusqu'à quand ? Nous ne vivons pas de promesses, nous sommes des gens réalistes et responsables. Si le ministre décide d'ouvrir les négociations, nous allons nous réunir pour constituer un collectif qui se rendra au ministère. Les négociations peuvent déboucher sur une action de transition. Il suffit d'un peu de volonté que, malheureusement, nous ne percevons pas actuellement », dira M. Osmane, qui insiste sur l'ouverture du dialogue au lieu du recours « aux plaintes classiques ». Les syndicats ont décidé de mettre de côté leurs divergences et de se consacrer pleinement aux revendications des travailleurs de l'éducation. « Nous ne faisons pas grève par gaieté de cœur. Le débrayage est une manière de faire pression sur les pouvoirs publics. Ces derniers doivent savoir que nous ne prenons pas en otage les élèves, bien au contraire, nous agissons de la sorte dans leur intérêt. Par contre, nous sommes persuadés que c'est le ministère qui est en train d'hypothéquer l'avenir de nos enfants en optant pour la provocation, les intimidations et l'indifférence », a indiqué un représentant de la coordination. Il est prévu, selon les animateurs de la conférence, une réunion qui regroupera les cinq syndicats afin de déterminer la démarche à suivre pour les prochains jours. « Nous allons être attentifs ces jours-ci et voir ce que le premier responsable du pays va annoncer. S'il n'y a aucun changement vis-à-vis de nos revendications, nous continuerons le mouvement de contestation », a souligné un représentant de l'intersyndicale. Notons par ailleurs que certains enseignants affiliés à l'UNPEF, notamment dans la wilaya de M'sila, disent avoir été victimes de « menaces », de « harcèlements » et de « séquestration ». Le responsable du bureau de l'UNPEF de cette région a déposé plainte. « Cette situation est inédite et risque de prendre une autre dimension. Auparavant, les menaces se concrétisaient par des ponctions sur salaires et des dépôts de plainte. Maintenant, on passe au stade supérieur... », commentent les responsables de ce syndicat.