Les zaouïas ont des prétentions inimaginables il y a seulement quelques années. Mahmoud Chaâlal, président de l'Union nationale des zaouïas algériennes (UNZA), vient d'affirmer qu'«exclure (ces dernières) du jeu politique est une erreur», ajoutant, ne reculant pas devant la contradiction, que «pour les élections présidentielles 2004 et 2009, Abdelaziz Bouteflika a été réintroduit au palais d'El Mouradia grâce à nous». Ces propos soulignent la régression terrible de l'Algérie depuis une douzaine d'années. L'action des zaouïas, jointe à celle des islamistes, risque d'enfoncer davantage le pays dans l'abstentionnisme. En effet, le rôle des confréries, à de rares exceptions, a été extrêmement négatif dans l'histoire de l'Algérie. Dès l'occupation du pays, en 1830, par le colonialisme français, elles s'étaient transformées en collaboratrices des colonisateurs qui, en signe de reconnaissance et confiants en leur fidélité, recrutaient des caïds dans leurs rangs. Les nationalistes algériens n'ont pas oublié leur jeu. De ce fait, aussi bien les oulémas du cheikh Abdelhamid Ben Badis, le PPA-MTLD et le FLN-ALN ont déclaré une guerre totale au maraboutisme au point d'annihiler quasi totalement son influence sur la société. C'est Abdelaziz Bouteflika qui va redonner vie aux zaouïas peu après son installation à la Présidence. Alors que le pays avait combattu, par un lourd sacrifice, l'instrumentalisation de la religion dans vie politique, il a tout remis en cause en mettant en première ligne l'islamisme et les zaouïas. Ces dernières sont même devenues des vedettes de la télévision qui ne ratait pas une occasion, dans un excès de larbinisme pour les desiderata du prince, pour les mettre en vedette. L'argent du contribuable leur était versé sans compter. Fortes du soutien présidentiel, elles ont envahi la scène politique et rien ne dit qu'elles ne feront pas, demain, alliance avec les anciens de l'ex-FIS pour consolider leur pouvoir. Car, comme chacun sait, elles n'ont jamais condamné le terrorisme islamiste quand celui-ci mettait l'Algérie à feu et à sang. Ces maîtres du moment jouent avec le feu et portent une lourde responsabilité dans une éventuelle dérive contre la modernité et la démocratie. Ils ont laissé un homme seul ressusciter les morts uniquement pour qu'il puisse assouvir son mysticisme.