Le score obtenu par le Rassemblement national démocratique (RND) suscite moult interrogations : 68 sièges contre 61 en 2007 ! Les militants de ce parti avaient des appréhensions et des incertitudes au moment du dépouillement. Le suspense s'est emparé des militants bien avant la fermeture des bureaux de vote ; ils craignaient la dégringolade, d'autant plus que les premières estimations parvenues au quartier général du RND jeudi à 22h classaient le parti de Ahmed Ouyahia en troisième ou quatrième position. Même si certains militants étaient persuadés de remonter la pente dans les heures à venir, la situation était toutefois très inquiétante, de l'avis même des adhérents du parti. Mais au lendemain du scrutin, la donne a changé. C'est la surprise : le RND maintient et renforce sa position de deuxième force politique au Parlement avec 7 sièges de plus. Le discours de Ouyahia décrié par ses militants Jeudi, les quartiers généraux des partis politiques n'ont pas désempli durant toute la journée. Inquiétude, suspense, optimisme et parfois regrets, tels étaient les sentiments affichés le jour du scrutin par les militants RND. Au siège du bureau de wilaya, une bâtisse mitoyenne à la Grande-Poste, il y avait de l'agitation et une effervescence incomparable au moment du dépouillement. Même si Seddik Chihab, tête de liste dans la capitale, se montrait confiant et serein, ses camarades avaient la peur au ventre. «Nous avons, certes, fait une bonne campagne, mais nous aurions pu mieux faire», lance avec amertume un jeune militant, troisième sur la liste d'Alger. Un débat s'installe alors. Certains adhérents font des reproches à Ouyahia, ils regrettent quelque part son franc-parler. «Ouyahia ne sait pas s'y prendre avec les gens d'en bas. Il communique mal», précise un militant, dénonçant ce rapport hautain qu'entretiennent les partis au pouvoir vis-à-vis de la population. Un autre de dire : «Comment voulez-vous qu'on vote pour le RND alors qu'Ouyahia trouve injuste que les gens consomment du yaourt !» Celui-ci déverse sa colère en apprenant que Amar Ghoul, tête de liste de l'Alliance verte, risque de rafler la mise dans la capitale. «Oui, Amar Ghoul a su capter l'attention des citoyens par son verbe et en s'appropriant le chantier de l'autoroute Est-Ouest. Les gens ont voté pour l'autoroute», ironise un militant, qui ne nie pas que parfois les vérités et l'arrogance de M. Ouyahia portent préjudice au parti. «J'ai demandé à un jeune de voter pour le RND, il m'a répondu qu'il n'aimait pas Ouyahia car il est à l'origine de toutes les décisions impopulaires. Pour les jeunes des quartiers populaires, Ouyahia méprise son peuple», rapporte ce militant. M. Harchaoui, ancien ministre des Finances et ancien député, déplore la régression du niveau politique en Algérie ; pour lui, Ouyahia tente d'élever le niveau à travers un discours politique consistant, malheureusement, il n'est pas compris par toutes les franges de la société, d'où la «sanction». Les militants du RND reprochent aux Algériens leur refus d'aller voter, laissant le terrain aux islamistes… Plus loin, à Ben Aknoun, le QG du RND est calme. Il faut monter jusqu'au 8e étage pour rencontrer quelques militants qui s'affairent à collecter les chiffres. Une dizaine de personnes sont mobilisées pour recueillir les premiers résultats auprès de leurs représentants à travers le territoire national. Un écran, branché sur la chaîne nationale, permet de suivre les programmes consacrés aux élections. Les membres du bureau politique sont réunis pour faire une évaluation du déroulement du scrutin et des élections qui revêtent, selon eux, un cachet particulier. Nouara Djaâfar, ministre délégué chargée de la Famille, estime que les candidats du RND ont quelque peu failli ; il fallait, d'après elle, occuper plus le terrain et faire du tapage à l'instar de l'Alliance verte et du Parti des travailleurs. «Je crains que l'on perde la bataille au niveau d'Alger face à Louisa Hanoune et à Amar Ghoul qui ont investi depuis le début de la campagne, nous avons peu de chances», avoue-t-elle. Mme Djaâfar qui fait aussi part de ses inquiétudes quant à la liste de Sétif : «J'aurais aimé qu'Ouyahia s'implique et donne son avis, mais ça n'a pas été le cas. Il a donné le feu vert au coordinateur pour la confection des listes. C'était là une erreur.» Au bureau de wilaya on fait et défait les alliances. «Si l'on n'obtient pas la deuxième position, nous contractons des alliances avec les partis nationaliste et démocrate, notamment le FFS et le PT», espérent certains militants. 23h. Les téléphones n'ont pas arrêté de sonner. L'ambiance est plutôt pesante. Tout le monde est fin prêt, espérant du fond du cœur un miracle ; ils espèrent la victoire des nationalistes contre les islamistes. Fouzia, candidate, considère que le parti a une bonne base dans toutes les communes, voire tous les quartiers. Le parti compte remporter entre 45 et 50 sièges à la prochaine Assemblée. Le parti fait apparemment mieux, il remporte 68 sièges. Hier, à l'annonce des résultats, le chargé de communication du RND, Belkacem Mellah, a affirmé que les résultats du scrutin «reflètent une grande victoire de l'Algérie et constituent la meilleure réponse aux partisans du boycott».