Il est symptomatique que pour désigner certaines langues, on ait recours aux hommes de théâtre et non aux écrivains. Ainsi, de l'anglais, dite langue de Shakespeare, et du français, dite langue de Molière. Comme si l'oralité l'emportait sur l'écrit parce que la langue est dans la bouche. Du fait de l'histoire coloniale, nous n'avons pas eu, en Algérie, de grandes accointances avec William Shakespeare. Aux origines du théâtre algérien, c'est vers Molière que se sont tournés les pionniers algériens du quatrième art, Allalou, Mahieddine Bachetarzi et d'autres encore, lesquels, en adaptant les pièces du grand dramaturge français, ont transposé les critiques de cet auteur dans l'univers colonial, exactement de la même façon que leurs pairs anglophones du continent avec Shakespeare. On peut regretter que le répertoire universel classique (mais Shakespeare et Molière le sont-ils vraiment ?) ne semble pas intéresser de nos jours nos dramaturges, autant pour des adaptations que des interprétations. On peut regretter aussi que Shakespeare n'ait pas suscité plus d'intérêt dans ce sens. L'enseignement de l'anglais apparaissant si basique dans notre pays, l'idée semble relever de la chimère. Sinon, nous avions souligné dans ces colonnes, l'adaptation, en 2007, de Hamlet par une troupe de Tindouf, «Ennoussour». C'est dans cette ville aussi, où l'on semble aimer le grand théâtre, qu'à la même période, la troupe «El Melka» adaptait En attendant Godot de Samuel Beckett. Depuis, plus de nouvelle de Shakespeare en Algérie. Quoi d'autre ? Oui, la tour Shakespeare à El Mouradia, Alger. Mais qui sait encore que ce bel ouvrage d'architecture moderne se nomme ainsi ? Le British Concil d'Alger s'en inquiète-t-il ?