Le théâtre algérien a connu de très belles adaptations de pièces de théâtre universel qui furent de mémorables spectacles pour ceux qui ont eu la chance d'y assister. Déjà dans les années 1940, les planches recevaient entre autres Hamlet, Othello de Shakespeare, Topaze de Pagnol, Don Juan de Molière. Les représentations étaient assurées en langue dialectale pour les rendre accessibles à tous les Algériens. Mahieddine Bachetarzi est l'un des hommes de théâtre qui a su capter l'attention des amoureux des adaptations grâce à El Mech'hah, El Moujrim, Slimane Ellouk tirées consécutivement de l'Avare, Tartuffe et Le malade imaginaire. Les œuvres de Gogol, Gorki, Maïakovski et Molière ont été également agréablement revisitées par Abdelkader Alloula à travers El Ghoula, El Tadalis et d'autres. Alloula s'est beaucoup inspiré du patrimoine universel avant d'écrire ses propres pièces. C'est la 9e réalisation e Khaled Belhadj «Sayed Errojala» aime l'humanité entière et déteste el hagra. Il a décidé de se battre pour que la Terre soit à jamais débarrassée de l'injustice et des méchants. Pour mener à bien cette mission, dont il se sent investi, il compte sur le sympathique «Trano». Ce dernier a accepté de l'accompagner dans sa quête par dévouement mais aussi pour profiter d'un fabuleux trésor censé les récompensés. Sayed Errojala est l'intitulé de la pièce récemment adaptée dans la langue du théâtre et réalisée par Khaled Belhadj. Présentée par la troupe El Belliri de Constantine, la pièce est tirée du roman de Cervantès, Don Quichotte de la mancha. C'est la 9e réalisation de Khaled Belhadj avec cette troupe qui compte de nombreux prix d'interprétation et de réalisation. Comme Don Quichotte, «Sayed Errojala», interprété par Wahid Achour, passe auprès des autres pour quelqu'un d'étrange près de la folie. Il est sans doute fou ce chevalier algérien des temps modernes qui quitte son village pour aller combattre et rendre justice aux faibles et aux plus pauvres. Son compère Hamoudi Hamza alias Trano, le Sancho Pança, très présent sur scène, donne lui aussi de la voix tout en veillant sur «Sayed Errojala». Sur les planches, Wahid Achour raconte très bien cette folie empreinte d'un idéalisme. Sa belle interprétation de Sayed Errojala vous capte et vous transporte à ses côtés le long de ses aventures. Sur scène, il est agréable de l'écouter et l'envie qui vous tarabuste c'est d'aller guerroyer avec lui contre ces méchants, «bouffeurs» de sueurs des plus faibles. Très heureux d'avoir été choisi pour jouer le personnage de «Sayed Errojala», Wahid Achour estime que c'est un rôle de composition très complexe, car basé sur une multitude de thèmes. Du côté de Sayed Errojala, les malfaisants sont ceux qui mettent en prison des innocents, les patrons qui exploitent les travailleurs et les moulins à vent à lui se transforment en usines de ciment. Dans son entreprise, il se bat également pour sauver et dissuader les Haragas de remettre leur vie entre les mains de leur embarcation et suivre l'illusion d'un avenir meilleur loin de leur pays. A l'instar des dialogues et des monologues, la pièce regroupe chants, danse, musique et narration dans un esprit souvent burlesque. La générale de la pièce, donnée au TNA, est le point de départ d'une tournée programmée à Béjaïa, Oran et Constantine. S'il est vrai que la pièce semble un peu décousue, le jeu un peu hésitant, elle reste cependant agréable à découvrir, car au fil de la trame, elle vous garde en haleine à la recherche de la fin de l'intrigue. Dans ce contexte, Khaled Belhadj considère que cette représentation donnée en présence de gens du métier est une manière d'évaluer ce travail et d'apporter les rectificatifs nécessaires. La tournée et la présence du public participeront aussi à l'amélioration du jeu. On n'en doute pas, surtout que cette troupe nous a habitués au meilleur.