Pour les trois premiers mois de 2012, le nombre de touristes ayant séjourné en Tunisie a augmenté de 57%. Tunis De notre envoyée spéciale Tunis, an II de la révolution. Cette année semble plus prometteuse en matière d'affluence de touristes que l'année dernière. Les artères de la ville sont empruntées à toute heure par les bus de transport touristique. Dès l'apparition des premiers rayons de soleil, Tunis et les villes voisines sont redevenues les destinations préférées des Européens, en quête de repos, de cure, de bien-être et de dépaysement. Des groupes d'étrangers -des Russes et des Français, en grande partie- sillonnent la ville et prennent des photos. Mais ce sont les voisins algériens qui sont attendus en masse, après une timide affluence enregistrée l'été dernier. A Tunis, tout le monde a repris ses habitudes et vaque à ses occupations. Les «morceaux» de barbelés encore posés sur plusieurs parties du boulevard Bourguiba, au cœur de la capitale, racontent, à leur façon, la révolution tunisienne qui à est l'origine de la reconfiguration politique dans la région. Ces fils illustrent pour les passants d'un jour la férocité du combat. Les Tunisiens ont affronté la violence de l'ancien régime, mais les jeunes préfèrent offrir aujourd'hui du jasmin et de l'eau de fleur d'oranger ou de rose aux étrangers. «T'harrerna», (nous nous sommes libérés), disent fièrement quelques jeunes, qui racontent dans les moindres détails comment ils ont pu se transformer en meneurs de foules. «J'étais simple fonctionnaire qui ne pouvais même pas protester contre les conditions de travail imposées par mon supérieur», tient à préciser Salah, ingénieur agronome, âgé d'une quarantaine d'années, travaillant dans le secteur public. «Tout cela fait partie d'une étape qui est déjà passée. Ben Ali et les siens sont dans la poubelle de l'histoire, maintenant, il faut continuer à construire et à barrer la route à ceux qui veulent un retour en arrière...» C'est la même phrase recueillie auprès des Tunisois. Ennahda ne semble pas faire peur. «Ce parti n'existe qu'à la télévision. Il faut bien que les gens fassent de la politique !», avance Mohammed, habitant le boulevard Mohamed V, au centre de Tunis. Ce jeune homme d'une trentaine d'années exerce comme commerçant depuis quelques mois. «Nous sommes là pour stopper quiconque pouvant nous faire revenir en arrière. Les libertés individuelles, celles des femmes et surtout notre tourisme sont des lignes rouges que personne n'a le droit de piétiner.» Sur les banderoles, visibles le long du boulevard Bourguiba, situé au cœur de la capitale et ayant abrité le 1er mai plusieurs manifestations pacifiques, on peut lire clairement : «Notre patrimoine, c'est notre richesse.» Des affiches de films, de spectacles font la promotion des derniers produits. Les salles de cinéma et de spectacles continuent d'attirer les foules la nuit. La méchante de Carthage La révolution est désormais partie prenante du patrimoine que les Tunisiens montrent fièrement aux étrangers. D'ailleurs, c'est avec ce sentiment du devoir accompli que sont montrés les édifices et terrains accaparés par Ben Ali et les Trabelsi et que les Tunisiens ont su se réapproprier. L'ex-régente de Carthage demeure dans les discussions, mais cette fois-ci pour dire que «son école», la prestigieuse structure érigée sur un terrain public que l'ex-Première dame a accaparé pendant des décennies est aujourd'hui re-nationalisée. Dans la banlieue de Sidi Boussaïd, on montre les palais, les terrains et les édifices détournés par l'ex-dictateur et les siens. Les étrangers se montrent particulièrement intéressés, histoire de connaître l'exploit du peuple tunisien. Un palais présidentiel, dont les rues avoisinantes étaient jadis fermées au public, est une des «curiosités à découvrir». Aujourd'hui, des voitures et des bus touristiques font le détour pour permettre aux curieux de contempler cette perle architecturale. Même sort pour la fameuse mosquée baptisée du nom du dictateur déchu, El Abidine. La belle structure est immortalisée dans les clichés des passants. Sur la carte indiquant l'historique de la mosquée, le nom de Ben Ali est tout simplement effacé. La vieille ville de Sidi Boussaïd demeure un des points essentiels d'une visite à Tunis avec ses demeures anciennes, parfaitement sauvegardées et régulièrement restaurées et ses terrasses animées. Une balade jusqu'au front de mer semble inévitable pour les visiteurs en quête d'un moment de tranquillité. Les ruelles de cette ancienne ville construite par les «Maures» venant d'Andalousie sont devenues, au fil du temps, un musée à ciel ouvert. Les artisans exposent et vendent des objets locaux sculptés et décorés à acheter en guise de souvenir. Les touristes s'arrachent ces bijoux locaux. Cette localité regorge aussi d'hôtels et de restaurants aux couleurs locales et aux saveurs multiples. Avec ses origines carthaginoises, puis romaines, Sidi Boussaïd a plus d'un pan d'histoire à montrer : vacation militaire, puis «soufiste» et artistique. C'est un délice que de se pencher sur les différentes civilisations ayant laissé leurs traces dans cette ville classée patrimoine mondial. Avec leur bleu et blanc impeccablement entretenu, les constructions bourgeoises de la ville offrent aujourd'hui un espace de balade. Entre les maisons, musées, sites et autres mausolées et les terrasses aménagées, les touristes arpentent les ruelles et savourent une tranquillité qui manque ailleurs sous le soleil qui se fait déjà ardent en ce début du mois de mai. La Souika reste un lieu favori pour l'acquisition d'un objet immortalisant le passage par cette ville. Les hôtels affichent presque complet Hammamet Yasmine est une étape à ne pas rater. On ne peut visiter la Tunisie sans passer par Hammamet, qui offre plusieurs styles d'hôtels. Hammamet dispose de 46 hôtels, soit 19 000 lits, dont 80% en 5 et 4 étoiles et 2000 unités résidentielles, d'une capacité de 11 000 lits, en appartements, villas et bungalows. «Les prix sont très attractifs, comparés à ceux pratiqués dans d'autres pays», commente une dame résidant à l'hôtel Royal de cette même localité. «En plus, vous avez le choix entre un site classique et une résidence qui vous plonge dans un dépaysement total», ajoute-t-elle. Des groupes de touristes, des Russes en grande partie, s'acquittent des modalités d'enregistrement. Des enfants courent dans la réception de cet hôtel de luxe à la décoration des mille et une nuits. Selon le représentant à Alger de l'Office national tunisien de tourisme (ONTT), Faouzi Basley, les hôtels affichent déjà, en moyenne, 60% d'occupation. «En nette augmentation par rapport à la même période de 2011», souligne-t-il. La médina de Hammamet reproduit la vie locale dans tous ses aspects : architecture, rites, artisanat. Des musées offrent un cours d'histoire à ceux qui ignorent l'origine et le développement de cette ville antique. Un fort prestigieux, le fort de Hammamet, est quotidiennement pris d'assaut par les touristes ,qui immortalisent leur passage par des photos. Des guides expliquent comment cette bâtisse construite par les Aghlabides était la forteresse protectrice de la ville. Des canons et les postes de garde sont impeccablement conservés. Aujourd'hui, après une visite guidée, les touristes peuvent siroter un thé ou prendre des mets traditionnels dans l'une des pièces de ce fort aménagé qui joignent plaisir et curiosité. Quant à la Marina, elle reste un des endroits les plus visités par les touristes. Un port de plaisance, des bateaux pirates, des restaurants, des terrains de golf et des centres commerciaux, bref, de quoi charmer les plus exigeants, avides de dépaysement et de rayons de soleil. D'ailleurs, des groupes de touristes profitent des premières chaleurs annonciatrices de l'été. Des restaurants redoublent d'ingéniosité en matière de décoration et de menus pour tenir en concurrence. Des formules spécial ramadhan Pour la saison estivale, les tour-opérateurs ont décidé d'adapter leurs formules aux attentes de leurs potentiels clients. Des promotions, «surtout pour nos frères algériens», indique un gérant d'hôtel situé à Hammamet, sont prévues pour la saison estivale. Il est conseillé de recourir à une agence pour organiser son voyage, afin d'obtenir des promotions, indique-t-on également. «Les agences négocient mieux des remises et des promotions, beaucoup plus qu'à titre individuel», soutient une employée du service commercial d'un hôtel de Tunis. Les Algériens, qui sont ciblés particulièrement par les études du marché, auront donc des formules adaptées pour le mois de Ramadhan. 50 000 Algériens se sont rendus dans le territoire tunisien durant le mois de Ramadhan de 2011. L'Office national de tourisme tunisien prévoit 850 000 touristes algériens pour la saison estivale. Ils n'étaient que 700 000 à avoir visité la Tunisie en 2011. Les chiffres reprennent leur tendance haussière, selon Faouzi Basley. Les indices sont en amélioration, selon les chiffres communiqués par le même organisme. Pour les trois premiers mois de 2012, le nombre des touristes ayant séjourné en Tunisie a augmenté de 57%. Ce qui a contribué à la hausse de 37% des recettes du secteur, en comparaison avec les chiffres retenus durant la même période de 2011. L'ONTT prévoit six millions de touristes pour cette année.