A quelques jours de la tenue du sommet de la Terre, Rio+20, prévu au Brésil du 15 au 23 juin, l'épineuse question de la lutte contre la préservation des terres interpelle à nouveau la communauté internationale. Lors d'un atelier régional sur le rôle des médias dans la lutte contre la dégradation des terres, qui a regroupé une quinzaine de journalistes venus d'une dizaine de pays d'Afrique francophone, le secrétaire exécutif de la Convention des Nations unies pour la lutte contre la désertification et la sécheresse, Luc Gnacadja, ainsi que d'autres experts en la matière ont dressé un constat alarmant sur l'accélération de la dégradation des terres fertiles alors que les défis en matière de sécurité alimentaire ne font que s'accentuer à moyen et long termes. Il suffit de savoir à cet égard que chaque année quelque 12 millions d'hectares de terres productives sont perdus dans le monde, soit un équivalent de production de 20 millions de tonnes de céréales, estime le représentant de la convention onusienne dans sa déclaration d'Alger. Pourtant, à l'horizon 2050, les besoins alimentaires devront connaître une croissance de l'ordre de 50% et la population mondiale à la même échéance augmentera de 2 milliards d'habitants, en passant de 7 à 9 milliards. L'Afrique à elle seule enregistrera 50% de cette croissance de la population mondiale. C'est justement ce continent qui est exposé à toutes sortes de vulnérabilités, naturelles, climatiques, économiques, sociales et autres. Pourtant, estime le représentant de la CNULCD, le continent noir a «toutes les potentialités pour être le moteur de développement durable à l'horizon 2030», en rappelant que même lors de la crise de l'économie mondiale post 2008, l'Afrique a continué à enregistrer une croissance globale de l'ordre de 5% alors que bien des économies industrialisées ont embrassé des phases de récession. Il suffit alors de mobiliser les potentialités existantes et d'optimiser les facteurs de production. Sur ce plan, une série d'objectifs est arrêtée par la Convention des Nations unies. En matière de protection des terres, il s'agit en premier lieu d'atteindre le taux net 0% dégradation à l'horizon 2030. En d'autres termes, faire en sorte que le taux de terres dégradées ne dépasse pas et conjuguer les efforts pour qu'il soit inférieur au taux des terres restaurées. Les défis, en tout cas, ne sont pas moindres à ce niveau et pour atteindre les objectifs tracés, d'importants efforts doivent être déployés. En effet, il est question d'abord de faire face au spectre de la pauvreté dont la menace reste grande, notamment dans les pays africains. Pour réduire l'ampleur de la pauvreté, il y a nécessité de mettre l'accent sur le développement des territoires ruraux pour renverser la tendance actuelle qui fait ressortir que 80% des populations pauvres se concentrent dans l'espace rural à l'échelle mondiale. En termes de ressources en sols, les besoins alimentaires à l'horizon 2030 nécessitent la mobilisation de 120 millions d'hectares supplémentaires. En matière de ressources hydriques, à la même échéance, il faudra mobiliser 40% de volume d'eaux agricoles. Pour l'Afrique, les risques de sombrer davantage dans le cycle des fragilités ne sont pas écartés, car, selon M. Gnacadja, le continent risque de perdre deux tiers de ses terres arables à l'horizon 2025 si la tendance de dégradation actuelle de dégradation de terres se poursuit. Dans l'ensemble, il s'agit alors de mettre en œuvre des politiques intégrées de développement rural dont l'objectif est triple : assurer la sécurité alimentaire aux populations locales, garantir l'accès à l'eau et l'énergie et, enfin, faire face au changement climatique. Qu'en est-il des réponses sur le terrain en Afrique concernant les objectifs escomptés ? La réponse à cette question vient de Boubacar Cisse, responsable de l'unité de coordination pour l'Afrique de la CNULCD, qui, de prime abord, plaide en faveur d'une approche participative dans l'élaboration des politiques de développement local. Concernant la lutte contre la pauvreté, pour ce dernier, les résultats enregistrés en Afrique jusque-là sont loin d'être satisfaisants, puisque le taux de 51% atteint en 1990 n'a régressé que de 11 points en 15 ans, en s'établissant à 40% en 2005. Toutefois, il relèvera quelques expériences qui ont réussi à travers certains pays africains dans le domaine de développement et de la lutte contre la pauvreté. L'expérience de l'Algérie en matière de politique de développement rural intégrée est présentée comme un modèle à suivre dans le continent. Par ailleurs, à première vue, certes la politique de renouveau rural ne laisse pas indifférent à la constatation des cas de réussite enregistrés dans certaines localités du pays, mais faudra-t-il se pencher sur le coût de ces programmes sous forme de dépenses publiques et de là se pose la question de savoir combien sont-ils les pays africains ayant la capacité de mobiliser des budgets aussi faramineux s'élevant à plusieurs millions, voire milliards de dollars.