Le ministère de l'Education nationale a fait, hier, machine arrière concernant la décision prise la semaine dernière suivie d'effet de fermer les écoles privées dépourvues d'agrément. Ainsi, ce sont plus d'une quarantaine d'établissements scolaires qui se sont vu intimer l'ordre de fermer leurs portes, dans certains cas manu militari, sur intervention des forces de l'ordre. La décision avait provoqué un tollé auprès des parents d'élèves et des responsables des établissements concernés qui ont invoqué un argument imparable pour dénoncer le caractère intempestif et arbitraire de cette mesure qui intervient au milieu de l'année scolaire, à quelques mois des examens de fin d'année. Les assurances données par le ministère de l'Education pour prendre en charge tous les élèves dont les écoles furent fermées n'ont pas réussi à rasséréner les parents d'élèves qui ont vécu une semaine d'enfer en quête d'une hypothétique place pour leurs progénitures au niveau aussi bien des écoles publiques que privées qui ne pouvaient pas faire face à un tel afflux de candidatures au milieu de l'année scolaire. Benbouzid ignorait-il à ce point la surpopulation qui caractérise nos établissements scolaires, surtout ceux relevant du public, pour prendre l'engagement solennel de recaser tous les élèves qui se sont retrouvés sur le carreau suite à la fermeture de leurs écoles ? Le moratoire décidé hier par le ministre de l'Education accordant un sursis jusqu'au mois de juin prochain aux établissements non conformes à la loi pour leur mise à niveau est une décision sage autant qu'elle renseigne sur l'improvisation et le manque de sérieux et de rigueur avec lesquels sont gérées les affaires de l'Etat. On n'a pas le droit de jouer impunément à pile ou face avec l'avenir de nos enfants ! Si les pouvoirs sont convaincus de la justesse de leur action, pourquoi alors avoir attendu que l'année scolaire soit largement entamée pour sévir et n'avoir pas eu le courage de le faire au début de l'année scolaire ? Entre l'ordre et le contre-ordre de Benbouzid, les élèves ont perdu une semaine de cours avec à la clé des séquelles psychologiques et un sentiment de doute qui les habite désormais quant à l'avenir de leur scolarité. Ce n'est pas la première fois que l'on assiste à une pirouette de ce genre de la part des pouvoirs publics qui ne semblent pas mesurer les conséquences de leurs actes en agissant avec autoritarisme même dans des situations extrêmement sensibles qui exigent sérénité et sens aigu de responsabilité. La polémique Que s'est-il donc passé pour que le ministre de l'Education se rétractât ainsi sans sourciller en alternant les gestes de fermeté et d'apaisement ? Les pouvoirs publics ont-ils reculé parce que convaincus, après coup, que la décision prise de fermer les écoles privées non conformes au milieu de l'année scolaire avait créé plus de problèmes qu'elle n'en avait réglé ? La polémique suscitée par ce dossier en Algérie, voire même au-delà de nos frontières, en France où les médias n'ont pas hésité à voir dans la décision du ministère de l'Education une volonté de l'Etat algérien de tordre le cou à la langue française en sévissant contre les établissements privés perçus outre-mer comme les derniers centres de rayonnement de la langue française qui restent dans le pays, y est-elle pour quelque chose dans le revirement du ministère de l'Education ? Les mauvaises langues croient savoir pour leur part qu'il n'y a là à voir ni acte de repentance de la part de Benbouzid ni une quelconque concession faite à la France mais bien plus une décision dictée par des considérations très terre à terre ; le ministre de l'Education a décidé de geler sa décision jusqu'au mois de juin parce que tout simplement dit-on des enfants de hauts dignitaires du système étaient touchés par la mesure. On susurre même que les écoles privées dans lesquelles sont inscrits ces enfants ont échappé curieusement aux représailles de Benbouzid même celles d'entre elles qui ne disposaient pourtant pas d'agrément. Après une expérience de plusieurs années, nul ne peut aujourd'hui contester que le temps est arrivé de mettre de l'ordre dans ce secteur livré à lui-même et donc à l'anarchie. N'a-t-on pas vu des villas dépourvues des commodités et équipements les plus élémentaires transformées en établissements scolaires ? Des programmes scolaires échappent dans certains cas à tout contrôle pédagogique, voire varient parfois d'une école privée à une autre. Il s'en trouve même des écoles privées qui fonctionnent tout en le revendiquant haut et fort comme des écoles étrangères sans en avoir le statut. Parce que le dossier est stratégique car touchant à l'avenir des générations montantes, le débat sur l'école privée gagnerait à être dépassionné et « désidéologisé » pour faire l'économie de décisions irréfléchies et préjudiciables pour la stabilité et la performance du système éducatif comme celles qui ont défrayé la chronique scolaire ces derniers jours.