Les deux tiennent le coup à la prison Serkadji », dit Mohamed Fardjellah, rédacteur en chef de l'hebdomadaire Essafir dont le directeur de publication, Berkane Bouderbala, 33 ans, croupit en prison depuis sa mise sous mandat de dépôt, c'est-à-dire le 8 février dernier, pour avoir reproduit des caricatures du Prophète Mohamed dans le supplément Errissala. Kamal Boussaâd, la trentaine, directeur de publication de l'hebdomadaire Panorama, a également été arrêté le 11 février pour avoir publié ces dessins sur un des suppléments de son hebdo, Iqraa. La plainte émanait du ministère de la Communication avec pour argument l'article 144 bis alinéa 2 du code pénal qui prévoit une peine d'emprisonnement pour « toute personne qui offense le Prophète et les Envoyés de Dieu ou dénigre le dogme ou les préceptes de l'Islam ». « Les tortures d'Abou Ghraieb n'auraient jamais été dénoncées si les images n'avaient pas été publiées », avait indiqué Fardjellah le 11 février. L'Association des oulémas musulmans algériens a prononcé une fetwa en faveur de la libération des deux journalistes arguant qu'ils n'étaient pas animés d'une mauvaise foi. La Fédération internationale des journalistes (FIJ) a dénoncé l'arrestation des deux confrères et Reporters sans frontières (RSF) a parlé d'une mesure « absurde et dangereuse ». Le Comité Benchicou pour les libertés a, pour sa part, évoqué le « harcèlement obsessionnel » dont font les frais les journalistes. Le ministre des Affaires religieuses, Bouabdellah Ghlamallah, a espéré que « la justice sera clémente avec les deux journalistes » Le président de la Commission nationale consultative pour la promotion et la protection des droits de l'homme (CNCPPDH), Farouk Ksentini, a rappelé son opposition à l'emprisonnement de journalistes. « La justice a rejeté la demande de libération provisoire introduite par les avocats de Kamal et de Berkane », nous a déclaré hier Fardjellah. « Ce que nous demandons est qu'ils soient jugés puisque l'instruction a été close », a-t-il ajouté. Parallèlement, les deux hebdomadaires Essafir et Panorama ont été suspendus pour motif d'impayés auprès de deux sociétés étatiques d'impression, respectivement la Simpral et la SIA. On apprendra également qu'un autre hebdomadaire arabophone, Al Mawqif, a été suspendu au bout de son deuxième numéro pour des motifs inconnus.