Dans la partie réservée aux médias, le rapport final de la mission d'observation électorale de l'Union européenne (MOE) pour les élections législatives du 10 mai 2012 plante un paysage médiatique dominé par le monopole de l'Etat sur les médias lourds, radio, télévision et une presse écrite libre, mais rencontrant des problèmes. Dans le document rendu public hier, il est indiqué que «le secteur de la presse algérienne a connu une progressive diversification à partir de 1989, avec la vie du monopole étatique et la conséquente création d'un certain nombre de journaux privés». «L'audiovisuel est encore entièrement contrôlé par l'Etat même si une nouvelle loi sur l'information, qui libéralise le marché de l'audiovisuel, vient d'être approuvée», indique la même source. Selon elle, «l'horizon temporel pour l'application de cette nouvelle législation est allé au-delà de la date prévue pour la tenue des élections des députés». «Par conséquent, à la veille des consultations législatives, pense-t-elle, le paysage médiatique algérien a été caractérisé par un contraste évident entre une presse écrite diversifiée, abondante et partiellement libre et une presse audiovisuelle toujours soumise au monopole étatique.» La mission d'observation électorale européenne constate, par ailleurs, que «le pays compte plus de 80 publications en langue française, arabe et kabyle». Et de rapporter que de nouvelles chaînes privées ont été créées en 2012, mais pour l'instant étant basées en Jordanie, elles restent des sujets de droit étranger, tout en ciblant les actualités et le public algériens. Parmi ces chaînes, il y a Echourouk TV et Ennahar TV, deux déclinaisons audiovisuelles des quotidiens arabophones éponymes, autant que El Djazaïria. Selon le rapport, «le ministère de la Communication a révélé qu'il ne peut pas intervenir face à la profusion de télévisions privées à cause d'un vide juridique, mais les responsables du ministère ont déclaré que la loi relative à l'audiovisuel règlera cette lacune». Que pense la mission de la liberté de la presse en Algérie ? «La Constitution algérienne garantit, selon elle, la liberté d'opinion et d'expression autant que la liberté d'innovation intellectuelle, artistique et scientifique, mais malgré une relative ouverture du secteur médiatique, la presse est encore soumise à plusieurs limitations.» «Bien qu'il n'existe officiellement aucune loi qui concerne la censure, la législation algérienne établit encore des sanctions particulièrement sévères contre la diffamation et les outrages contre les institutions gouvernementales», affirme le rapport. Conclusion : «Afin d'éviter des répercussions légales, les médias pratiquent souvent un certain niveau d'autocensure.» Dysfonctionnements Selon la mission d'observation européenne, «les autorités algériennes conservent un monopole sur l'impression et la diffusion de la presse». «Même si les quotidiens privés El Khabar et El Watan ont fondé une société indépendante d'impression, soutient la même source, la plupart des journaux sont imprimés dans les imprimeries nationales.» Le rapport n'a pas manqué de mettre en relief «le monopole sur la publicité du gouvernement algérien qui représente un outil économique pour limiter ou sanctionner la presse privée qui se montre trop critique envers le pouvoir». Plusieurs interlocuteurs ont affirmé à la mission européenne que l'Agence nationale d'édition et de publicité (ANEP) distribue «la publicité à des administrations et des entreprises publiques sur la base du degré de complaisance des journaux envers le pouvoir et de leur ligne éditoriale». Après avoir fait ce constat de la situation des médias en Algérie, le rapport de la mission d'observation fait état de certains manquements et dysfonctionnements dans la couverture de la campagne pour les législatives du 10 mai dernier. «Malgré l'équilibre observé en règle générale dans l'audiovisuel, l'application de la réglementation concernant le principe d'équité reposait sur des critères de couverture trop rigides», indique la même source qui précise que «les formats proposés ont gêné, soit le développement d'un véritable débat entre les différentes options politiques, soit la possibilité pour les journalistes de discuter et articuler les propositions de campagne». La mission européenne note que «les thèmes relatifs au boycott des élections et à l'abstention n'ont reçu aucune véritable couverture dans les médias publics». Par ailleurs, «pendant les trois jours de silence électoral que la loi impose, la MOE a relevé plusieurs dépassements concernant la couverture de la campagne. En particulier, les médias privés ont continué à se concentrer sur la campagne des partis politiques, en violation de la réglementation existante. Les violations ont concerné la couverture des activités des candidats et la publication de publicité».