Une centaine de poches de sang dans les culots globulaires, des plaquettes et du plasma sont livrés par jour par le CTS. La problématique de la sécurité transfusionnelle est loin d'être maîtrisée, sont unanimes à dire les médecins hématologues et les spécialistes de la transfusion sanguine. «Il s'agit d'un combat de tous les jours», nous dit le Pr Nekkal, chef d'unité du centre de transfusion sanguine à l'hôpital de Beni Messous. Réputé pour son camion mobile, Aâmi Ahmed sillonne les grands quartiers de la capitale, et son point de prédilection : la mosquée de Aïn Benian. Cette structure accueille des donneurs dans les conditions et les normes les plus strictes. Un accueil sympathique est réservé aux donneurs, une devise développée par l'équipe du centre pour assurer leur fidélisation. K. L. et S. M. sont venus donner leur sang pour un parent malade qui est programmé pour une intervention chirurgicale. «L'accueil et la propreté des lieux nous encouragent à revenir donner notre sang pour tous ceux qui ont en besoin. C'est encourageant», nous confient-ils. Un silence religieux règne dans les salles où des équipes sont à pied d'œuvre et où le sang est systématiquement séparé avant d'être contrôlé. Selon le Pr Nekkal, le centre collecte 150 000 dons par an, dont 60% par le camion (les volontaires) et 40% intra-muros, dont les dons familiaux. Le camion collecte à lui seul 8000 dons par an où seulement deux personnes assurent les opérations de collecte. Une activité intense est réalisée au sein de ce CTS. Une fois les prélèvements de sang effectués, l'équipe s'apprête à séparer le sang et préparer les dérivés sanguins, à savoir les culots globulaires, les plaquettes et le plasma frais congelés (PRC). Les contrôles et la recherche des virus HIV, hépatites B et C sont lancés au fur et à mesure. Les poches sont tout de suite livrées à l'hôpital de jour d'hématologie pour les différents services du CHU, d'une part, et aux diverses structures hospitalières et privées, d'autre part. «Nous réalisons même des prélèvements de cytaphérèse (extraction de cellules sanguines). Actuellement, nous sommes à 40% de la séparation de sang pour fabriquer des plaquettes et du plasma frais congelé (PFC). La demande se fait de plus en plus importante, vu l'augmentation du nombre de malades. Au niveau de notre structure et du service d'hématologie, il y a une forte demande et en qualité particulière notamment pour thalassémiques. Les autres services de l'hôpital tels que la gynécologie obstétrique, le service de chirurgie, la réanimation et l'oncologie sont également des utilisateurs potentiels», précise le Pr Nekkal et de préciser qu'un seul don de plaquettes prélevées par cytaphérèse remplace environ 10 dons de sang total. Le prélèvement dure plus longtemps, environ 2 heures. Lors de notre virée, 40 poches de plaquettes (6 unités par malade) ont été distribuées en l'espace de deux heures, entre l'hôpital du jour où 200 enfants sont pris en charge et les autres services. A l'hôpital du jour, où près d'une dizaine de malades sans sous transfusion, dont des adultes, l'infirmier semble être dépassé. «Il y a ceux qui sont déjà partis. Parmi ceux-là, il y a des thalassémiques», nous confie-t-il. Le Pr Nekkal signale qu'entre cette unité qui assure 20 transfusions par jour et le service d'hématologie, un malade nécessite une moyenne de 18 donneurs pour un traitement d'une semaine à raison d'une poche de plaquettes durant trois jours. «D'autres ont par contre besoin de trois poches de plaquettes trois fois par jour», a-t-il indiqué en précisant que le sang total n'est plus livré. A propos de pertes ou du «gaspillage» de ce liquide rare dans certains services dans les hôpitaux, le Pr Nekkal estime que le phénomène se fait de plus en plus rare. «Chez nous, les poches de sang ne sortent que pour être utilisées. Outre l'unité du jour et le service d'hématologie où l'activité est importante, les autres services de l'hôpital ne demandent du sang que lorsqu'ils en ont réellement besoin. D'ailleurs, nous constatons une réduction de 70% des demandes de la part des gynécologues et des chirurgiens. Mais un problème se pose effectivement pour les enfants, et l'idéal est d'avoir des poches à usage pédiatrique. Pour ce qui est des poches non utilisées, nous refusons de les restituer ne sachant pas dans quelles conditions elles ont été conservées, notamment le respect de la chaîne de froid, surtout que la durée de vie est limitée à 35 jours pour les culots globulaires et 5 jours pour les plaquettes, après préparation qui doit être maintenue sous agitation», a souligné le chef de service du CTS et d'appeler à la coordination et à la collaboration entre tous les CTS pour répondre à la demande en produits sanguins et assurer une meilleure utilisation. Le Pr Meriem Belhani, chef du service d'hématologie, estime que la problématique revient à l'indication de la transfusion sanguine. «Il y a des moments où l'indication de la transfusion est mal posée. Il y a quelques années, la demande en sang se faisait comme si l'on commandait du papier et des stylos. Cela montre bien la flagrante méconnaissance de la part du personnel médical et du paramédical en matière de la transfusion et la sécurité transfusionnelles. Ce n'est pas une tâche facile. Au niveau de notre centre, nous avons établi des normes et tout se passe bien», a-t-elle précisé en insistant sur l'intégration de l'hémovigilance.