Alger s'anime au rythme de ses habitants. Si les longues journées de jeûne font des rues de la capitale des lieux sans mouvements, ses nuits connaissent une animation joyeuse. Les Algérois n'ont pas connu «une telle animation depuis des décennies.» Les fortes chaleurs des journées ramadhanesques, rendant encore plus dur le jeûne, contraignent les gens à réduire au maximum leurs mouvements. Les soirées, par contre, transforment cette même ville en une cité qui vit. La programmation de soirées musicales ou culturelles dans plusieurs établissements de la capitale reste une aubaine pour les familles pour se reposer et profiter de l'ambiance «exceptionnelle» qui s'offre à eux. Le reste de l'année, les spectacles sont plutôt rares en soirée. Les commerçants, qui baissent rideau à partir de 18 heures pour des raisons de sécurité, contribuent, eux aussi, à faire d'Alger une ville «qui dort tôt» toute l'année et qui a envie de veiller un peu durant le mois de Ramadhan. La mise en circulation du tramway y contribue, même à une heure tardive de la nuit. Une «bénédiction» pour les habitants de la banlieue est de la capitale, qui sont confrontés à moins de tracas pour les déplacements nocturnes qui sont devenus en cette dernière dizaine du Ramadhan inévitables pour faire les achats nécessaires de l'Aïd. Mais les coupures de courant électrique réduisent parfois à néant les projets de sortie de nombreuses familles. En effet, les «pannes» de courant récurrentes qui touchent plusieurs quartiers de la capitale paralysent tout «ce réseau moderne» de transport urbain. Les conséquences : un vent de panique s'empare des familles qui se trouvent «coincées» à l'extérieur. Plusieurs rames du tramway sont à l'arrêt depuis la «longue» coupure survenue le week-end dernier. Ces rames n'ont pas fonctionné après le rétablissement du courant pour plusieurs arrêts, apprend-on auprès des contrôleurs. Comme nous l'avons constaté, le tramway s'arrête, ces jours-ci à la station «Clair matin», à l'entrée de Bordj El Kiffan, comme terminus, soit quatre arrêts de moins que prévus, et ce, «pour des raisons techniques», expliquent les conducteurs, sans donner plus de détails. Pour les soirées, les clandestins se frottent les mains. Entre les bus qui s'arrêtent très tôt et les «problèmes techniques du tramway», les usagers n'ont d'autre solution que les taxis clandestins qui volent ainsi à leur secours. Embouteillages à deux heures du matin Contrairement au reste de l'année, pendant le Ramadhan, les rues principales de la capitale sont en proie à des embouteillages monstres. Sur l'autoroute de Dar El-Beïda, les files de voitures ont du mal à avancer. Les automobilistes s'impatientent parfois, «heureusement qu'on peut griller une cigarette, ce qui remet un peu d'ordre, contrairement à la journée ou une dispute peut dégénérer», ironise un chauffeur de taxi. Ces files de voitures sont également visibles devant les centres commerciaux. Ardis et le Centre commercial et de loisirs Bab-Ezzouar sont une des destinations phares d'un bon nombre de familles qui préfèrent y faire les courses avant l'Aïd, ou tout simplement pour une petite promenade. Les rues commerçantes d'Alger ne désemplissent pas. Les terrasses et salons de thé, vendeurs de glaces et autres rafraîchissements créent une ambiance bon enfant, qui disparaîtra certainement au lendemain de l'Aïd avec des fermetures «imposées» dès la tombée du soir. «Si les gens se sentent en sécurité dans la rue, et si les transports fonctionnent, il n'y a aucune raison pour que les commerces soient fermés», explique un vendeur de glaces installé à la rue Ben M'hidi. Il faut dire que les policiers qui sillonnent les artères de la ville rassurent les badauds. Les groupes de jeunes filles et des familles font du lèche-vitrine en toute sécurité. «Nous avons constaté que pour ce Ramadhan, l'ambiance est parfaite. Ma sœur et ma cousine m'accompagnent toujours pour faire les vitrines, histoire de trouver une robe de soirée. Nous ne sommes jamais embêtées. Les artères principales du centre-ville sont bien sécurisées, la présence de femmes et de familles en est la preuve», soutient une jeune fille rencontrée aux alentours de La Grande-Poste. A rappeler qu'un vaste plan sécuritaire spécial «Ramadhan» a été mis en œuvre dans la capitale. Ce plan renforcé par 5000 policiers présents dans les rues vise à contrecarrer toute atteinte à la sécurité. Le renforcement dans les points de contrôle, intensification des patrouilles mobiles a été également à l'ordre du jour du plan déployé par la DGSN. Les embouteillages sont également signalés, avec force, à Bordj El-Kiffan et Staouéli, parmi des destinations préférées des familles pour déguster des glaces et faire des balades à l'air marin qu'offrent ces deux villes. De quoi effacer les séquelles d'une journée éprouvante de jeûne et d'une ambiance mortuaire de la journée, que certains préfèrent passer à dormir. L'informel maintient «le mouvement» Dans certains quartiers, c'est l'informel qui dicte «la conduite» des riverains.A Baraki, les trottoirs et autres espaces publics sont squattés jusqu'à une heure tardive. «Les bruits empêchent tout le monde de dormir ou de se sentir tranquille chez lui. Les ‘‘transactions commerciales'' faites à hauts décibels se déroulent comme durant la journée, c'est-à-dire sans aucun égard au voisinage», témoignent des habitants de Baraki. En ces derniers jours de Ramadhan, les étals prolifèrent. A Bachedjarrah, Belouizdad ou encore à Bab El-Oued, c'est la même ambiance. Ces quartiers connaissent une effervescence sans pareille après la rupture du jeûne. Ces étals sont la destination préférée des familles en quête d'habillement moins chers pour les enfants. C'est à la même logique qu'obéissent les transporteurs clandestins qui se pointent, tournoyant leurs clés à la main, à la sortie de la gare routière. Si certains voyageurs boudent ce genre de services pour des raisons sécuritaires, d'autres n'ont pas d'autre choix que d'emprunter ces véhicules. L'indisponibilité des taxis réglementaires à des heures tardives encourage les clandestins qui profitent au maximum de la programmation de plusieurs liaisons nocturnes par bus vers plusieurs wilayas et au bout desquels les voyageurs se trouvent livrés à eux-mêmes dans les gares.