Mohamed Chami, directeur général de la Chambre algérienne du commerce et d'industrie, est également président de la commission technique chargée du suivi de la mise en œuvre de la zone de libre-échange avec l'Union européenne. Quel bilan faites-vous quelques mois après l'entrée en vigueur de l'accord d'association avec l'Union européenne ? C'est encore trop prématuré pour faire un bilan. La réaction par rapport à un accord n'est jamais immédiate. Il faut plus de temps pour en mesurer l'impact. Le seul impact dont on peut parler actuellement concerne l'engouement des gens pour tous les produits qu'on importait et dont le différentiel est important, c'est-à-dire 30 % ou 15% et qui figurent sur la liste de l'Union européenne soit sous la forme d'exonération totale, partielle ou de contingent. Mais là aussi, ce n'est pas significatif. Aujourd'hui globalement, si vous comparez nos importations en provenance de l'Union européenne avant la mise en œuvre de l'accord et, maintenant, vous remarquerez qu'elles ont baissé. Cet accord était censé développer les échanges pour qu'elles augmentent. Or nous avons eu l'effet contraire. Pour ce qui est du bilan, il faut attendre quatre, voire cinq ans. Avez-vous été interpellé par des opérateurs économiques qui ont connu des difficultés avec la mise en œuvre de l'accord d'association ? Des opérateurs ont posé leurs problèmes. Le premier à s'être manifesté c'est l'homme d'affaires Rebrab et l'Enasucre. Le problème se pose à un niveau global. On a accordé un contingent de 15%. Ça ne risque pas d'influencer le marché où la consommation est d'un million de tonnes et nous produisons à peine 400 000 t. Nous avons aussi reçu une plainte de producteurs de moteurs électriques, d'urée mais aussi d'un éleveur de dindonneaux. Dans le cas de ce dernier, nous avons constaté que l'exonération des 5% de droit de douane rendait le dindonneau d'importation plus compétitif que celui produit par cet éleveur. Il a demandé à ce que les importations soient échelonnées. Mais ce sont des choses sur lesquelles on ne va pas se prononcer tout de suite. Il faut aussi que ce soit bien argumenté. Il y a des produits à propos desquels il n'y a eu aucune doléance pour l'instant car on ne sait pas si les changements qui interviennent sont dus à l'accord d'association ou à d'autres facteurs. Il en est ainsi pour le sucre dont la crise n'a rien à voir avec l'application dudit accord mais en raison du recul de l'offre sur le marché mondial. Vous avez aussi indiqué que vous pouvez demander la blocage d'un produit si vous constatez qu'il y a concurrence déloyale... C'est des mesures de sauvegarde s'il y une menace sur la production nationale. Si ces importations risquent de mettre en péril la production nationale notamment par la fermeture d'unités de production, on intervient. Mais il faut vraiment que ça soit argumenté. Avez-vous déjà eu à réagir de la sorte ? Non pas encore car les dossiers manquent d'arguments. Il n'y a que pour la question du sucre qu'on eu un dossier consistant. Nous nous prononçons sur la recevabilité de la requête. Nous transmettons les plaintes recevables au gouvernement pour ouvrir le débat sur ces questions et prendre les mesures qui s'imposent comme arrêter l'importation ou revoir la quantité des contingents. Les opérateurs ne connaissent pas leurs droits par manque d'informations... Je reconnais que sur ce plan il y a des insuffisances mais il faut dire aussi que les entreprises doivent chercher à s'informer aussi. Elles ne font rien dans ce sens et ce n'est que quand les problèmes apparaissent qu'elles cherchent à comprendre. Pourtant, nous les avons prévenus et leur avons demandé de prendre des dispositions. Quand allez-vous faire une évaluation de l'accord d'association ? Une véritable évaluation de la mise en œuvre de la zone de libre-échange ne peut se faire qu'au bout de la troisième année. La première année, c'est l'année du flottement, la deuxième on commence à ressentir les effets et la troisième année on va faire ce qu'on appelle le discernement entre les activités qui comment à avoir des problèmes du fait de l'accord et les activités qui n'en ont pas. C'est pour ça qu'on a prévu une clause de rendez-vous dans cinq ans. C'est à ce moment là qu'on va voir un peu plus clair et qu'on pourra renégocier.