Même si aucun foyer épizootique n'est détecté en Algérie, la psychose de la grippe aviaire continue de faire des ravages dans le secteur avicole. Les pertes sont énormes. Tahar Benhamza de l'association nationale des producteurs de poulet estime qu'elles sont de « 200 à 250 millions de dollars » jusqu'au mois de février 2006. Intervenu hier sur les ondes de la Chaîne II de la Radio algérienne, M. Benhamza a déclaré que quelque 400 000 emplois risquent de disparaître et 150 000 familles perdraient leur gagne-pain, si l'Etat ne fait rien pour sauver ce qui reste de cette filière. « La quasi-totalité de la filière de petits élevages (de 2000 à 5000 poulets) a fait faillite », alerte-t-il, précisant qu'il s'agit là du principal maillon de la filière avicole. « Depuis six mois, la mise en place du poulet de chair a baissé de 90%. D'habitude, on produit entre 25 à 28 millions par mois. Maintenant, la production du poulet de chair est inférieure à 6 millions par mois », indique-t-il. Les besoins du marché national sont estimés à 300 millions de poulets par an. Si la situation reste telle quelle, il n'y aura plus de poulet sur le marché dans 6 mois. « Déjà le prix du poulet commence à grimper parce que l'offre est supérieure à la demande. La production est en baisse continuelle et, bientôt, le poulet ne sera plus la “viande du pauvre”, car il sera vendu à des prix extrêmement élevés », prévient-il, ajoutant que le poulet représente 65% de la consommation nationale en viande. La flambée du prix du poulet et de la viande blanche de manière générale provoquera inéluctablement la hausse du prix de la viande rouge. M. Benhamza trouve qu'une telle situation n'arrangera ni les consommateurs ni les producteurs. Imputant une part de responsabilité de ce « sinistre » aux producteurs eux-mêmes qui n'ont pas su défendre leur production dès le début de cette phobie de la grippe aviaire, M. Benhamza estime que les médias n'ont pas joué leur rôle afin de rassurer le consommateur. Face à cette catastrophe qui est à même d'effacer un pan de l'économie nationale, M. Benhamza appelle à l'aide de l'Etat. « Nous avons eu des discussions avec les pouvoirs publics et je vous assure qu'ils se sont montrés disposés à faire tout pour surmonter cette crise », souligne-t-il. M. Benhamza indique qu'il y a des groupes de travail qui se penchent sur la situation et que des mesures seront bientôt prises. Parmi ces mesures, l'indemnisation des éleveurs. « L'Etat n'a pas le choix, car il s'agit de préserver cette filière », souligne-t-il. Aussi, pour préserver le cheptel, les éleveurs demandent aux pouvoirs publics « une pause fiscale » pour 2005. Comme ils revendiquent le rééchelonnement de leurs dettes ainsi que la facilitation des crédits à l'avenir pour le repeuplement. Les éleveurs estiment, en outre, que le système d'assurance du cheptel, en vigueur, est « caduc » et nécessite une révision. Revenant sur la prévention contre cette épidémie, M. Benhamza prévoit le scénario catastrophe. Le risque que l'Algérie soit contaminée par l'épizootie de la grippe aviaire n'est pas à écarter, d'autant qu'il est prouvé que les oiseaux migrateurs passent par le sol algérien où ils marquent une pause avant de retourner en Europe. L'invité de la Chaîne II précise qu'un travail de sensibilisation a été fait auprès des producteurs qui sont prêts à appliquer l'ensemble des mesures de prévention contre cette épidémie. Il parle ainsi de la mise en place d'un dispositif de veille, de contrôle et de confinement du cheptel dans des hangars fermés. « Il faut cependant rassurer les éleveurs que si l'on procède à l'abattage de leur cheptel, ils seront indemnisés. C'est de cette manière qu'on garantira la pleine coopération des éleveurs », soutient-il.