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«90% des exploitations céréalières ne dépassent pas les 7 hectares» Omar Zeghouan. Directeur général de l'Institut technique des grandes cultures (ITGC)
Omar Zeghouan est directeur général de l'Institut technique des grandes cultures (ITGC) et vice-président du Conseil national interprofessionnel des céréales. Il a présidé, la semaine dernière, un atelier national consacré à l'évaluation de la campagne céréalière 2011-2012. Il nous livre, dans cet entretien, ses impressions sur le déroulement de la campagne. -Pouvez-vous nous expliquer pourquoi les chiffres donnés de la production céréalière ont été revus à la baisse ? D'abord, Je dois préciser que le travail prévisionnel que nous faisons commence au mois de mars et au fur et à mesure, les conditions dans lesquelles les cultures évoluent sont évaluées et les seuils de rendement et de productivité sont déterminés. Cette année, au mois d'avril, nous avions tablé, en raison des conditions climatiques qui ont été assez bonnes, sur un rendement de 55 millions de quintaux, jusqu'à 57 ou 58 millions de quintaux. Mais à partir du mois de mai, cela a commencé à changer dans la mesure où l'on a observé des perturbations climatiques qui se sont traduites par des pluies qui ont fait des dégâts, de la grêle à l'Est, des déficits hydriques à l'Ouest et pour terminer, il y a eu des incendies au moment où les récoltes étaient prêtes. Tout cela cumulé a fait que l'on n'a pas pu atteindre les résultats prévisionnels et les productions n'ont été que de 51 millions de quintaux. -Peut-on parler alors de régression, puisqu'en 2009, la récolte avait été de 61 millions de quintaux ? L'année 2009 a été vraiment une année exceptionnelle. De mémoire d'agriculteurs, nous n'avions jamais fait une année pareille. L'année 2012 aurait pu être exceptionnelle aussi, n'étaient les neiges et les températures très basses qui ont ralenti l'évolution des cultures. Mais globalement, je dirai que c'est quand même une année moyenne à bonne. -Mais les rendements demeurent toujours en deçà des objectifs… En matière de rendement, l'objectif a été atteint, puisque nous avons enregistré, en moyenne, 20 quintaux à l'hectare, l'objectif étant de 17 quintaux. Nous n'avons jamais réalisé une performance pareille. -Comment se fait-il que des agriculteurs aient réalisé un rendement de 80 quintaux à l'hectare ? Il y a deux choses qu'il faut considérer : le rendement moyen de la wilaya et le rendement de pointe d'un agriculteur. Ce dernier peut effectivement, s'il irrigue, fertilise et que son exploitation ne soit pas touchée par la grêle ou les intempéries, réaliser un rendement de 80 quintaux. Ce sont des rendements de pointe qu'on ne peut pas généraliser sur l'ensemble des exploitations. Nous avons environs 600 000 céréaliculteurs, parmi eux un seul a pu réaliser 80 quintaux à Aïn Defla. Un autre en a fait 75 à Guelma. C'est pour vous dire, que la production nationale céréalière, jusqu'à l'indépendance, n'a jamais dépassé 20 quintaux à l'hectare. De plus, les rendements étaient, il y a quelques années seulement, de 7 quintaux. Aujourd'hui, nous les avons multipliés par 3 et plus et les surfaces par 2,5. -Pouvons-nous faire mieux, compte tenu des potentialités existantes ? Nous pouvons améliorer cela, bien entendu. C'est ce que nous sommes en train de faire avec les programmes de production de semences certifiés, les programmes de diversification de la gamme variétale, les programmes d'irrigation et ceux de formation et de vulgarisation. C'est le ministère en charge du secteur qui s'en occupe avec, en plus, tous les programmes de soutien et de financement de l'Etat. Sans oublier le travail des agriculteurs, car nous, nous ne faisons que les accompagner. -Justement, quelles ont été les contraintes évoquées par ces derniers et que vous avez constatées lors de votre travail d'évaluation de la campagne ? Cela diffère d'une wilaya à une autre. Certains agriculteurs évoquent le problème des semences ou des engrais. Mais en réalité, le véritable problème qui se pose, c'est celui du manque de communication, d'information et d'organisation entre les agriculteurs. Il faut savoir que 90% des exploitations céréalières ne dépassent pas les 7 hectares. Elles ne peuvent, de ce fait, engager des investissements.Le mieux serait que les agriculteurs s'organisent pour constituer des groupements, des coopératives pour cumuler leurs besoins et intervenir ensemble et rentabiliser leurs investissements. La nouvelle loi sur les concessions encourage cela justement. -Il reste tout de même ce problème de stockage souvent évoqué par les céréaliculteurs… Cela dépend des zones céréalières, puisque si on parle de collecte, les structures de stockage actuelles sont suffisantes. En prenant ensemble les structures dont disposent les CCLS, l'OAIC et les anciennes Eriad, les capacités sont de 32 millions de quintaux, alors que la collecte est de 20 millions. Mais si demain on doit collecter toute la production nationale, là c'est vrai, les capacités ne suffisent pas. Il faut rappeler cependant qu'il y a un programme d'agrandissement des capacités qui vise à s'équiper de 39 silos. -Qu'en est-il de l'irrigation d'appoint ? Actuellement, nous dépendons des caprices du climat. Nous avons un climat aléatoire et nous cultivons environ 3,3 millions d'hectares annuellement. Quand arrive le moment de la récolte, nous récoltons environs 2,5 millions de quintaux et le reste, qui représente 600 000 ha est sinistré par manque d'irrigation. Si nous pouvons irriguer cette surface, ne serait-ce qu'avec un rendement de 20 quintaux à l'hectare, cela donnerait 12 millions de quintaux de plus à la récolte. Mais ce programme nécessite un investissement colossal pour le forage et l'équipement. Pour financer uniquement les équipements de surface, il faut 154 milliards de dinars, sans compter les forages. Mais une chose est sûre l'irrigation d'appoint est une sécurité pour la production et va dans le même sens que celui de la sécurité alimentaire.