Le Sahel et l'immigration seront au centre de la visite que Manuel Valls, ministre français de l'Intérieur, effectuera aujourd'hui et demain à Alger. Le cas des travailleurs sans papiers algériens qui ne peuvent pas être régularisés au regard du droit commun français sera, entre autres, évoqué. Paris. De notre correspondante C'est une visite chargée que s'apprête à effectuer à Alger, aujourd'hui et demain, le ministre français de l'Intérieur et des Cultes, Manuel Valls. A l'examen du programme de cette visite officielle – destinée principalement à préparer celle que devra effectuer le président Hollande avant la fin de l'année – les dossiers d'intérêt commun que Manuel Valls abordera avec ses interlocuteurs algériens sont nombreux. Des sujets récurrents mais aussi dictés par l'actualité. Ces dossiers couvriront tant la relation algéro-française dans ses multiples dimensions depuis le volet diplomatique afférent à la situation régionale subsaharienne, qu'à la sécurité dans cette région, de l'immigration et de la circulation entre les deux pays, qu'au culte musulman en France. Autant de sujets qui seront abordés avec le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, le ministre des Affaires étrangères, Mourad Medelci, le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, Daho Ould Kablia, et le ministre des Affaires religieuses et des Wakfs, Bouabdallah Ghlamallah. Un des dossiers bilatéraux sensibles concerne la révision de l'accord bilatéral de 1968 sur la circulation et le séjour des Algériens en France qui semble bloquée. Les autorités algériennes, à travers l'immigration et la circulation des personnes, se montrent soucieuses de la dimension humaine de la relation bilatérale. Alger refuse que l'immigration algérienne en France – première communauté étrangère – soit alignée sur le droit commun (comme le voulait la précédente majorité de Nicolas Sarkozy) auquel sont assujettis les ressortissants des autres pays, hors Union européenne, et entend préserver l'accord bilatéral de 1968 qui traduit le cas spécifique, de par l'histoire et la densité de la relation humaine, de l'immigration algérienne en France en lui adjoignant les éléments positifs du droit commun dont sont exclus les Algériens. C'est le cas par exemple des travailleurs sans papiers, pour ne citer que ce problème, lesquels ne sont pas régularisables au regard du droit commun français, alors que l'accord de 1968 ne prévoit rien à ce sujet (lire article ci-dessous). Les conditions de regroupement familial et des séjours de longue durée devraient être également améliorées. Le gouvernement socialiste ne s'est pas encore prononcé sur l'accord de 1968. La visite de M. Valls à Alger pourrait en être l'occasion, pour ce faire. Il y a également la question récurrente des visas et des conditions dans lesquelles ils sont délivrés aux postulants algériens qui mécontentent tant les autorités que les Algériens eux-mêmes alors que Paris fait état de progrès et d'augmentation du nombre de visas délivrés. Manuel Valls parlera avec ses interlocuteurs algériens de sécurité et de lutte contre le crime organisé, le trafic de drogue et le terrorisme dans la région du Sahel et particulièrement dans le Nord-Mali. La France fait de la menace terroriste dans le Sahel l'un de ses grands sujets de préoccupation en politique étrangère. Récemment, une source diplomatique autorisée française affirmait que la solution à la crise au Sahel est africaine et que «rien ne pourra se faire sans ni contre l'Algérie». Et de considérer qu'une «coopération très étroite avec Alger – qui a eu à faire face dans les années 1990 aux groupes terroristes dont AQMI est l'héritière – est indispensable». «Le fait qu'AQMI soit réfugiée au Nord-Mali peut donner le sentiment que les autorités algériennes soient distantes.» Mais celles-ci sont «pleinement conscientes du danger et de la menace que constitue AQMI pour la région». «Il faut qu'Alger soit un acteur important» dans la résolution de la crise malienne, a ajouté cette source. Les autorités françaises, qui défendent d'abord leurs propres intérêts, n'ont de cesse de faire pression sur leurs homologues algériennes pour les amener à soutenir une intervention militaire au Nord-Mali. En effet, Paris considère que les groupes islamistes – AQMI, Ançar Eddine et Mujao (Mouvement pour l'unicité du jihad en Afrique de l'Ouest) – menacent directement les intérêts français, en Afrique et dans l'Hexagone. Alger, qui connaît bien la région, refuse de se laisser entraîner dans une aventure militaire lourde de conséquences pour l'Algérie et pour toute la région, et continue à privilégier une solution politique au problème malien.