Voilà deux mois qu'a été lancée la grande opération de nettoyage décidée par le ministre de l'Environnement, Amara Benyounès. Plus d'éboueurs, plus de matériel, plus d'argent : est-ce que cela suffit à rendre le pays plus propre ? Pas vraiment. El Watan Week-end a sondé les régions. à l'ouest : -Oran : des efforts visibles. Même si des points noirs persistent, les rues sont un peu plus propres, les éboueurs, reconnaissables à leur gilet orange fluorescent, plus nombreux et le ramassage des ordures, plus régulier. Plus de 5000 tonnes d'ordures ont été déblayées dans la wilaya lors d'une opération qui a touché 107 sites et mobilisé une centaine de camions. Une enveloppe de 62 millions de dinars a été dégagée par la wilaya pour acquérir un matériel plus performant. A noter : des associations telles que Ness El Kheir mènent de plus en plus des actions de nettoyage commando. Mais de nombreux habitants craignent que cet intérêt soudain pour l'environnement ne soit qu'un coup de bluff politique dans la perspective des prochaines élections. -Sidi bel abbès : les élus appellent au civisme. La situation s'améliore surtout dans les principaux sites urbains. Sidi Bel Abbès ne dispose que de douze bennes-tasseuses, cinq tracteurs à remorque et quatre camions, des moyens jugés insuffisants par le maire et le secrétaire général de Sidi Bel Abbès. Les deux responsables ont fait remarquer que des moyens supplémentaires permettront de consolider le dispositif de ramassage des ordures évacuées vers le CET. Ils insistent sur la «nécessaire implication des citoyens dans la préservation de l'environnement et du cadre de vie» et appellent la société civile à s'engager dans une campagne de sensibilisation. -Tlemcen : pas de ramassage pendant trois jours ! Tlemcen, si l'on excepte le centre-ville, est toujours une ville sale. Depuis l'Aïd, dans certains quartiers, les camions de la voirie ne sont pas passés pendant trois jours, une situation aggravée par les pluies. Tlemcen dispose pourtant de moyens de ramassage, des bacs (colorés même), d'un centre d'enfouissement. à l'est -Constantine : les comités de quartier en renfort. La campagne qui progresse lentement depuis un mois, faute de moyens, n'a touché que certaines cités à l'instar de Benchergui, Sotraco, Ciloc, une partie du centre-ville de Constantine, ou la nouvelle ville Ali Mendjeli. Le wali a débloqué 30 millions de dinars pour acquérir de nouveaux engins. Des comités de quartier et des habitants ont apporté leur contribution. A la cité Djamel Abdennacer (ex-Ciloc), célèbre pour sa décharge sauvage, le décor a nettement changé. Même si la wilaya dispose de décharges réglementées et d'un CET, des décharges sauvages surgissent un peu partout. Le wali compte instaurer des amendes. -Sétif : la ville s'embourbe dans l'insalubrité. L'éradiction du souk Abacha n'a rien changé à l'apparence de la ville. En cause : l'incivisme de certains habitants, la démission des gestionnaires disposant pourtant de moyens humains et matériels conséquents et la nonchalance des éboueurs. Même si les centaines de tonnes d'ordures sont chaque jour acheminées vers le CET de Sidi Haïder, Sétif s'embourbe dans l'insalubrité. A l'exception de l'Association pour la promotion de la qualité et de la protection du consommateur, rares sont les voix qui se font entendre au sujet de l'installation des incinérateurs. -Tébessa : encore des décharges sauvages. Tébessa renoue avec sa propreté d'autrefois malgré les décharges sauvages, surtout dans les quartiers populaires, ceux justement concernés par la campagne. La collecte par les services municipaux continue d'être irrégulier, parfois inexistant. Plus de 2100 tonnes d'ordures ont été collectées et transportées au CET. Durant plus de quinze jours, 191 agents, une centaine de volontaires, une dizaine de camions à benne et autres engins ont été mobilisés. Certaines associations locales comme Ahbab Tébessa et Ness El Hema ont participé au nettoyage. -Batna : tout pour les quartiers résidentiels. Malgré les efforts déployés pour les grandes artères et dans les quartiers résidentiels (Stand, Bouzourane et Beauséjour), les quartiers populaires et périphériques (Z'mala, Parc à fourrage, Djebbanet Echouhada, Kechida et Bouakal) n'ont pas bénéficié du même traitement alors qu'ils demandent plus d'attention. Certains de ces quartiers sont traversés par l'oued, obstrué de déchets mêlés aux eaux usées. La cité des 1200 Logements, la première, a été équipée de bacs à ordures. Les habitants de Batna restent sceptiques quant à la régularité de l'opération, pensant qu'il s'agit d'une campagne précédant la vraie «campagne». Celle des élections. -Biskra : un cloaque puant au centre-ville. Les premiers effets de l'opération de nettoyage sont perceptibles dans les rues et les grandes artères de Biskra mais des points noirs subsistent, surtout dans les quartiers délaissés par les éboueurs. Des cités dont le réseau d'assainissement est obsolète pataugent dans des mares nauséabondes. Exemple : au centre-ville de Biskra, près du marché central, les clients et les riverains évoluent, depuis des semaines, au milieu d'un cloaque puant. Pour avoir un effet durable, cette opération «nécessite de la continuité dans les efforts et le renforcement des moyens», précisent des habitants, lesquels, satisfaits des premiers résultats espèrent qu'elle ne connaîtra pas le même sort que de nombreux projets adoptés par le passé. au centre : -Aïn defla : le wali veut «matraquer les consciences». En l'absence d'un mouvement citoyen fort et de moyens appropriés comme des bacs, la situation reste critique dans certaines communes (El Attaf, El Abadia, Khemis Miliana, Boumedfaâ). Quelque 1500 agents ont été mobilisés et des tonnes d'ordures ont été orientées vers les 35 décharges publiques encore ouvertes puisque le CET réalisé en 2009 à Aïn Defla ne fonctionne toujours pas. Mohamed Sadek Bounebab, directeur de l'Environnement , plaide pour la manière forte : «On doit matraquer les consciences pour venir à bout des points noirs et appeler tous les secteurs à la rescousse, en premier lieu la presse, la mosquée, l'école...» -Chlef : les élus dénoncent. Tout en reconnaissant le manque de moyens, les élus louent l'effort considérable consenti par les travailleurs communaux du service de nettoiement. «Quelque 140 tonnes d'ordures sont collectées chaque jour, à des heures régulières, puis acheminées vers le CET à 5 km au sud-ouest de l'agglomération, précisent-ils en dénonçant aussi l'incivisme des citoyens, et ce, malgré les campagnes successives de sensibilisation.» en kabylie -Tizi ouzou : plus de 1000 décharges sauvages à éradiquer Plusieurs campagnes de nettoyage ont été menées à Tizi Ouzou, sans avoir réglé le problème de l'insalubrité. Ces actions de volontariat organisées chaque samedi ont vu l'implication de tous les services. La Protection civile a même réquisitionné ses engins pour renforcer les moyens obsolètes de la voirie. Les autorités ont dispatché quelque 200 engins sur différents quartiers. Toutefois, ces opérations se sont poursuivies sans aucun impact. Les ordures restent visibles toute la journée. La mairie de Tizi Ouzou, qui dispose de 32 millions de dinars alloués à l'environnement, peine à faire respecter les dépotoirs autorisés et l'achat de bacs à ordures. Tizi Ouzou souffre, en réalité, du manque de volonté politique pour éradiquer les 1361 décharges sauvages soit… plus de la moitié du pays ! Leur éradication passe impérativement par la réalisation de CET. Depuis 2006, la wilaya en a réalisé trois (Tizi Ouzou, Ouacifs et Draâ El Mizan) qui fonctionnent partiellement. Trois autres projets de CET (Mizrana, Boubhir et Fréha) se heurtent à de fortes oppositions. En dépit de la dotation des communes de camions à benne-tasseuse et la création d'une société privée à Tizi Ouzou, le ramassage reste irrégulier. -Béjaïa : pas vraiment de progrès. L'opération grand nettoyage est à la peine dans la wilaya, surtout dans les quartiers ceinturant la ville. À Sidi Ahmed et à Iheddaden, le citoyen râle toujours contre les poubelles pleines et éventrées. Les escaliers, les oueds et les fourrés reçoivent sans cesse les poubelles jetées par les fenêtres. Problème : les APC de la wilaya n'ont pas les moyens matériels et humains qu'exige cette opération de grand nettoyage. -Bouira : la ville attend son tour. A part le grand nettoyage effectué à Lakhdaria suivi d'affrontements entre citoyens de la petite ville de Madinat El Hayat et les forces de sécurité, il y a plus d'un mois (des habitants avaient empêché les camions de la voirie d'accéder à la décharge publique), le projet dit «ville propre» n'a pas encore été lancé à Bouira. Et pourtant ce ne sont pas les moyens qui manquent. Lakhdaria, où les pouvoirs publics ont mobilisé tous les moyens nécessaires, est devenue propre. A Bouira, des jeunes recrutés dans le cadre de l'emploi de jeunes sillonnent chaque jour les quartiers pour ramasser les ordures. Bilan : une nette amélioration du quotidien notamment après l'éradication du marché informel (Draâ El Bordj). Dans d'autres cités, des décharges persistent. au sud -Tamanrasset : le wali instaure des amendes. La prolifération des ordures et des décharges sauvages a poussé les autorités locales à mettre en place une commission chargée d'élaborer un programme de campagnes pour la protection et la préservation de l'environnement, en particulier des sites touristiques. Selon des organisateurs, la campagne de nettoyage a ciblé les différents points noirs recensés par les services compétents : oued Tamanrasset et les quartiers de Tahaggart, Guetaâ El Oued, Sersouf et le centre-ville. D'importants moyens matériels et humains ont été mobilisés pour la collecte et le ramassage des déchets, destinés à être acheminés vers le CET d'Inzaouen, à moins de 10 km de la ville de Tin Hinan. Ce CET peut recevoir jusqu'à 21 000 tonnes de déchets par an. Mais tous les efforts consentis n'ont aucun impact, en raison de mauvaises habitudes. Le wali Saïd Meziane, a dernièrement recommandé de recourir au paiement d'amendes.