Les ministres arabes des Affaires étrangères ont achevé, hier, l'examen et l'adoption des principales moutures de projets qui devront être soumis demain au 18e sommet des chefs d'Etat qui s'ouvre demain à Khartoum, au Soudan. L'un des plus importants est sans doute l'institution d'un conseil arabe de la paix et de la sécurité qui devrait remplacer le mécanisme de prévention des conflits mis en place depuis 2000. Ce conseil est appelé notamment à proposer des stratégies relatives à la préservation de la sécurité et de la paix dans le monde arabe mais surtout, et c'est le plus important, à prendre les mesures appropriées en cas d'agression d'un Etat membre par un autre Etat arabe ou par un pays étranger. C'est donc une sorte de pacte de non-agression et de défense qui va être institué entre les pays de la ligue. Cela va-t-il se traduire par des engagements sur le terrain, d'autant plus que plusieurs foyers de tension ont pour théâtre justement des pays arabes comme la Palestine, le Liban, l'Irak et le Soudan ? Rien n'est moins sûr. Et pour cause, l'autorité palestinienne réclame, vainement jusque-là, que les Etats membres de la ligue veuillent bien s'acquitter de leurs quotes-parts pour financer les salaires des Palestiniens. Hier, à partir du Koweït, Khaled Mechaal, le chef du bureau politique de Hamas, a lancé un ultime SOS au conclave arabe, estimant que la Palestine a besoin d'une aide mensuelle de 170 millions de dollars dont 115 millions de dollars uniquement pour payer les salaires. Or les 55 millions de dollars décidés lors du sommet d'Alger n'ont pas encore été versés intégralement en raison des manœuvres dilatoires de certains pays réputés mauvais payeurs. Le ministre palestinien du Trésor, M. Sankrat, n'a pas manqué d'ailleurs de rappeler hier à Khartoum que « l'objectif d'une aide mensuelle de 55 millions de dollars fixé à Alger n'avait même pas été tenu ». Le fond et la forme C'est là le premier test sérieux pour le succès du sommet de Khartoum qui, sur le plan du principe, le conseil des ministres des AE a tranché un soutien sans réserve à la cause palestinienne, mais que dans les faits laissent ces « frères » face au diktat d'Israël. Les ministres arabes des Affaires étrangères se sont même félicités hier de la victoire de Hamas au terme des élections législatives palestiniennes qui ont « réaffirmé l'arabité d'El Qods et le refus de sa judaïsation ». Ils ont également préparé un projet de résolution soulignant que la réalisation d'une paix juste, globale et durable au Moyen-Orient est tributaire « du retrait total d'Israël des territoires arabes occupés depuis juin 1967, de l'instauration d'un Etat palestinien indépendant et du règlement du problème des réfugiés conformément à la résolution de l'Assemblée générale de l'ONU ». Concernant l'Irak, les ministres arabes des AE ont adopté la mouture finale du projet de résolution présenté par l'Irak sur la nécessité de dynamiser l'action arabe en Irak et de renforcer les relations avec ce pays à travers l'échange de visites officielles et l'ouverture d'une mission de la Ligue arabe à Baghdad dans les plus brefs délais. Les Arabes appellent par ailleurs à l'accélération de la formation du gouvernement irakien et au retrait des forces étrangères de ce pays. Au sujet de la question du Darfour, les ministres arabes semblaient avoir pris option en faveur de l'envoi d'une force internationale dans la région, même si cela n'est pas du goût du Soudan. Les Etats-Unis ont su en effet court-circuiter la résolution de la ligue en faisant voter le principe vendredi par le Conseil de sécurité. C'est du moins ce que suggérait hier Amr Moussa devant les journalistes. Les ministres ont également approuvé hier le projet relatif aux questions de fond et de procédure lors du vote. Les questions de fond nécessitent deux tiers des voix pour leur adoption et les questions de procédure nécessitent la majorité simple. Ils ont enfin discuté du projet du statut de la Cour arabe de justice dont certaines clauses ont suscité des réserves, notamment de la part du sultanat d'Oman. Cependant, les réformes de fond, comme la rotation au secrétariat général de la ligue, ont été soigneusement éludées, confirmant ainsi l'hégémonie de l'Egypte sur une organisation estampillée à juste titre « annexe » du ministère des Affaires étrangères du pays de Moubarak.