Le Conseil des ministres arabes a entamé hier les travaux préparatoires du sommet du 28 mars. Le Sommet arabe qui tiendra ses assises à Khartoum les 28 et 29 mars planchera particulièrement sur les situations préoccupantes en Irak, dans les territoires palestiniens occupés et au Darfour, de même qu'il essaiera d'accentuer la mise à niveau de la Ligue arabe par l'adoption de plusieurs projets entrant dans le cadre des réformes de l'Organisation arabe. De fait, l'évolution de la situation en Irak -où menace la guerre interconfessionnelle- dans les territoires palestiniens -où l'élection du Hamas a brouillé les cartes au Proche-Orient- et au Darfour, où la guerre perdure, ne laissent d'inquiéter une communauté arabe pas toujours préparée, ni sans doute prête à faire face aux demandes des uns et des autres. De fait, pour des raisons différentes, quoique similaires en réalité, Irakiens, Palestiniens et Soudanais, vont demander en choeur une assistance arabe financière accrue et plus consistante, les premiers afin de permettre à leur économie de souffler phagocytée qu'elle est par trois ans de guerre, les seconds pour pallier au manque à gagner induit par la victoire du Hamas aux élections législatives et la menace de la communauté internationale de couper l'aide financière à l'Autorité palestinienne, les troisièmes enfin pour contrecarrer les plans américains -visant à remplacer les forces de l'UA par celles de l'ONU- afin de permettre aux forces de l'Union africaine (UA) de continuer leur mission de paix au Darfour, mission menacée par l'asphyxie financière de l'Amis (Mission inter-africaine de paix pour le Soudan). Hier, ces trois points étaient au centre des débats de la réunion préparatoire du Sommet arabe. Si la question du Darfour reste importante, il semble que la menace de guerre civile en Irak et les risques d'effondrement de l'Autorité palestinienne inquiètent davantage les diplomates arabes qui veulent leur trouver une issue. Selon le chef de la diplomatie irakienne, Hoshyar Zebari, son pays a préparé trois résolutions qu'il compte soumettre au sommet: la condamnation du terrorisme contre les civils, le soutien aux efforts de formation d'un gouvernement d'union nationale et enfin une demande de suppression des dettes irakiennes envers les pays arabes. M.Zebari, a par ailleurs, souhaité «un engagement arabe plus important, sérieux et clair, particulièrement dans cette période critique en Irak». Il ne fait pas de doute que le débat sur l'Irak sera houleux, d'autant plus que nombre de pays arabes, majoritairement sunnites, ne cachent pas leur déception de la marginalisation des sunnites irakiens dans les affaires du pays depuis la chute du régime de Saddam Hussein. De son côté, le ministre palestinien des Affaires étrangères, Nasser Al-Qidwa, dans une brève déclaration à la presse, a mis en exergue le fait que les Palestiniens «traversent une période très sensible (de leur histoire)» s'est dit cependant «confiant» dans l'apport politique et financier des pays arabes à l'Autorité palestinienne. A propos de la Palestine, le secrétaire général de la Ligue arabe, Amr Moussa, a affirmé que le sommet de Khartoum «sera une grande occasion pour dynamiser l'initiative arabe de paix en réaffirmant l'engagement du gouvernement palestinien vis-à-vis de cette initiative et en soutenant la politique extérieure palestinienne envers Israël sur la base de cette initiative arabe prise lors du sommet de Beyrouth en 2002». Sur un autre plan, et revenant sur les réformes entamées pour restructurer la Ligue arabe, M.Moussa a indiqué que ce sommet «parachèvera les réformes entamées lors du sommet de Tunis à travers un document de réforme et de développement et mises en oeuvre lors du sommet d'Alger par l'amendement de certaines clauses de la Charte de la Ligue et la création de nouvelles structures et mécanismes relatifs à l'action arabe commune». De fait, dans cette perspective, les ministres des Affaires étrangères réunis hier à Khartoum devaient examiner le texte final portant sur le projet de statut du Tribunal arabe de justice, afin de le soumettre, pour approbation, aux dirigeants arabes de même que seront étudiées les moutures des fondements de la Ligue par le parachèvement de ses institutions et organisations régionales. Ces deux projets vont compléter ceux créés lors de la présidence algérienne du sommet arabe et concernent le Parlement arabe transitoire, dont le règlement intérieur -qui sera soumis au sommet de Khartoum- a été adopté récemment par les 88 membres, l'Instance de suivi de mise en oeuvre des engagements et décisions et enfin le mécanisme de vote et de prise des décisions au sein des Conseils de la Ligue arabe. Celui-ci doit passer de l'unanimité - point d'achoppement dans la prise de décisions importantes concernant l'action arabe commune- au système de la majorité. Un autre point important fera l'objet d'un examen de la part des ministres arabes, il s'agit du projet de statut du Conseil arabe de sécurité et de paix, dont la mise en forme vient d'être achevée par la commission ad hoc installée lors du Sommet arabe d'Alger. Cette nouvelle structure doit en fait se substituer au mécanisme de prévention des conflits adopté par la Ligue arabe au Caire en 2000. Notons toutefois que plusieurs dirigeants arabes, dont le président égyptien Hosni Moubarak et le guide libyen, Maâmar Al Kadhafi ont décidé de faire l'impasse sur le sommet de Khartoum.