Il y avait beaucoup de monde à venir voter à Saint-Denis. Il faut dire que si les élections sont illégales, le sujet est plus que sensible. Le maire de la ville, Didier Paillard, a organisé un référendum sur le droit de vote des étrangers. Ils étaient tous là, même François Hollande, premier secrétaire du Parti socialiste. Toute la gauche a fait le déplacement républicain. « Nous voulons affirmer, à travers ce référendum local, que la citoyenneté n'est fondée ni sur le mythe du sang ni sur la juxtaposition des communautés ethniques, mais bien sur l'égalité des droits. Comment un habitant de Saint-Denis qui est arrivé d'Algérie dans les années cinquante peut-il comprendre qu'il a moins de droit que son voisin italien, espagnol, portugais ou français ? Cette discrimination légalisée a pour conséquence principale d'accroître un sentiment d'exclusion et d'humiliation dans toute une partie de la population », s'indigne Didier Paillard. Cette fois-ci, c'est promis, si la gauche revenait au pouvoir elle se saisirait de cette question. Pour de vrai, pas comme en 1981, lors de l'élection de François Mitterrand. « Il n'est pas normal que, dans notre pays, ceux qui vivent ici ne puissent voter aux élections locales, alors qu'ils y travaillent et y payent des impôts », constate François Hollande. Il s'est engagé à porter devant le Parlement un projet de loi sur le droit de vote et d'éligibilité des étrangers aux élections locales, et si nécessaire à organiser un référendum sur la question. En cas de victoire aux présidentielles de 2007. Le référendum s'est déroulé dans les conditions habituelles dans les trente-quatre bureaux de vote de la ville. Comme un vote ordinaire. Les électeurs avaient à répondre par oui ou par non à la question : « Etes-vous favorable au droit de vote et d'éligibilité des résidents étrangers aux élections locales ? » Lors de plusieurs sondages, la réponse a toujours oscillé entre 70% et 85% de oui. « C'est la première fois que je vote. Je n'ai jamais pensé que je pouvais un jour donner mon avis sur la politique en France. C'est ma fille qui a insisté pour que je vienne voter. Sincèrement, je suis ému. C'est comme si c'était un vrai vote », s'enthousiasme Akli, présent en France depuis 1963. Sa fille, Nora, est plus déterminée. « J'espère cette fois-ci que le PS ne nous trahira pas. Il faut qu'il inscrive dans son programme le droit de vote des étrangers aux élections locales. Les Français ne sont pas racistes et approuvent cette idée, contrairement à ce que pensent les hommes politiques. Tous les partis de gauche sont derrière nous. A nous de faire en sorte que ce droit devienne réalité. Cela passe par un engagement quotidien dans la cité », tranche Nora. « Cette initiative montre qu'il est possible, malgré les embûches préfectorales, d'organiser en pratique un référendum qui s'adresse aux citoyens résidant sur un même sol, qu'ils soient d'origine française ou étrangère », s'est réjoui le collectif national Votation Citoyenne.